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Avec quel gouvernement la RDC peut-elle se sortir du bourbier dans lequel elle est enlisée ?

C’est une réflexion qui reste d’actualité que celle envoyé à notre Rédaction par Mr Isidore KWANDJA NGEMBO, politicologue congolais de son état de l’Université d’Ottawa au Canada. Le premier dialogue politique dirigé par Edem Kodjo a clos ses travaux le 18 octobre 2016 avec un Accord politique à la clé. Un deuxième dialogue politique dit de la Négociation directe entre la Majorité présidentielle et l’opposition sous la conduite de la Conférence Nationale Épiscopale du Congo (CENCO) a sorti un deuxième Accord dit Global et Inclusif le 31 décembre 2016.

Un premier ministre, Samy Badibanga avait été nommé le 19 décembre 2016 et son gouvernement d’Union Nationale mis sur pied. Aujourd’hui, on parle d’un nouveau gouvernement censé conduire le pays aux élections en fin d’année 2017 mais qui se fait toujours attendre. Et ce, faute d’accord consensuel entre la Majorité Présidentielle (MP) et le rassemblement de l’Opposition (Rassop). La signature de l’Arrangement Particulier (AP), texte additionnel et explicatif pour la mise en œuvre de l’Accord de la Saint Sylvestre étant un point de divergence entre les parties en présence.

Quel scenario possible alors de sortie de sortie de cette crise politique devenue institutionnelle ? C’est à quoi réfléchi Isidore Kwandja Ngembo :

TEXTE

En République démocratique du Congo (RDC), les élections présidentielles et législatives prévues initialement pour le 28 novembre 2016 n’auront finalement pas lieu. Le 20 décembre 2016, il n’y aura pas non plus une passation de pouvoir pacifique entre un président sortant et un président démocratiquement élu par le peuple congolais, dans le respect de la Constitution. Tout cela simplement parce que les responsables qui étaient censés financer, préparer, mener à bien le processus électoral et administrer l’élection à la date prévue, ont failli à leur obligation constitutionnelle.

En conséquence, la RDC se dirige certainement vers une profonde crise de légitimité qui pourrait aggraver la paralysie, de ce qui en reste, de l’État. Une situation qui risquerait d’enfoncer encore davantage le peuple congolais dans une grande incertitude, tant sur le plan sécuritaire que sur le plan socio-économique. La RDC, un pays, qui éprouve toutes les peines du monde à sécuriser son territoire et protéger sa population, et qui n’a jamais su utiliser à bon escient d’immenses ressources minières, énergétiques et forestières dont elle regorge, pour améliorer le vécu quotidien de son peuple.

À moins de deux mois de la date fatidique de fin du mandat du président de la république, tel que prévu par la Constitution, la RDC est plongée dans une sorte d’incertitude qui n’augure pas d’un lendemain meilleur. Il persiste un flou juridico-politique préjudiciable au bon fonctionnement des institutions de l’État. Un flou purement politico-stratégique, orchestré intentionnellement par le pouvoir actuel, pour éviter la tenue d’élections et ainsi s’éterniser au pouvoir.

Le dialogue national inclusif voulu par tous  -la communauté nationale et internationale-, comme seule voie pacifique de sortie de la crise politique congolaise, non seulement n’a pas été inclusif, s’est clôturé sans que les participants aient établi un calendrier électoral global et chronométré. Rien dans cet accord n’indique comment pourrait-on financer l’organisation effective des élections, tel qu’ils sont convenus.

En plus, l’opinion publique, tant au niveau national qu’international et même sa famille politique, attendaient que le président Kabila viendrait annoncer publiquement, lors du dialogue qu’il avait pourtant convoqué depuis le 28 novembre 2015, qu’il n’a pas l’intention de briguer un troisième mandat, pour rassurer et apaiser la tension politique qui prévaut en RDC à la veille de la fin de son dernier mandat constitutionnel. Celui-ci n’a pas daigné intervenir personnellement lors de ces assises, pour garantir aux participants que les résolutions issues de ce dialogue seront prises en considération et effectivement appliquées.

Plus alarmant encore, les participants au dialogue ont décidé que les membres du gouvernement de transition qui souhaiteront se porter candidats à une élection, présidentielle ou législative, ne pourront démissionner que trois mois avant la convocation du corps électoral. Une telle résolution est susceptible de semer les germes d’une instabilité permanente du gouvernement et créer une nouvelle crise sans précédent à la veille des élections. L’idéal aurait été de décider que les membres du gouvernement de transition ne peuvent se présenter aux élections présidentielles et législatives en cours, pour assurer la bonne exécution des mandats qui leur seront confiés.

Quoi qu’on dise, rien ne rassure que les élections présidentielles auront bel et bien lieu dans une ou deux années. La Commission nationale électorale indépendante (CENI) – l’organe chargé d’organiser et d’administrer les élections –, dans sa configuration actuelle, ne rassure personne, ni par son indépendance, ni par son objectivité. Sans dire exactement qu’elle est aux ordres du pouvoir, l’on peut néanmoins dire qu’elle est, toutes proportions gardées, noyautée par celui-ci. Le renouvellement des animateurs de cette institution d’appui à la démocratie, en tenant dûment compte de l’expertise et non de considérations politiques, serait souhaitable pour assurer la transparence et l’équité.

Devant toutes ces évidences et pour assurer la crédibilité du processus électoral à venir, la classe politique et la société civile congolaise n’ont pas droit à l’erreur et ne doivent ménager aucun effort susceptible de sortir le pays de l’impasse dans laquelle il se trouve actuellement. Il y a nécessité de maximiser le peu de temps qui reste, d’ici le 20 décembre 2016, pour trouver rapidement un compromis politique inclusif qui mènerait à l’organisation dans les meilleurs délais des élections apaisées, et ce, en se mettant d’accord sur les animateurs de la transition, neutres et impartiaux.

Gouvernement transitoire de technocrates

Un des scénarii possibles pour assurer le bon fonctionnement du processus électoral libre, transparent et accepté par tous, serait la formation d’un gouvernement de transition composé essentiellement des technocrates, y compris ceux de la diaspora, sans appartenance politique et sans ambition pour les échéances à venir, et dont la tâche principale sera de préparer sereinement et dans la transparence les élections prochaines.

En effet, dans la situation politique actuelle accentuée par la crise de confiance mutuelle dont souffre la classe politique congolaise, un gouvernement transitoire composé uniquement des technocrates serait une solution idéale compte tenu de la méfiance considérable qui existe entre la Majorité au pouvoir et l’Opposition politique.

Un tel gouvernement aurait un temps bien limité avec un mandat clairement établi, de proposer des pistes de solutions réalistes, tant sur le plan politique, socio-économique que sécuritaire, pour régler les problèmes actuels et futurs au bénéfice de l’intérêt général. Il devra agir avec la rigueur et la rationalité sous-jacentes à une saine gestion, sans manifester de partisannerie politique.

In fine, il revient aux acteurs politiques et de la société civile congolaise de s’accorder sur ce qu’ils voudront pour leur pays et pour le bien de leurs populations, de décider en toute connaissance de cause, quels moyens faut-il mettre en œuvre pour surmonter la crise politique actuelle.

Isidore KWANDJA NGEMBO

Politologue

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