Un contexte particulièrement difficile pour une mission quasi impossible. Le bout du tunnel serait-il en vue pour la formation du premier gouvernement d’union nationale par Samy Badibanga ? Et de quel type serait cet exécutif dont la principale mission concerne l’organisation des futures élections pour 2018, mais aussi la prise en compte du social de la population et la cohésion nationale ? A ce questionnement, tous les observateurs avertis notent que le contexte demeure très difficile, ce qui risque de rendre encore la mission plus qu’impossible pour le transfuge de l’opposition en vue d’atteindre les objectifs fixés.
Selon des indiscrétions bien renseignées, deux semaines depuis la nomination du nouveau premier ministre dans le cadre de l’Accord politique du 18 octobre 2016 issu du dialogue de la Cité de l’Union Africaine (UA), l’atterrissage serait pour les jours à venir malgré la conjoncture. Pour ces sources, les consultations et tractations avec diverses parties concernées sont presqu’à leur fin; reste à finaliser la mouture gouvernementale pour approbation par le chef de l’Etat Joseph Kabila en personne. Des membres de l’opposition politique minoritaire pro-dialogue à la Majorité présidentielle en passant par la Société civile pro-dialogue; tous sont passés au QG du premier ministre nommé. Y compris certains opposants qui n’ont pas été au dialogue mais dont la réponse est demeurée fraiche selon les proches de Samy Badibanga.
Des sources concordantes, on affirmerait que le futur gouvernement qui sera connu bientôt devrait être composé d’une soixantaine des membres parmi lesquels 4 vice-premiers ministres et 5 ministres d’Etat. Même à l’époque du MPR parti-Etat sous le Maréchal Mobutu et si cette information se confirme dans la réalité, ça sera une première pour une pléthore en matière de composition gouvernementale. Guidé certes par le souci de satisfaire tous ceux qui ont donné vie à la tenue du dialogue voulu par le président Kabila, ça sera dans la démesure pour Samy Badibanga. Car il sied de constater que même pour le gouvernement Matata 2 d’après les Concertations nationales, il n’en avait pas été question d’un tel gouvernement mastodonte alors même que le permettait le cadre macro-économique plus favorable sur l’échiquier international.
Une mission à une équation difficile
Samy Badibanga est sur une pente dangereuse dans une mission à l’équation plus que difficile comme l’observent tous les connaisseurs du microcosme politique congolais. Vital Kamerhe, Co-modérateur au dialogue et grand favori au départ qui se serait bien vu au poste du premier ministre (à la place du discret et retiré Badibanga) a fait savoir sa non-participation. Pourtant, il pouvait en être l’un des poids lourds dans ce gouvernement. Certes son parti l’UNC y sera sûrement mais sous certaines conditions. Notamment celles concernant la répartition des postes au prorata du poids de chaque composante politique ayant pris au dialogue mais aussi une attention particulière à accorder aux questions sécuritaires de l’Est du pays d’où est originaire Kamerhe.
Samy Badibanga devra-t-il aussi jouer à l’équilibriste entre la Majorité et l’opposition pour satisfaire tout le monde dans la répartition des ministères dont ceux clés comme l’Intérieur, les Finances, les Affaires Etrangères, la Justice, la Défense, le Budget etc. Mais surtout l’Intérieur qui gère la police ainsi que la Justice qui permettront au régime son maintien et sa pérennisation. A ceci, faudra-t-il ajouter les contraintes imposées à Joseph Kabila sous des fortes pressions intérieures et extérieures toujours grandissantes. Les Etats-Unis comme l’Union européenne n’exigent-ils pas à ce que l’Accord politique du 18 octobre soit le plus inclusif possible en y faisant entrer dans le processus le Rassemblement de l’opposition (Rassop) sous la conduite d’Étienne Tshisekedi, qui a boycotté le dialogue et en a rejeté ses conclusions.
A ce propos, des sources proches de la Majorité présidentielle espèrent toujours un ralliement, même en dernière minute des membres du Rassemblement de l’opposition (Rassop)au dit Accord politique. Pour le Rassop par contre, il n’en sera pas question aussi longtemps la démarche engagée par la CENCO pour ouvrir la voie au vrai dialogue entre les fils et les filles de ce pays n’a pas aboutie. Et ce, pour éviter le pire avant cette le 19 décembre en trouvant une voie médiane entre l’Accord du 18 octobre (que le Rassop ne reconnait pas) et sa propre Feuille de route remise à l’Église catholique.
Un handicap de taille et une légitimité contestée
Contrairement à ses prédécesseurs Gizenga, Muzito et Matata; pourtant un handicap de taille au départ bien avant même son entrée en fonction pour le premier ministre nommé. Badibanga reste contesté dans sa légitimité par son ancien parti politique, l’UDPS qui juge sa nomination in suspecto-tempore, ce qui fait qu’il se trouverait déjà sur une pente dangereuse dans l’accomplissement de la mission lui confiait.
Ensuite il y a le temps imparti à son gouvernement pour l’organisation des élections, 16 mois d’ici avril 2018; mais surtout la conjoncture économique mondiale qui ne lui ait pas du tout favorable comme ce fut le cas de son prédécesseur Augustin Matata quatre ans auparavant avec la baisse des prix des matières premières qui constituent la principale source des rentrées budgétaires pour le pays. Enfin sa marge de manœuvre politique vis-à-vis du parlement et du président de la République qui l’a nommé qui parait inexistante.
A cet effet, un autre ancien premier ministre; Adolphe Muzito fait remarqué que le premier ministre nommé dans l’état actuel des choses est en réalité un indépendant qui va exécuter essentiellement le programme voulu à la seule discrétion du président de la République. L’inverse étant anticonstitutionnel car le Premier ministre tel que désigné, en dehors de toute coalition et de tout parti politique, est un indépendant comme l’est le Chef de l’Etat lui-même. Puisqu’indépendant des partis politiques, il se verra ainsi obligé de faire le programme du Chef de l’Etat qui est tenu non responsable devant le Parlement. Ainsi, le premier ministre échappera-t-il au contrôle de la Représentation nationale, devant laquelle, il devrait être politiquement responsable. La défense même de son programme devant le Parlement pour son investiture risquant ainsi de n’être qu’une simple formalité.