Inédit et spectaculaire. Au lendemain de l’évasion spectaculaire des prisonniers du plus grand centre pénitencier du pays, en l’occurrence le CPRK dit la Prison de Makala ; des questions troubles persistent sur ce qui s’est réellement passé la nuit du 16 au 17 mai. Qui sont les commanditaires de cette action plus que téméraire de la part de ses auteurs et quel est le bilan exact en termes des fugitifs, des dommages matériels mais aussi des victimes. Cette situation sans précédent car des tentatives de fuite dans cette prison centrale de Kinshasa à double mur d’enceinte n’avaient jamais réussi jusqu’à ce jour.
Même si le bilan officiel n’est toujours pas disponible, les traces visibles de cette action inédite sont là sur le lieu : destruction et incendie d’une partie des pavillons à l’intérieur de la prison, des traces de sang par terre, des uniformes de prisonniers sur le sol et des dizaines de véhicules y compris ceux de la police qui finissaient de se consumer à l’extérieur… Et pour couronner le tout, l’évasion massive des prisonniers parmi lesquels de nombreux prisonniers dangereux et auteurs des crimes crapuleux selon la police, y compris la fuite du gourou du mouvement politico-religieux Bundu Dia Kongo (BDK), le député Ne Mwanda Nsemi.
Vidéo
Jusque-là et officiellement, une cinquantaine de prisonniers avaient été signalés dans la nature dont le gourou du groupe BDK mais en réalité c’est bien plus que cela. Des sources non confirmées renseignent que près de 8.000 détenus étaient recensés en janvier 2016 dans cette prison insalubre et surpeuplée datant de l’époque coloniale dans les années 1958. La capacité maximale prévue à cette époque-là ne devant pas dépasser entre 1500 et 2000 personnes. Or depuis l’indépendance en 1960 jusqu’à ce jour, aucune politique carcérale du pays n’aura permis la construction des nouvelles prisons, les régimes successifs se contentant des infrastructures héritées de la colonisation belge.
Selon des sources proches de l’enquête, c’est près de 4 600 détenus qui seraient aujourd’hui dans la nature après cette attaque. Combien de fois officiels et humanitaires n’ont-ils pas fustigé la négligence des gouvernements successifs dans la prise en charge alimentaire et sanitaire des milliers de détenus qui croupissent au CPRK et dont un grand nombre se trouvent en détention provisoire ?
Pour le bourgmestre de la commune de Selembao où est situé le pénitencier, l’on ne saura dire exactement le nombre des prisonniers qui se sont échappés. Néanmoins, 179 évadés auront été déjà repris par les forces de sécurité. Sur le plan des dommages matériels, 33 véhicules dont ceux des particuliers garés aux alentours de la prison ont été incendiés ; le bureau administratif complètement détruit alors que deux officiers tués dont un capitaine et un major.
Un autre son de cloche. Interrogé par la radio onusienne Okapi, Mike Mukebayi, journaliste et ex-prisonnier d’opinion à Makala où il a passé près d’un an, a donné le bilan de l’évasion qui a eu lieu dans la nuit du mardi 16 à mercredi 17 mai 2017. Selon lui et d’après des chiffres crédibles obtenus par des canaux et contacts gardés avec les anciens co-prisonniers et ses anciens ; 4216 prisonniers se seraient enfuit sur un total de 8087 détenus, soit plus de la moitié de la prison. Il ajoute que 6 condamnés dans le dossier de l’assassinat de président Laurent-Désiré Kabila ont également pris le large bien que l’ancien aide de camp du Eddy Kapend et Leta sont restés en prison.
Le colonel Eddy Kapend
Un gouvernement aux abonnés absent
Depuis le début de cette affaire, les ministres de la Justice et son collègue des Communication et Médias se rependent dans les médias pour donner chacun son explication sans s’interroger sur les responsabilités dans ce dossier. Et comme d’habitude, le tout nouveau premier ministre est demeuré inaudible dans toutes les langues. Sous d’autres cieux, les ministres de l’Intérieur ayant la sécurité dans ses prérogatives et celui de la Justice auraient immédiatement démissionnés, questions d’assumer leurs responsabilités. C’est ici par ailleurs l’occasion pour le parlement d’interpeller le gouvernement sur ce sujet et voir d’exiger la démission de ces deux ministres.
Dans cette confusion entretenue pour ne pas assumer ses responsabilités, la PNC (Police Nationale Congolaise) s’y est prêté en lançant dans un communiqué officiel ; un appel public à la délation pour dénoncer les fugitifs. Pourtant, la relation entre cette police et la population n’a toujours jamais été la plus amicale qui existe. Or, c’est le moment pour des fins limiers du renseignement comme ceux de la police judiciaire de démontrer leurs capacités en la matière en vue de rattraper les prisonniers en cavale.
Communiqué officiel de la PNC
La police nationale congolaise porte à la connaissance de la population kinoise qu’aux environs de 4hrs30′ de ce mercredi 17 mai 2017, les adeptes et insurgés du mouvement politico religieux Bundu dia Mayala ont attaqué le centre pénitentiaire et de rééducation de Kinshasa, d’où ils ont organisé l’évasion de Mr Zacharie Badiengila dit Ne Muanda N’Semi, à sa suite plusieurs prisonniers dangereux et auteurs de crimes crapuleux se sont volatilisés dans la nature.
A cet effet, un appel à collaboration est lancé à l’endroit des valeureux kinois et kinoises pour dénoncer tous ces criminels et évadés qui se cacheraient dans les différents quartiers de la ville Province de Kinshasa et à signaler de leur présence aux forces de l’ordre et de sécurité.
La Police Nationale compte énormément sur la collaboration de la population pour éviter la recrudescence de la criminalité dans les prochains jours.
Fait à Kinshasa, le 17 mai 2017. Colonel Mwanamputu, Porte-Parole.
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