Du haut de ses 84 ans très bientôt et malgré une santé précaire depuis deux ans, c’est un Tshisekedi bon pied bon œil qui; sur un ton hésitant parfois mais ferme a ouvert et clôturé le Conclave dit des Forces politiques et sociales acquises au changement de la RDC. «Quelles que soient les circonstances dans lesquelles le pays va vivre, nous sommes tout près de la victoire», n’a pas hésité à affirmer Etienne Tshisekedi dans son mot de remerciement prononcé sans document écrit lors de la cérémonie de clôture. En effet, du 8 au 9 juin 2016, une représentation assez importante de l’opposition politique congolaise, des membres de la Société civile et des personnalités du pays se sont réunis sur invitation de l’UDPS et son président dans la commune de la banlieue bruxelloise huppée de Genval au Martin’s Hôtel dans le Brabant Wallon.
Au motif de cette rencontre : «discuter et échanger entre patriotes sur la crise politique grave que traverse le pays et ainsi proposer les solutions pour conjurer le chaos qui se profile à l’horizon». Autour de la table, l’UDPS et Alliés qui invitait ainsi que La Dynamique de l’opposition, le G7 au complet, l’AR (l’Alternative républicaine), Le Front du Peuple, La MPP (Majorité présidentielle populaire), le G14, La Convention des Républicains et la Société civile ainsi que des personnalités invités à titre individuel.
A l’issue de deux jours d’âpres discussions, un compromis global a été trouvé après plus de dix heures des négociations nommé L’Acte d’Engagement de Genval. Au terme de celui-ci, il est né un groupement du nom du Rassemblement regroupant tous les participants au Conclave issus des Forces politique st sociales acquises au changement. Aussi a-t-il été mis sur pieds un Comité des sages composés des partis signataires de l’Acte d’Engagement avec pour but pour une meilleure coordination des actions de la conférence pour l’avènement de l’alternance.
En vue de peaufiner ses stratégies, la première réunion du Comité des Sages sous la présidence d’Etienne Tshisekedi s’est tenue au lendemain de la clôture du Conclave à l’Hôtel Montgomery. Dans la foulée, une audience fut accordée au Facilitateur du Dialogue National congolais désigné par l’Union Africaine, le togolais Edem Kodjo, le Vendredi 17 juin 2016 entre 18h00 et 19h30 à Bruxelles.
Dans cet Acte d’Engagement, même si l’idée d’un Dialogue national inclusif n’est pas mentionnée spécifiquement, entre autres fortes résolutions; les conclavistes insistent sur le respect total de la Constitution, la mise en œuvre de la Résolution 2277 des Nations Unies (qui prolonge le mandat de la Mission de l’ONU en RDC (Monusco) et en appelle aussi à la tenue rapidement des élections libres et crédibles et à organiser un dialogue politique); l’arrêt des poursuites et tracasseries judiciaires contre les membres de l’opposition et les journalistes, la libéralisation de l’espace médiatique publique, la réouverture des medias privés fermés ou leur restitution aux propriétaires pour ceux confisqués et la cessation du dédoublement des partis politiques aujourd’hui dans l’opposition.
Autres exigences de l’opposition, il faut noter la question du retour au pays des exilés politiques, la réorganisation de la Ceni et de la Cour Constitutionnelle, et la convocation de l’élection présidentielle au plus tard le 19 septembre 2016. Tout en disant un non catégorique au Dialogue tel que convoqué sur base l’ordonnance du 28 Novembre 2015 du président Kabila, les opposants exigent par contre son départ le 19 décembre 2016, à 23 h 59 précises. Toutes ces résolutions ont été rejetées d’un bloc par la Majorité Présidentielle (MP) en y voyant une tentative d’un coup d’Etat constitutionnel de la part des opposants. Ce qui présage déjà un nouveau bras de fer entre les deux parties.
Arrivé au terme de son deuxième et dernier mandat constitutionnel, le président actuel ne peut se représenter. Pourtant, ses éminences ont opté pour une stratégie de «glissement» du calendrier électoral. Un pari qui leur réussit du moins jusque maintenant : le scrutin présidentiel, prévu le 27 novembre, ayant très peu de chance de se tenir dans les délais. La Commission électorale nationale indépendante (Ceni) ne l’a-t-elle pas reconnu elle-même, évoquant un retard de quatorze à seize mois. Surtout après la décision, en mai 2016, de la Cour constitutionnelle qui permet à Joseph Kabila de se maintenir en poste tant qu’un nouveau président n’est pas élu.
Dans une motion de remerciement et de reconnaissance au nom de tous les participants au Conclave de Genval, Delly Sessanga a rendu un vibrant hommage à Etienne Tshisekedi pour son combat politique mené des décennies durant. Icône vivante, il est à la base de l’initiative pour l’unité et la communauté de vision sur la situation de notre pays renchérit-il avant de conclure que son leadership pour la cause de la liberté, la justice et de la démocratie est reconnu.
Au nombre des absents de marque, Moise Katumbi Chapwe; candidat déclaré à la présidentielle de novembre 2016. En soins médicaux en Europe, son ombre aura plané sur toute la rencontre. Coïncidence ou pas, Le Martin’s Hôtel au Château du Lac de Genval où s’est tenu le Conclave fut son lieu de noces avec Carine son épouse. Deux de ses ainés dont Antoine Raphael Katebe Katoto, un proche d’Etienne Tshisekedi aura été pour beaucoup dans l’organisation et la tenue de cette rencontre. Le Mlc (Mouvement de Libération du Congo) de Jean-Pierre Bemba par son SG Mme Eve Bazaïba Masudi qui avait décliné l’invitation de l’UDPS de se rendre à Bruxelles s’est ressaisi en dernière minute. Dans une conférence de presse tenue à Kinshasa le 23 juin 2016, le porte-parole du parti, le député William Canon dit que le MLC approuve les résolutions du Conclave de Bruxelles auquel il n’avait pas pris partie.
Un autre absent, Vital Kamerhe, président de l’UNC (Union pour la Nation Congolaise) en voudrait toujours au parti de Tshisekedi de n’avoir pas soutenu les marches de protestation auxquelles il avait co-appelé le 26 mai 2016 à Kinshasa. C’est ce qui expliquerait sa bouderie du rendez-vous de Bruxelles assure un proche sous anonymat. Sur Kamerhe en personne, Delly Sessanga était plus que clair : «il faut sortir des petites manifestations et voir plus grand…». Justifiant le choix de son parti L’Envol et la Dynamique de l’opposition Bruxelles pour le conclave contrairement aux critiques du même Kamerhe, le député élu du Katanga et proche de Moïse Katumbi assure «qu’une telle rencontre n’aurait pu se tenir à Kinshasa même avec la meilleure volonté du monde, le risque d’interdiction, voire d’arrestation, était trop grand. Et puis Etienne Tshisekedi vit ici. Il fallait à tout prix couper l’UDPS de Joseph Kabila, quitte à perdre Vital Kamerhe. Courtisé par le pouvoir qui espérait le voir s’asseoir à la table des négociations de son Dialogue national, Etienne Tshisekedi reste une pièce maîtresse de l’échiquier politique congolais, malgré l’âge et la distance, il jouit encore d’une immense popularité» conclut Delly Sessanga depuis Genval.
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