Comme il l’avait annoncé le mercredi 5 avril 2017 lors de son adresse devant les deux Chambres du Parlement réunies en Congrès qu’un nouveau premier ministre sera connu sous 48 heures, Joseph Kabila a tenu parole de sa décision au soir du 7 avril 2017 en nommant Bruno Tshibala Nzeghe Tshishimbi. Usant de son pouvoir discrétionnaire de choix, il a remplacé Samy Badibanga Ntita qui venait de lui rendre le tablier au courant de la même journée après trois mois de présence aphone à l’Hôtel du Gouvernement.
Les observateurs avertis du microcosme politique de Kinshasa notent que cette nième nomination ne sera à mesure de dénouer la profonde crise multiforme dans le pays. Surtout que comme de son prédécesseur Samy Badibanga, elle résulte d’un débauchage d’un ex-membre du plus résistant et grand parti politique de l’opposition du pays depuis plus des 30 ans, l’UDPS. Mais aussi et surtout encore du débauchage d’un membre d’une opposition politique clochardisée et manipulée à souhait par le pouvoir en place.
Bruno Tshibala, 61 ans et Porte-parole du « Rassemblement » lors de sa création à Genval en Belgique autour de la figure historique de l’opposition feu Étienne Tshisekedi jusqu’à encore pas très longtemps, il a contesté la légitimité du fils de Tshisekedi, Félix, à la tête du même Rassemblement après sa restructuration depuis la mort du père le 1er février dernier en Belgique et dont le corps n’est toujours pas rapatrié au pays pour des obsèques nationales. Et comme conséquence, il a été exclu fin février du Rassemblement et de l’UDPS, le parti de Tshisekedi, dont il était l’un des Secrétaires généraux adjoints.
Pour les opposants, l’appel de Kabila au Rassemblement d’harmoniser ses vues lors de son discours du 5 avril n’était que combine car il savait très bien ce qu’il devrait faire à l’issue de ses consultations informelles et sa rencontre avec le groupe Olenghankoy et sa proposition de la liste de 5 noms dont Tshibala tandis que l’autre camp n’ayant pas pris part à ce rendez-vous insistait pour ne proposer qu’un seul nom ; celui de Félix Tshisekedi. Le choix du potentiel candidat de l’opposition au poste de chef de gouvernement ayant dès lors envenimé le climat au sein de la coalition, la déchirant en deux factions : l’une dirigée par Félix Tshisekedi et Pierre Lumbi et l’autre par Joseph Olenghankoy.
Un membre du parti au pouvoir, le PPRD et travaillant à la présidence de la République au Palais de la Nation qui a requis l’anonymat explique à www.afriwave.com : comme Badibanga, Tshibala ne s’en sortira pas car je ne vois pas comment il réussira la mission qui lui sera confiée. Il n’en a ni les capacités, encore moins n’en aura les moyens financiers de sa politique alors que tous les indicateurs du pays sont dans le rouge. De plus, Tshibala ne possède aucun réseau ni national ni international pour s’y appuyer en ce moment où le pays en a besoin. Badibanga dont on avait dit tout le bien de ses réseaux l’a prouvé au bout de trois mois de dur apprentissage de l’exercice du pouvoir. Enfin, Tshibala qui n’est pas un élu et qui a été exclu de son parti n’aura aucune base politique sur laquelle se reposer. Les Olengha, Lumbala et autres autour de lui n’étant que des profiteurs en mal des moyens et de positionnement qu’ils espèrent tirer d’un passage aux affaires pour quelques temps encore.
Cette prise de position courageuse d’une personne au cœur du pouvoir contraste avec l’optimisme béat d’un autre membre du pré-carré présidentiel et de surcroit porte-parole en chef de la majorité Alain Atundu Liongo qui explique cette nomination au micro de RFI : Le président a la pouvoir discrétionnaire. N’est-ce pas de dire parmi tels et telles pour telle raison je prends celui-ci ? Et sans entrer dans les détails, je dis qu’en gros M. Tshibala répond au profil. Le président de la République a estimé que M. Tshibala était la personne la mieux indiquée pour l’accompagner dans le processus de normalisation de notre cycle électoral jusqu’aux élections et la personne la plus compatible pour consolider la cohésion nationale d’abord, et ensuite la cohésion de la classe politique autour du leadership du chef de l’Etat.
Ce qui a fait réagir le Rassemblement que la raison de consolidation de cohésion nationale sus évoquée n’est qu’un leurre tout en se disant non concerné par cette nomination qui n’apporte selon lui aucun signe de décrispation. Christophe Lutundula Apala, membre du G7 et l’un des négociateurs à la médiation de la CENCO explique : Cette nomination, si mérite il y a, elle en a deux. Le premier c’est de prouver que ce qu’on appelle dissidence du Rassemblement a été le produit de la majorité présidentielle qui le reconnait aujourd’hui. Le deuxième mérite c’est d’apporter la preuve la plus éclatante de ce que le président Kabila n’attend point exécuter l’accord du 31 décembre 2016. Dont acte.
Est-ce Tshibala l’homme de la situation ?
Non répondent d’emblée toutes les sources concordantes. Plusieurs similarités entre lui et Samy Badibanga : l’ancien comme le nouveau premier ministre sont tous originaires du Kasaï Oriental, province d’origine d’Etienne Tshisekedi. Ils se réclament de l’opposition en prétendant tous les deux être membres l’UDPS, parti politique dont ils ont été exclus après s’être mis en désaccord avec sa direction.
Les deux ont été nommés sur base des deux Accords politiques des 18 octobre et 31 décembre 2016 négociés par l’Union Africaine et le clergé catholique du pays, accords censés sortir le pays de la grave crise politique devenue institutionnelle provoquée par le maintien au pouvoir de Kabila dont le deuxième et dernier mandat constitutionnel à la tête du pays a expiré depuis le 19 décembre 2016.
Premiers moments d’euphories dans un grand Hôtel chic de Kinshasa pour le 1er ministre : champagne et selfie
Sans peut-être le vouloir ou faisant semblant, l’opposition congolaise demeure l’une des plus divisées et manipulées par le pouvoir en place depuis les époques. Les profondes dissensions apparues au sein du Rassemblement tout au long de la négociation directe sous la médiation de l’Eglise catholique au grand bonheur de la majorité tireuse des ficelles a fini par exposer la qualité de ces opposants : une opposition divisée et manipulée. A cela il faut ajouter les disputes entre le pouvoir et l’opposition sur le partage des postes au sein du nouvel exécutif, les modalités d’application de l’accord ont fini par compliquer et retarder plus que trop longtemps les choses, provoquant le courroux de l’Eglise, qui a dénoncé à plusieurs reprises la mauvaise foi d’une classe politique congolaise, toutes tendances confondues, leur reprochant de privilégier leurs intérêts particuliers et non l’intérêt général.
Aux termes de l’Accord dit de la Saint-Sylvestre, l’opposition s’est accommodée du maintien au pouvoir de Kabila en échange de la promesse d’une présidentielle avant la fin de l’année 2017. Après plus de trois mois de tergiversations, la tenue de cette élection dans le délai prévu apparaît dorénavant hautement incertaine. Le gagnant dans tout ça demeurant Joseph Kabila qui ne fait que gagner du temps
Autre point flou à l’actif de Tshibala, exclu du parti pour avoir rallié l’aile dissidente du Rassemblement avec Olenghankoy ; les rumeurs de ses supposés contacts avec le pouvoir. Détenu trois mois l’année dernière à la prison centrale de Makala à Kinshasa pour des raisons qualifiées de politiques, il avait été extrait de sa cellule une nuit pour s’entretenir avec le directeur du cabinet du chef de l’Etat Néhémie Wilanya, celui-là même qui signe au nom de Kabila toutes les ordonnances des nominations comme des révocations. Un entretien de deux heures dont le contenu n’a jamais été révélé jusqu’à ce jour mais qui reste connu de Tshibala lui-même.
Sa nomination reste donc du domaine du contestable sur la base que Bruno Tshibala ne fait plus partie ni de l’UDPS, ni encore du Rassemblement du tandem Félix Tshisekedi et Pierre Lumbi reconnu par la médiation de la CENCO dont on attend la réaction ; alors que l’Accord du 31 décembre stipule que le nouveau Premier ministre doit en être un membre. En lieu et place de permettre l’apaisement des tensions, on en est plus que loin même si Joseph Kabila aura finalement réussi à obtenir gain de cause avec sa liste de 5 noms dans laquelle il eut la latitude de choisir le candidat qui lui sied le plus. Et surtout, à partir de laquelle il aura finalement réussi à écarter le dernier des Tshisekedi. Mais pour combien de temps encore ce semblant de sérénité durera encore avant que tout ne s’embrase, c’est la question qui demeure.
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Kabila ne fait que reproduire les schémas utilisés par Mobutu après la proclamation du processus de démocratisation en 1990. Cela lui a permis de rester au pouvoir pendant 7 ans, de 1990 à 1997, sans organiser les élections et, surtout, sans collaborer avec la vraie opposition, pour sortir le pays de la crise. Tshibala n'est qu'un pion de plus, une distraction, pour gagner le temps. C'est le résultat des conseils des tous les mobutistes qui font le lit du pouvoir de kabila.
Nous sommes en avril et personne, dans le camp du pouvoir, n'associe la nomination de Tshibala à la tenue des élections avant la fin de l'année.
Dans 3 mois, kabila nommera un autre PM ddébauché d'une opposition qui n'existe pas pour faire traîner les choses sans tenir les élections.