Avis de tempête et gros nuages sombres au-dessus de la justice internationale qui a des soucis à se faire avec les décisions annoncées et confirmées de l’Afrique du Sud et du Burundi de quitter le Traité de Rome instituant la CPI. Ni les appels de pieds de la CPI à L’Afrique du Sud et au Burundi à «reconsidérer leurs positions» ni les regrets exprimés de l’Union Européenne n’y auront rien fait, même si cette décision ne deviendra effective que dans un an comme le stipule le Traité. Les deux pays frondeurs reprochent à la justice internationale chacun pour sa part des interférences entre les attributions de la CPI et leur souveraineté nationale. Ce que l’on craindrait maintenant serait une «cascade de retraits d’Etats africains du statut de Rome», surtout que plusieurs appels en ce sens viennent du continent noir. Et ainsi fragiliser la seule et unique juridiction pénale internationale permanente chargée de juger (…) le génocide, les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et les crimes d’agression estime encore M. Sidiki Kaba.
Jusqu’à présent, ils étaient 34 pays africains à avoir signé et ratifié le Traité de Rome : Afrique du Sud, Bénin, Botswana, Burkina Faso, Burundi, Cap-Vert, République du Congo, République Démocratique du Congo, Comores, Côte d’Ivoire, Djibouti, Gabon, Gambie, Ghana, Guinée, Kenya, Lesotho, Liberia, Madagascar, Malawi, Mali, Maurice, Namibie, Niger, Nigeria, Ouganda, République Centrafricaine, Sénégal, Seychelles, Sierra Leone, Tanzanie, Tchad, Tunisie, Zambie. Au 4 mars 2016, 124 États sur les 193 États membres de l’ONU ont ratifié le Statut de Rome et acceptent l’autorité de la CPI. Cependant, trente-deux États supplémentaires, dont la Russie et les États-Unis, qui ont signé le Statut de Rome ne l’ont pas ratifié. D’autres grands pays comme la Chine et l’Inde, continuent d’émettre des critiques au sujet de la Cour et n’ont jamais signé le Statut.
Pour le président de l’Assemblée des Etats parties au traité fondateur de la CPI, le sénégalais Sidiki Kaba, par ailleurs actuel ministre de la Justice de son pays; «il est temps pour trouver un consensus avec les Etats africains critiques et qu’il faut saisir cette opportunité pour engager un dialogue avec ces Etats qui voudraient quitter la CPI en écoutant leurs appréhensions, leurs récriminations et leurs critiques». Exhortant ces pays à «donner une chance au dialogue et à la négociation», M. Sidiki estime que la prochaine Assemblée Générale des Etats parties, du 16 au 25 novembre à La Haye, serait une occasion de «trouver un consensus dynamique».
Le ministre sénégalais n’a pas manqué de rappeler que 9 des 10 enquêtes ouvertes par la CPI les sont dans des pays africains en tant que juridiction d’ultime recours et sur demande de ces pays. En outre, il exhorte les pays africains à un renforcement de leurs systèmes judiciaires nationaux pour juger les crimes relevant de leur compétence afin de juger les africains sur leur continent.
Rappelons que Le Statut de Rome est le traité international qui a créé la Cour pénale internationale. Il fut adopté lors de la Conférence Diplomatique des Plénipotentiaires des Nations Unies, dite Conférence de Rome, qui s’est déroulée du 15 juin au 17 juillet 1998 en Italie. Il est entré en vigueur le 1er juillet 2002 après sa ratification par 60 des États signataires, officialisant ainsi la création de la Cour Pénale Internationale. Comme dans toute application de la justice, la de la CPI n’est pas rétroactive, elle traite que les crimes commis à compter de la date de sa création.
Même la Gambie se retire, un véritable camouflet pour Mme Fatou Bensouda
La Gambie de l’autoritaire président Yahya Jammeh annonce également sa sortie de la CPI. Pays pas modèle en matière de respect des Droits de l’Homme, c’est le ministre de l’Information Sheriff Bojang qui a annoncé mardi 26 octobre 2016 au soir que son pays allait se retirer de la Cour pénale internationale (CPI). Les autorités gambiennes qui accusent la CPI de «persécution envers les Africains, en particulier leurs dirigeants» dénoncent également « une Cour Blanche dont l’objectif serait de persécuter et d’humilier les personnes de couleur, et particulièrement les Africains». Une critique récurrente ces derniers temps sur le continent. Enfin au ministre de l’Information d’ajouter que cette décision de se retirer a été prise alors que Banjul a tenté en vain d’amener la CPI à poursuivre les pays européens pour la mort de nombreux migrants africains en Méditerranée. Cette décision de la Gambie est également un véritable camouflet pour la procureure de la CPI. Fatou Bensouda, qui est une ressortissante gambienne, a même été ministre de la Justice du président Yahya Jammeh plusieurs années.