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Prononcé du verdict dans l’affaire subornation de témoins Jean-Pierre Bemba contre le Procureur devant la CPI du 19 octobre 2016

Par Roger DIKU

La Haye, Pays-Bas le 19 octobre 2016. La Chambre de 1ère instance VII composée du juge Bertram Schmitt, juge président, du juge Marc Perrin de Brichambaut et du juge Raul Cano Pangalangan a rendu son verdict dans l’affaire subornation des témoins Le Procureur contre Jean-Pierre Bemba Gombo, Aimé Kilolo Musamba, Jean-Jacques Mangenda Kabongo, Fidèle Babala Wandu et Narcisse Arido devant la Cour pénale internationale (CPI).

C’est en présence de Mme Fatou Bensaouda, procureure générale et des 5 co-accusés ordonnés à être physiquement présents à cette audience que la sentence est tombée sous le coup de 15h20’ : les 5 accusés sont déclarés coupables d’atteintes à l’administration de la justice au titre de l’article 70 du Traité de Rome instituant la CPI, son alinéa 25 A3 concernant partie sur la subordination des 14 témoins de la défense. En première partie, il est reproché aux 5 co-accusés d’avoir entretenu des contacts permanents avec les 14 témoins et la production des faux éléments devant la Cour et encourager des faux témoignages devant bénéficiés à Jean-Pierre Bemba. Mais également la corruption des certains des témoins de la défense en argent liquide (une somme allant de 600 à 800 Euros soit 1300 Dollars étant citée), en biens matérielles comme la distribution des téléphones portables et des promesses d’installation en Europe.

Sur la deuxième partie de cette question, seuls Jean-Pierre Bemba et Aimé Kilolo sont condamnés : il est reproché aux deux personnes selon la Cour une conduite criminelle et un abus de leur position pour induire gravement en erreur la justice et ainsi empêcher la manifestation de la vérité. Quant aux acquittements en deuxième partie, ils concernent les trois autres co-accusés : le député MLC Fidele Babala Wandu,  Jean-Jacques Mangenda Kabongo et Narcisse Arido tous proches de Bemba.

Le Procureur et la Défense peuvent faire appel du jugement dans un délai de 30 jours. Conformément au Statut de Rome, les juges peuvent, pour les infractions de ce type, prononcer une peine d’emprisonnement ne pouvant excéder cinq années et/ou une amende. La Chambre prononcera les pénalités dans cette affaire ultérieurement.

Un débat inattendu au rendez-vous…

Un autre débat inattendu s’est invité lors de cette audience : celui concernant la révocation du statut de liberté provisoire accordée aux 4 co-accusés mais dont la réincarcération a été demandée sur place par l’accusation au motif d’un risque de non présentation lors de l’audience de prononcé de peine. Tôlé des Avocats de la défense qui dénoncent ce jeu de cache-cache de la part du procureur qui ne les a pas informé d’avance de cette possibilité de demande de réincarcération et qui n’a pas non plus présenté des preuves à cet effet. Ainsi, la défense sollicite-t-elle du président le rejet de cette demande qui risque d’être un déni de la justice vis-à-vis de chacun des accusés qui comparaissent pourtant libres à leur procès en attendant l’audience de la fixation et le prononcé de leur peine. Les accusés n’étant pas incarcérés lors de prononcé du verdict, ils ne seront donc pas réincarcérés en a décidé la chambre qui rejette la demande de l’accusation et de rendre une ordonnance en cela.

Rappelons que ces personnes avaient déjà passées près d’un an en prison, soit 11 mois d’incarcération dans les quartiers pénitentiaires de la CPI. Les Avocats de la défense ont fait remarqué pourtant que le procureur qui a eu tout le tout le temps d’affuter ses armes mais qui ne connait pas encore cette peine et comme ils n’ont pas encore plaidé cela, il serait incohérent de la part de La Cour d’agir ainsi sur le plan de la justice. Surtout que la peine finale étant à la discrétion des juges et peut-être une amende ou une incarcération moins le temps déjà passé en détention.

Les Avocats de la défense ont également soulevés le fait que le jugement du jour n’a pas été remis aux accusés dans leur langue à savoir le français afin que ces personnes comprennent bien le motif ayant conduit à leur condamnation. Le message est ainsi dangereux pour la justice internationale en les renvoyant en détention, ce qui constitue un préjugé de la peine. Les Avocats de la défense sollicitant ainsi la révocation de l’accusation de réincarcérer les 4 co-accusés.

Dans cette affaire, Jean-Pierre Bemba Gombo, Aimé Kilolo Musamba, Jean-Jacques Mangenda Kabongo, Fidèle Babala Wandu et Narcisse Arido sont accusés d’atteinte à l’administration de la justice dans le cadre de l’affaire Le Procureur contre Jean-Pierre Bemba Gombo (Centrafrique) consistant en la subornation de témoins devant la CPI et en la production d’éléments de preuve faux ou falsifiés en connaissance de cause. Ce procès dans le  procès s’était ouvert le 29 septembre 2015 devant la Chambre de première instance VII. Le 29 avril 2016, la Chambre clôturait la présentation des éléments de preuves dans cette affaire et les conclusions orales du procès ont eu lieu les 31 mai et 1er juin 2016. Aimé Kilolo Musamba, Jean-Jacques Mangenda Kabongo, Fidèle Babala Wandu et Narcisse Arido comparaissent volontairement devant la Cour puisque qu’ils ont été mis en liberté provisoire le 21 octobre 2014. Jean-Pierre Bemba Gombo est quant à lui toujours en détention au quartier pénitentiaire de la CPI en lien avec l’autre affaire principale à son encontre.

La CPI en visite à Kinshasa

Ce verdict dans l’affaire connexe le procureur contre Jean-Pierre Bemba intervient alors qu’une délégation du bureau du procureur de la CPI se trouve à Kinshasa depuis le dimanche 16 octobre 2016. Une mission ayant pour but de donner un avertissement aux responsables étatiques  et aux différents acteurs contre la violence répétée notamment sur les manifestations de l’opposition les 19 et 20 septembre dernier et du bon déroulement des procédures judiciaires enclenchées par la CPI à cet effet.

C’est ce qu’affirmait Amady Ba, Chef de la Section de la Coopération internationale au sein du bureau du procureur de la CPI à la sortie de son audience le 18 octobre 2016 chez le PGR congolais Felix Kabange Numbi : : «Nous sommes ici dans le cadre de la continuation de la déclaration de madame Fatou Bensouda, procureure de la CPI, à la suite des événements qui se sont déroulés à Kinshasa le 19 et le 20, où des personnes ont été tuées, torturées, des pillages. On ne peut pas aussi, compte tenu de la gravité de ces crimes, les tolérer quel que soit le contexte. C’est pourquoi madame la procureure voulait avertir les différents acteurs, les autorités politiques et administratives qui exercent le pouvoir quel que soit leur niveau de responsabilité, les responsables du maintien de l’ordre comme les partis quelles que soient leurs affiliations, pour dire que la responsabilité elle est individuelle. Celui qui commet de tels crimes répond individuellement. Madame la procureure n’hésitera pas, si pareille répétition de tels crimes se commet dans ce pays, d’engager des poursuites, en tenant compte bien sûr du principe de complémentarité».

C’est à 17h38’ que l’audience a été levée, encore une affaire à suivre.

Roger DIKU

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