The Greatest, un surnom qu’il s’était bien choisi et que personne ne lui aura contesté jusqu’à son dernier souffle. Il était et il restera la plus grande légende de la boxe mondiale de tous les temps. Lui, c’est Muhammad (Mohamed en français) Ali; le petit gars né à Louisville dans le Kentucky un 17 janvier 1942 et mort à Scottdale Hospital de Phoenix en Arizona le 3 juin 2016 à l’âge de 74 ans.
Champion toutes catégories et au-delà de ses performances sportives, il a également été connu pour son gout du spectacle et au travers de son sens de la formule «je vole comme un papillon et je pique comme une abeille». Facétieux arrogant et provocateur de fois avant chacun de ses combats, il prédisait à quelle reprise il enverra ses adversaires au tapis. En 1964, il n’a que 22 ans, et déjà un titre olympique en poche, quand il devient champion du monde des lourds en terrassant Sonny Liston pourtant réputé “invincible”.
Ses prises de position religieuse et politique ont également contribué à faire parler de lui tout comme sa conversion à l’islam sunnite en 1975. Né Cassius Marcellus Clay Junior, il adopte le nom de Muhammad Ali en 1965 à l’âge de 22 ans après avoir rejoint le mouvement La Nation de l’Islam fondée par Elijah Muhammad et son disciple Malcom X avec il finira par prendre ses distances. Pour couronner le tout, Ali aimait se dire un homme, un combattant de la liberté du peuple noir (I’m a man, i fight and speak for the freedom of the black people).
Icône adulée, vilipendée de fois et objecteur de conscience; comme tout jeune américain de son époque, il refuse de s’enrôler dans l’armée américaine en 1966 par opposition à la guerre de Vietnam. Au nom de sa foi et de ses convictions, il déclare : «Aucun Vietnamien ne m’a jamais traité de nègre, je ne vois pas pourquoi ceux qu’on appelle les nègres iraient à des milliers de kilomètres de leur maison, en Amérique, lâcher des bombes et tirer des balles sur des gens innocents qui ne nous ont jamais offensé. Et je vais le dire sans détour: non, je n’irai pas». Arrêté sans faire de la prison mais dépossédé de sa licence de boxe pendant trois ans, il ne reviendra à son métier que lorsque son appel soit finalement reçu par la Cour suprême américaine.
En 1970 il remonte sur un ring avant de tenter, l’année suivante le 8 mars 1971, de reconquérir sa ceinture mondiale. La première défaite de sa carrière sera au rendez-vous au Madison Square Garden, face à Joe Frazier devenu champion du monde poids lourd chez les pros en son absence en l’emportant aux points. C’est ce qui sera désormais considéré comme le premier de la série des combats du siècle. En 1973, il perd e nouveau face à Ken Norton et s’en sort avec une mâchoire brisée avant de prendre sa revanche en le battant. Le 28 janvier 1974, c’est «Ali-Frazier II» et Ali l’emporte à son tour aux points avant qu’il ne le batte finalement par abandon en octobre 1975 dans un troisième combat aux philippines du dictateur Ferdinand Marcos.
C’est une boutade qu’on attribue à Mobutu Sese Seko «the rumble in the jungle= la lutte dans la jungle ou la bastonnade dans la jungle», qui explique cet événement sportif considéré comme le combat du siècle pour la première fois en terre africaine. Grace à son manager Herbert Mohamed qui avait trouvé une ficelle pour rentabiliser la marque Ali : l’export diplomatique : «invitez Ali à combattre et votre pays sera sous les projecteurs du monde entier», le sulfureux mégalo promoteur américain Don King et le chef de l’Etat zaïrois organiseront ce combat à Kinshasa qui a donné lieu au documentaire When We Were Kings, primé aux Oscars de 1996. Pour son événement planétaire aux 10 millions de dollars américains dépensés alors que le pays commençait sa descente aux enfers économiques, Mobutu s’offrait en plus un sacré coup de publicité en faisant venir à Kinshasa la crème des artistes noirs du moment : James Brown, BB King, Manu Dibango, Celia Cruz ou encore la sud-africaine Miriam Makeba, lors d’un festival musical.
Sa politique de Retour à l’authencité lancée en 1973, Mobutu au pouvoir à la faveur d’un coup d’Etat militaire le 24 novembre 1965 décida d’utiliser le sport comme moyen d’asseoir son influence et accroître encore sa popularité sur le continent africain. Ayant d’abord misé sur le football, ce qui permit à l’équipe nationale du Zaïre Les Léopards de devenir champions d’Afrique au Caire en Egypte en 1973 et de se qualifier pour la coupe du monde 1974 en Allemagne. Trois défaites successives et 9 buts encaissés contre la Yougoslavie sans oublier les 3 buts contre le Brésil et les 2 buts contre l’Ecosse; l’aventure footballistique du Zaïre tourna en véritable cauchemar.
Peu conventionnel dans son style de boxe pour un poids lourd mais doté d’une intelligence et d’une force de frappe qui déstabilise le plus coriace des adversaires, Ali savait profiter des occasions. Et c’est au Zaïre de Mobutu que sa chance lui sourira de nouveau le 30 octobre 1974 dans la capitale Kinshasa. Souvent acculé dans les cordes et encaissant une pluie de coups, il riposte par des enchaînements qui minent progressivement son adversaire Transcendé par des cris d’Ali boma ye (Ali, tue-le en lingala) d’une foule en délire au Stade du 20 Mai (Ex Stade Tata Raphael) acquis à sa cause, il terrasse au 8ème round George Foreman, son ennemi juré qu’il surnommait tantôt le Gorille tantôt l’Oncle Tom et redevient champion du monde. Titre qu’il conservera ensuite aux dépens d’un illustre inconnu, Chuck Wepner, qui lui résista pendant 15 rounds et qui inspirera à Sylvester Stallone le rôle de Rocky. D’Oscar de la Hoya à Sydney Poitier en passant par Lennoy Lewis, le champion ne laissait personne indifférent.
Malgré son caractère parfois trempé avec «des bons mots» et du «trash talking = langage ordurier), Ali aura laissé un palmarès à faire pâlir plus d’un sportif. Avec ses 1,91 m (6′ 3″) de taille, il a eu 61 combats professionnels dont 56 victoires avec 6 victoires par KO, 5 défaites, 0 matchs nuls et 0 combat sans décision. Il fut champion du monde poids lourds WBA (1964, 1967, 1974-1978, 1978-1979) et WBC (1964-1967, 1974-1978). Champion olympique aux Jeux de Rome en 1960 (poids mi-lourds), il fut Vainqueur des Golden Gloves en 1959 (poids mi-lourds) et 1960 (poids lourds) chez les boxeurs amateurs.
Retraité en 1981, Muhammad Ali revient dans la lumière en allumant la flamme olympique aux Jeux d’Atlanta en 1996 où il reçoit une médaille d’or en remplacement de celle disparue en 1960. Après un combat de 32 ans contre la maladie de Parkinson bien au-delà de tout ce que les médecins prédisaient, il s’en est allé rejoindre le paradis dont il parlait tant. Et c’est son ami Bill Clinton, l’ancien président des Etats-Unis qui prononcera l’éloge funèbre au cours des obsèques populaires du vendredi 10 juin 2016 à Louisville dans son Kentucky natal selon son souhait. Barack Obama lui aura également rendu hommage en déclarant qu’il était «the Greatest» en saluant son rôle dans la lutte pour les droits civiques aux côtés de Martin Luther King et Nelson Mandela.
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