Panique à bord. Les choses s’accélèrent peut-être alors que la panique à bord du côté de Kinshasa se fait sentir. Le Procureur Général de la République (PGR), Flory Kabange Numbi a annoncé ce mardi 23 mai 2017 se saisir du dossier concernant le député national Clément Kanku pendant que la conférence de presse de ce dernier a été interdite.
Le PGR explique sa décision suite aux révélations faite le weekend dernier par le journal américain The New-York Times (NYT) sur le rôle supposé des liens étroits joué par Kanku dans l’incitation à la violence au Kasaï, où l’armée et la police congolaises affrontent des présumés miliciens Kamuina Nsapu depuis 9 mois déjà.
Sollicitant l’aide du parlement dans ce dossier, le PGR demande également la coopération du député concerné dans la recherche de la vérité s’il ne se reproche de rien et éviter actuellement tout déplacement en dehors du pays. Même si le PGR ne parle pas d’une demande de lever de l’immunité parlementaire de Kanku et d’une interdiction de voyager pour l’instant, ça y ressemble sans l’ombre d’aucune doute.
De son côté, la conférence de presse que devrait tenir Clément Kanku hier et reporté à aujourd’hui a finalement été interdite au motif qu’elle n’a pas été autorisée par la commune selon le responsable de la police. Les journalistes présents sur le lieu de la manifestation au Restaurant Villa Kamiah ont carrément été chassés par les agents de l’Agence Nationale du Renseignement (ANR) pendant que le service de protocole du restaurant expliquait que la conférence de presse a été annulée.
Pourquoi alors empêcher au député Kanku de s’exprimer et donner ainsi son point de vue dans cette scabreuse affaire ? Si cela s’avère, agissait-il seul ou était-ce au nom de l’Etat ? Quel était l’objet du lien entre un ministre de la République et des rebelles ? Va-t-on verser ces écoutes dans le dossier concernant l’assassinat des deux experts onusiens ? La situation au Kasaï a-t-elle été provoquée à dessein pour détourner l’attention des Congolais et de la communauté internationale, sur l’essentiel, méthode éprouvée dans les démocratures ? Autant des questions auxquelles il aurait dû répondre…
Que reproche-t-on à Kanku
Selon le journal américain, il existe des présomptions que le député et ancien ministre soit l’instigateur de ces exactions. Ce qui du reste aurait milité à sa nomination dans le gouvernement Samy Badibanga en décembre 2016, soit 4 mois après le début des troubles. Autres révélations du NYT sur Kanku, l’existence d’un enregistrement qui se trouvait dans l’ordinateur de Zaida Catalán, une juriste experte de l’ONU retrouvée morte le 27 mars 2017 après son rapt le 12 mars 2017 sur une route de Kananga avec son confrère Michael Sharp : « Mme Catalán a conservé 130 fichiers dans un dossier sur son ordinateur sous le nom de M. Kanku. Parmi eux, il y avait une conversation téléphonique enregistrée dans laquelle il [M. Kanku] semble discuter avec un homme qui venait de participer à une mise à feu dans Tshimbulu. Ils parlent des assassinats ciblés d’un colonel et d’autres fonctionnaires, et d’un chaos général ».
Et c’est à se demander si Zaida Catalán et son collègue, Michael Sharp, n’ont pas été victimes de cette scabreuse affaire sur laquelle ils enquêtaient probablement. Conscients de l’effet explosif qui résulterait de la divulgation de l’enregistrement, leurs assassins et les éventuels commanditaires ont essayé d’étouffer l’affaire en supprimant ceux qui étaient susceptibles de la rendre publique.
Même si le journal américain affirme ne pas savoir comment Mme Catalán a obtenu cet enregistrement téléphonique, il fait part que Zaida Catalán avait fait part à Kanku de la possession par elle de ce fichier audio : « En fait, elle avait dit à M. Kanku qu’elle l’avait (..) et devait discuter avec lui après son voyage dans la brousse [le voyage ayant conduit à son assassinant]. Clément Kanku qui avait initialement nié, puis confirmé qu’il avait été en contact avec les experts de l’ONU : « J’ai parlé avec l’homme ; la femme, je ne lui ai pas parlé » avant de changer de version plus tard : « Je pense que j’ai également parlé avec la femme, mais je ne suis pas certain parce que beaucoup de gens m’appellent ».
Membres du Groupe d’experts de l’Onu sur le Congo, Michael Sharp et Zaida Catalán enquêtaient sur les exactions commises dans cette région de suite du refus des autorités congolaises de reconnaître Jean-Pierre Mpandi comme le nouveau Kamuina Nsapu, nom dynastique du chef de l’importante tribu des Bajila-Kasanga. Depuis lors, l’Onu a découvert 40 fosses communes, dont la majorité contiendraient les victimes de la répression de l’armée et de la police, et les violences se sont répandues dans les quatre autres provinces du Grand Kasaï (Kasaï, Kasaï-Central, Kasaï-Oriental, Lomami, Sankuru) ; et jetant sur la route des déplacés jusque dans le Kwilu (ex-Bandundu) et au Lualaba (ex-Katanga).
RÉACTION DE CLÉMENT KANKU, CRÉDIT IMAGES JT TV5 MONDE AFRIQUE
Lire aussi : Exactions et meurtre de Zaida Catalán dans le Kasaï : un enregistrement sonore du député Clément Kanku qui intrigue https://www.afriwave.com/?p=3135
Quid d’Évariste Boshab ?
Dans ce drame du Kasaï, c’est l’ancien ministre de l’Intérieur Évariste Boshab qui porte une responsabilité dans la mesure où il avait refusé la reconnaissance du chef coutumier jugé trop opposant, lui préférant un homme proche du pouvoir ; politisant ainsi la question du pouvoir ancestral et coutumier. C’est Boshab qui avait encore refusé d’accepter que Kamuina Nsapu soit accompagné d’une escorte de casques bleus pour se rendre à un rendez-vous avec lui le jour de sa mort, soit le 12 août 2016.
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