Analyste et spécialiste en marketing politiques, Michael Tshibangu n’a plus de secret pour ces deux domaines. Juriste de formation, il est aussi un activiste reconnu pour la cause de son Congo RD natal dont il parle à longueur des journées. Enfin, il est le Président de l’Association pour le Développement et la Démocratie au Congo (ADDC) basée au Royaume-Uni. Utilisateur avisé des Médias sociaux, il s’est confié en exclusivité à AFRIWAVE.COM pour donner son point de vue sur le Dialogue politique national qui s’achève bientôt à Kinshasa et le devenir de ses résolutions.
« Le Dialogue politique national inclusif… sa représentativité et son processus »…
Évidemment dans quelques jours le Dialogue est censé prendre fin, mais ce que nous réalisons est que ce dialogue n’est pas du tout un vrai dialogue dans la mesure où d’abord il y a ce problème de représentativité. Il y a aussi ce problème du processus du dialogue dont l’ensemble est à mon avis biaisé dans la mesure où vous trouverez dans l’opposition (pro-dialogue selon notre Rédaction) des opposants qui défendent la cause de la Majorité Présidentielle (MP). Je pense ici à des personnes comme Steve Mbikayi, Justin Bitakwira, Ne Muanda Nsemi et d’autres personnes que nous avons entendues demander une transition de 3 ans avec Joseph Kabila. Et non seulement cela, vous avez aussi dans la Société civile des gens qui sont proches de la MP, des personnes qui défendent les positions de la MP. Et donc la MP contrôle ce processus; c’est sûr et certain que les résolutions issues du dialogue seront en faveur de la MP.
A mon avis, ce dialogue a pour objectif de faciliter le glissement avec Joseph Kabila, d’aider Joseph Kabila à rester au pouvoir delà de son mandat contrairement aux dispositions constitutionnelles qui limitent la durée de son mandat à 5 ans (renouvelable une seule fois). Nous voyons donc qu’il y a cette démarche à faire accepter le glissement et vous verrez que les personnes au dialogue ne parlent pas du départ de Joseph Kabila le 20 décembre 2016. Leur discours c’est plus sur le calendrier électoral, ils parlent des élections, ils disent non au 3ème mandat mais ne parlent pas du 2ème mandat et encore moins de la prolongation de ce 2ème mandat au-delà du 20 décembre 2016. A mon avis, c’est un dialogue biaisé, un dialogue conçu par la MP et qui va servir aux intérêts de la MP.
« Des Concertations nationales, ancêtre du Dialogue politique national d’aujourd’hui »…
Les Concertations nationales ont été un échec total à tous les niveaux : des objectifs assignés, on pense premièrement à la cohésion nationale, aujourd’hui il n y a pas de cohésion nationale. On parle de la consolidation de l’autorité de l’Etat, c’est encore un échec à ce niveau. Il faut savoir qu’il y avait plus des 600 résolutions issues des Concertations nationales, à peine 10% ont été mises en œuvre. C’est clair que Joseph Kabila ne respecte pas ses engagements, on a dépensé beaucoup d’argent avec le per diem (frais alloués et payés aux participants) et autres choses pour qu’aujourd’hui en y regardant les fruits que ça été une perte de temps et l’échec total.
Du Dialogue politique de 2016, il n’est pas sincère si ce n’est pour aider Joseph Kabila à rester au-delà du 20 décembre 2016 avec la fin de son mandat. Il n y a rien de sérieux en cela parce que les personnes que nous voyons au Dialogue ne sont pas des personnes capables de défendre la cause de l’opposition et du peuple congolais qui exigent que la Constitution soit respectée et que Joseph Kabila parte à la fin de son mandat. Au Dialogue on nous parle du processus (électoral), des élections mais on ne parle pas de Joseph Kabila et de son départ. En principe, ils ont accepté cette idée de glissement et ils doivent communiquer et être clairs à ce sujet.
« Du Rassemblement de l’opposition issu du Conclave de Genval (8 et 9 juin 2016) en Belgique autour de l’UDPS et d’Étienne Tshisekedi »…
Le Rassemblement de l’opposition a choisi et refuser de ne pas participer à ce Dialogue dans les conditions actuelles (celles proposées par la MP). Le Rassemblement a à ses préalables comme la libération de prisonniers politiques et autres mesures de confiance. Le Rassemblement ne veut pas de n’importe quel Dialogue et à n’importe quel prix; mais un Dialogue qui respecte la Résolution 2277 (du Conseil de Sécurité de l’ONU). La chose que le pouvoir jusqu’aujourd’hui n’a pas respectée, ce qui prouve à suffisance que Le Rassemblement avait raison de ne pas y participer parce que Joseph Kabila jusqu’aujourd’hui ne fait pas preuve de bonne foi. La MP continue malheureusement dans sa démarche qui vise simplement à garder Joseph Kabila au pouvoir le plus longtemps possible. Les fils et filles du pays se trouvent dans la position du Rassemblement qui demande à ce que Joseph Kabila parte le 20 décembre 2016. Et ce que nous voulons est qu’ayant bloqué le processus électoral, il ne peut pas être récompensé avec une transition en lui permettant de rester au pouvoir au-delà de son mandat.
« De la Majorité Présidentielle : elle n’a rien en commun en dehors de Kabila comme dénominateur en commun…mais aussi de leur bilan »…
La MP ne peut pas exister sans Joseph Kabila. Si aujourd’hui on parle de la MP dans sa forme actuelle, c’est parce qu’il y a Joseph Kabila. Elle est consciente qu’elle n’a pas un candidat de taille. Vous voyez dans l’opposition nous avons Etienne Tshisekedi Wa Mulumba. Mais aussi Moïse Katumbi Chapwe, un candidat de taille mais qui fait tellement peur à la MP. La MP se trouve dans une situation où la seule personne sur qui elle peut compter c’est Joseph Kabila. Si vous enlevez Kabila de la majorité, elle n’existera plus parce qu’ils n’ont rien en commun, ils sont là pour leurs intérêts et Kabila c’est leur dénominateur commun. C’est ce qui explique leur peur mais aussi leur bilan. Ils n’ont pas un bilan qu’ils peuvent présenter au peuple comme tel pour être réélu. On nous a parlé de la Révolution de la Modernité (slogan sur le plan de développement initié par Kabila pour se faire réélire en 2ème mandat lors de la campagne de 2011). Aujourd’hui quand on regarde, ils n’ont pas fait grand-chose avec cette soi-disant Révolution de la Modernité.
« L’opposition pro-dialogue »…
La partie (minoritaire) de l’opposition avec Vital Kamerhe qui ont choisi de participer dans ce Dialogue, ce sont des personnes qui travaillent pour la MP, c’est déjà mal parti. A mon avis, ça sera comme lors des Concertations nationales. N’ayant pas été respectée, le peuple rejettera toutes les résolutions du Dialogue qui vont à l’encontre de la Constitution notamment dans ses dispositions sur la durée et le nombre des mandats. Il convient ici de rappeler que la Constitution dit que la durée de mandat du président de la République est de 5 ans (renouvelable une seule fois), pas 6, pas 7, pas 8; donc tout est déjà réglé par la Constitution.
« La position de l’Église catholique romaine et des autres églises du Congo dans ce dialogue »…
Évidemment que Rome (la capitale mondiale de l’Église catholique) est préoccupée…nous avons vu Le Nonce apostolique parlait et s’inquiétait du manque d’inclusivité. Vous savez lorsqu’on veut un vrai dialogue, il faut des personnes qui représentent et qui ont un certain poids politique pour que dans la mesure où elles se mettent d’accord, ce qu’elles vont décider soit appliqué correctement. L’absence de Moïse Katumbi tout comme celle d’Étienne Tshisekedi Wa Mulumba (dans ce dialogue) affectera la qualité des résolutions et leur portée parce que ces deux personnes ont beaucoup des gens derrière eux.
Lorsqu’on parle des églises de réveil, de l’église protestante; il faut savoir que ces sont des églises malheureusement qui sont pro-pouvoir, qui sont pro-Kabila et donc des églises qui ont toujours défendu la position de la MP. L’Église catholique a souvent été neutre, elle a souvent défendu la position du peuple congolais contrairement à ce que nous voyons avec les autres églises protestante, l’église kimbanguiste et même les églises de réveil. C’est un peu ça et c’est ce qui est triste en RDC.
Propos recueillis par Roger DIKU