Deux hommes ont été écroués pour avoir recruté comme joueurs des réfugiés congolais qui, sur le terrain, ont osé « rudoyer » Pierre Nkurunziza.
Deux responsables administratifs burundais ont été écroués pour avoir « permis » que le président, Pierre Nkurunziza, soit malmené physiquement au cours d’un match de football, a-t-on appris, vendredi 2 mars, de source judiciaire et auprès de témoins.
L’administrateur de la commune de Kiremba, Cyriaque Nkezabahizi, et son adjoint chargé du sport, Michel Mutama, ont été écroués jeudi à la prison de Ngozi, à 130 km au nord de Bujumbura, pour des faits liés à un match qui a eu lieu le 3 février. Ce match opposait l’équipe de M. Nkurunziza, l’Alléluia FC, au club de Kiremba.
Pour l’occasion, les deux responsables auraient recruté des joueurs parmi les réfugiés congolais du camp de Musasa, à Kiremba, selon des témoignages recueillis au téléphone. « Ces Congolais ne connaissaient apparemment pas le président Nkurunziza, parce qu’ils l’ont fortement rudoyé. Ils l’ont attaqué à chaque fois qu’il avait la balle et l’ont fait tomber à plusieurs reprises, alors que les joueurs burundais prenaient soin de ne pas l’approcher de trop près », a indiqué l’un de ces témoins.
Les deux responsables, pourtant membres du parti présidentiel, le CNDD-FDD, ont été arrêtés jeudi par la police et le Service national de renseignement, qui dépend directement du président. « Les deux responsables administratifs ont été arrêtés et écroués pour “complot contre le chef de l’Etat”, sur mandat du procureur de la République près la cour d’appel à Ngozi », a annoncé par téléphone à l’AFP une source judiciaire qui a requis l’anonymat et confirmé que c’était en lien avec ce match.
Buts de « complaisance »
Nkurunziza, un chrétien « born again »évangélique, passe au moins la moitié de son temps à l’intérieur du pays, où il joue au football avec l’Alléluia FC ou chante et danse avec sa chorale « Komeza gusenga » (« Priez sans cesse » en kirundi, la langue nationale). Il participe aussi à des travaux de développement communautaire au cours desquels il n’hésite pas à donner de sa personne en transportant de grosses pierres ou en mélangeant le ciment au sable.
A 54 ans, l’ancien professeur de sport à l’Institut d’éducation physique et du sport de l’université du Burundi continue d’alterner quotidiennement le football, la natation ou encore le cyclisme. Il y a encore quelques années, il n’hésitait pas à dévaler les montagnes qui séparent Ngozi de Bujumbura, sur une route alors fermée à la circulation et réservée à son usage exclusif.
Nkurunziza, qui joue parfois deux à trois matches par semaine, a fait construire un stade de plus de 9 000 places dans son village natal de Buye, situé dans la province de Ngozi, et des dizaines d’autres à travers le pays. Il marque un ou deux buts « de complaisance » à chaque fois, selon ses détracteurs, qui notent qu’aucun joueur adverse n’ose d’ordinaire l’attaquer sérieusement.
Article à lire sur : Au Burundi, mieux vaut ne pas bousculer le président footballeur http://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/03/02/au-burundi-mieux-vaut-ne-pas-bousculer-le-president-footballeur_5264935_3212.html