A peine que le calendrier électoral de la discorde a-t-il été rendu publique par la CENI que son vice-président, Norbert Basengezi remet ses habits de militant et pose aux côtés de Joseph Kabila en compagnie des autres cadres du parti présidentiel dont le président du parlement Aubin Minaku. C’était au cours de la rencontre du mardi 7 novembre 2017 en périphérie de Kinshasa où Kabila recevait les ténors de son parti pour une réunion dite stratégique.
L’objectif étant de leur donner « ses instructions sur le renforcement des capacités dans le but de maximiser les chances de succès du parti aux prochaines élections ». Cette réunion avec les membres du Bureau politique du PPRD aurait été tout à fait normale sans la présence insolite du vice-président de la CENI qui dit-on, y était à titre individuel mais qui va à l’encontre des lois tout comme des règles.
Que dit la loi, quid de l’indépendance et la neutralité de la CENI ?
La La loi organique d’avril 2013 modifiant et complétant la loi n°10/013 du 28 juillet 2010 portant organisation et fonctionnement de la CENI est claire : « Aucun membre de la CENI ne peut, au cours de son mandat, être candidat à une election. Les membres de la CENI sont astreints à une obligation generale de reserve. Ils ne peuvent ni prendre part à des activités de campagne electoraleou referendaire, ni exprimer publiquement leur preference sur un candidat (Article19) ». Et d’ajouter : « Dans l’accomplissement de leur mission, les membres de la CENI ne sollicitent ni ne reçoivent d’instructions d’aucune autorité extérieure ; jouissent de la totale indépendance par rapport aux forces politiques qui les ont désignés (Article22) ».
Dans un twett, la CENI a tenté de se justifier alors que le porte-parole du gouvernement dit «ne pas connaitre une loi qui interdit à un membre de la CENI de prendre part à une réunion de son regroupement politique d’origine».
La présence de Norbert Basengezi à une réunion politique d’un parti politique soit-elle à titre personnel dérange vu ses responsabilités. Surtout que le parti en question et de surcroît présidentiel est au cœur d’une suspicion somme toute légitime pour ses intentions de vouloir confisquer le pouvoir. « Cette apparition dans une rencontre de son parti politique apporte un malaise de plus en ce qui concerne l’indépendance et la neutralité de l’organe chargé de l’organisation des élections dans le pays. Verriez-vous un jour Corneille Nangaa ou ce Mr Norbert Basengezi à un Bureau politique de l’opposition ? » note un membre de l’opposition.
Il faut rappeler que le vice-président de la CENI est un membre du PPRD et il ne s’en cache pas car ayant été député national élu de Walungu depuis 2011, ce qui avait conduit à sa désignation au sein de la CENI par son parti. Sa participation à la réunion de Kingakati dérange encore plus lorsqu’on se réfère à l’article 21 de ladite loi précitée et sur base de laquelle il a prêté serment en sa qualité de membre de la CENI : « Je prends l’engagement solennel de n’exercer aucune activité susceptible de nuire à l’indépendance, à la neutralité, à la transparence et à l’impartialité de la CENI, de garder le secret des délibérations et du vote, même après la cessation de mes fonctions, de ne briguer aucun mandat électif ».
Un proche parmi les proches depuis une dizaine d’année, Basengezi fut déjà 2ème vice-président de la Commission Électorale Indépendante (CEI) avec pour charge l’inscription des électeurs et des candidats (2003-2008) sous la présidence de feu l’abbé Apollinaire Malumalu. Cet ancien gouverneur de la province du Sud-Kivu de 1999 à 2002 ferait partie d’un dispositif stratégique pour contraindre Vital Kamerhe en rupture avec le régime dans sa non moins négligente province. Plus que virulent dans ses sorties médiatiques, il arrive de fois qu’il heurte les autres membres du bureau de la CENI sans que personne ne le rappelle à l’ordre. Ce qui fait dire à certaines personnes que le « véritable patron de la CENI c’est lui au nom du PPRD », Nangaa n’étant qu’un paravent.
Pour un opposant issu des rangs du Rassop, « lorsqu’on parle de l’inféodation de la CENI et ses animateurs à la Majorité présidentielle (MP) de Kabila, on nous traite de tous les noms. S’il y a des gens qui ont peur des élections, c’est dans le camp de la MP qu’ils se trouvent car ils perdront tous leurs privilèges et devront s’expliquer bientôt devant nos Cours et tribunaux. De Malumalu à Ngoyi Mulunda à Malumalu et Nangaa, tout le monde est conscient que la CEI puis la CENI n’ont jamais été ni indépendante, encore moins neutre dans l’accomplissement de leur mission. C’est du reste ce qui explique les contestations qui ont émaillé les élections de 2006 comme celles de 2011 et l’exception n’en sera pas faite de celles dont on veut à tout prix nous priver. Et cela, nous ne l’accepterons plus jamais ».