Dar Es Salam, Tanzanie. C’est au cours de son voyage de travail en Tanzanie que Joseph Kabila pourtant avare en parole a fait publiquement pour la deuxième fois cette année évocation sur les futures élections dans le pays dont principalement la présidentielle qui le concerne en premier. Répondant à une question de journaliste en langue swahili le 4 octobre 2016 et sans toutefois faire allusion sur la question cruciale du report du scrutin déclarait : «Les élections pourront se tenir cette année ou un autre jour. Tout dépendra des travaux du dialogue qui se poursuivent à Kinshasa». Propos immédiatement relayés dans une dépêche par l’agence britannique Reuters et repris en boucle par les confrères internationaux et bon nombre des congolais sur les réseaux sociaux.
Ce «comming out lapsus» devant les médias à partir de l’étranger n’en est pas la première. Il y exactement 2 mois, le 4 août 2016 lors de son déplacement en Ouganda, dans le district de Kasese pour une rencontre avec son homologue Yoweri Kaguta Museveni, Joseph Kabila (toujours en swahili) déclarait que «le calendrier électoral ne serait publié qu’après la fin des opérations d’enrôlement des électeurs» en cours (RDC : Joseph Kabila écartelé entre dialogue, élections et renouvellement de la classe politique https://www.afriwave.com/?p=592 ). Trois jours plus tard, à Beni le 7 août devant des jeunes, il en appelait au «renouvellement de la classe politique qui est une nécessité en RDC» sans faire allusion à sa propre présence à la tête du pays depuis 15 ans. Si ces deux déclarations avaient été applaudies dans le camp de la Majorité Présidentielle (MP), elles avaient par contre étaient vertement critiquées au sein de l’opposition qui trouvait cela comme une instrumentalisation de la Ceni par le président de la République.
Stupeur et perceptible malaise à Kinshasa où venait de s’achever le 2ème Conclave de l’opposition réunie au sein du Rassemblement autour d’Étienne Tshisekedi. L’opposition qui, en effet, a réitéré ses accusations contre Joseph Kabila qu’elle dit vouloir repousser l’organisation de la présidentielle pour se maintenir au pouvoir au-delà de son deuxième et dernier mandat qui s’achève le 19 décembre 2016. Démenti formel et corrections des propos du président par Lambert Mende, Ministre de la Communication et des Médias, porte-parole du gouvernement : «le chef de l’État n’a pas annoncé le report des élections et n’a pas les prérogatives de convoquer les scrutins. Le président Kabila a simplement déclaré qu’il voulait que les élections à venir en RDC soient crédibles, qu’elles se tiennent avant décembre ou après, lorsqu’elles seront convoquées par l’organe habilité (la Ceni)».
Ce ne pas un secret de polichinelle que les élections prévues cette année 2016 n’auront pas lieu à la date convenu par manœuvre du gouvernement en place. Ni le dialogue politique en cours à Kinshasa, ni les multiples pressions de l’opposition intérieure, encore moins celles de la communauté internationale ne semblent avoir des effets sur le parti présidentielle le PPRD et sa majorité. Ils sont en outre confortés par l’arrêt de la Cour Constitutionnelle en «Recours en interprétation de l’article 70 de la Constitution du 18 février 2006 telle modifiée par la Loi n° 11/ 002 du 20 janvier 2011 en relation avec les articles 75, 76, 103,105 et 197 de la même Constitution» qui est passé par-là (https://www.afriwave.com/2016/07/13/la-copie-de-larret-de-la-cour-constitutionnelle-recours-en-interpretation-de-larticle-70-de-la-constitution-du-18-fevrier-2006-telle-modifiee-par-la-loi-n-11-002-du-20-janvi/). La Ceni, organe chargé de la convocation et l’organisation des élections prévoyant la tenue des scrutins en fin 2018.
Nos confères écrivent. La crise politique en RD Congo draine des passions même à l’étranger. Surtout au Burkina Faso où des journaux de ce pays ne manquent jamais d’en faire des titres à La Une avec des larges commentaires. En effet, le journal Le Pays écrit « la pression s’intensifie aussi de l’extérieur. Pour preuve, cette nouvelle sortie du patron du Quai d’Orsay, Jean-Marc Ayrault, qui se veut des plus fermes à l’égard de Kabila. « Il faut absolument que la Constitution soit respectée », estime-t-il. Le responsable de la diplomatie française exige qu’une date soit fixée pour les élections et qu’un dialogue national inclusif soit vraiment engagé. Et il n’exclut pas l’éventualité de sanctions. Quand on ajoute à cela, les menaces d’enquêtes internationales proférées par l’ONU, on peut se risquer à avancer, conclut Le Pays, que la traque de Kabila se généralise et il doit bien se rendre compte qu’il est de plus en plus isolé dans son aventure».
Le quotidien Aujourd’hui, évoquant la situation tendue commente : «un tsunami politique est presque certain. La preuve, à l’analyse des propos de Kabila hier et ceux de l’opposant Tshisekedi, on sent que les deux camps se toisent, se jaugent pour un ultime combat, dont nul ne sait quelle forme, elle prendra ni, ni qui en sortira vainqueur du moins sans laisser trop de plumes. […] La RD Congo est en situation de pré-affrontements, et le fait qu’un pays comme les États-Unis intime l’ordre à ses ressortissants de quitter le Congo laisse à penser que sur l’indice des pays africains à risque crisogène, la RDC figure en bonne place». Le même journal s’interroge si : «peut-il y avoir un miracle d’ici le 19 décembre 2016 ? Que peut faire la communauté internationale ? Peut-on éviter le scénario du pire ? Aucun Congologue ne se risquerait à des conjectures».