Comme on le sait pour le triple scrutin de décembre 2018 dans le pays s’il a lieu, la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI-RDC) a choisi une nouvelle méthode de support au travers d’un vote électronique ou semi-électronique (c’est selon NDLR) au travers de ce qu’elle présente comme une imprimante de bulletin de vote et dite « Machine à votre ». Le système retenu par le pays venant de l’entreprise sud-coréenne Miru Systems.
Objet de toutes les fantasmes mais aussi de tous les rejets, la machine à voter fait aujourd’hui polémique dans le pays sans qu’aucun compromis ne soit trouvé pour son utilisation ou non selon le camp dans lequel l’on se trouve ; car non prévue dans la constitution ainsi que dans la loi électorale actuelle.
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Pour les opposants et une majeure partie de la société civile, il ne s’agit ni plus ni moins que d’une « machine à voler » pour faciliter encore une fois de plus la victoire du régime au travers d’une fraude programmée. Du côté du pouvoir, aucun ténor ne s’en prononce en dehors des lampions qui s’expriment en affirmant leur soutien total à cette « révolution de la modernité » made in RDC.
Les questions qui demeurent sont celles du côté pervers de ce mode de vote en RDC en rapport avec le niveau de familiarité avec le matériel informatique de la population congolaise dans sa majorité (en provinces), mais aussi de la résolution de pannes en cas des problèmes. Malgré le forcing de la CENI, l’on ne sait toujours pas si toutes ces paramètres ont été prises en compte ?
A presque deux mois des élections, une délégation de l’entreprise sud-coréenne Miru Systems séjourne à Kinshasa pour une ultime répétition en vue de « renforcer les capacités des techniciens congolais sur le software et hardware pour une bonne prise en charge de la machine à voter » dit-on du côté de la CENI.
Dans le cadre de la collaboration entre la CENI et Miru Systems, une équipe de techniciens venus de Séoul est arrivée à Kinshasa pour renforcer les capacités des techniciens congolais sur le software et hardware pour une bonne prise en charge de la machine à voter. pic.twitter.com/GuEU6C1OTV
— Ceni-rdc (@cenirdc) 16 octobre 2018
Le cas belge
Le cas le plus explicatifs de ce système de vote via un ordinateur impriment le bulletin de vote est celui de la Belgique avec les élections communales et provinciales du dimanche 14 octobre 2018. Comme ça se passe dans ce pays et à plusieurs reprises, des clivages Nord-Sud, Flandre-Wallonie et Bruxelles au milieu se remarquent.
Ainsi le vote électronique avait-il été exclu en Wallonie sauf uniquement dans la région de langue française (Bruxelles-capitale) et en communauté germanophone qui fait partie de la grande Wallonie, ainsi que dans 163 communes flamandes.
Quoi qu’on en dise malgré peut-être son côté pratique et confortable et l’épargne de pas mal d’argent qui reste à démontrer, la fin décidée du vote électronique par le gouvernement wallon s’explique en raison de son coût (1,5 euro par électeur pour le traditionnel vote papier et 4,3 euros par vote électronique selon les partis politiques comme le PS, le CdH et Ecolo qui en réclamaient carrément la suppression.
Lire aussi : Elections Communale et Provinciale Belges : Quand l’informatique bogue, quid des machines à voter en RDC ? https://www.afriwave.com/2018/10/14/elections-communale-et-provinciale-belges-quand-linformatique-bogue-quid-des-machines-a-voter-en-rdc/
Des délégations internationales en observateurs à Bruxelles
Des délégations étrangères venues de cinq pays étaient dans la région de Bruxelles-capitale pour observer le vote électronique, analyser son fonctionnement et en comprendre le processus, la Belgique étant perçu comme un « modèle » dans le domaine. Au total quarante visiteurs étaient présents dans les bureaux de vote bruxellois venant du Canada, de l’Estonie, de l’Ukraine, de la Tunisie ; mais surtout de la Corée du Sud, pays dont l’entreprise Miru Systems fournit la machine à voter à la RDC.
Et comme un coup de bol, ces observateurs ont vécu pas mal de couacs durant les élections avec panne des ordinateurs soit qui ne démarraient pas, soit qui ne reconnaissaient pas les clés USB utilisés pour leur fonctionnement. Ce qui a causé d’énormes retards dans le processus avant que des solutions ne soient trouvées et la réponse plus que réaliste mais amusée de Paul-Henry Philips, le coordinateur de la journée de visite : « Connaissez-vous un système informatique qui n’a pas de problèmes ? ».
Malgré l’impression faite par ce mode de vote, c’est la délégation sud-coréenne qui a surpris par sa remarque : « En Corée, la population n’a pas vraiment confiance dans le système de vote électronique. Nous avons une technologie tout à fait développée mais nous ne l’utilisons pas [celle développée par l’entreprise Miru Systems NDLR]. A Bruxelles c’est utilisé et je suis très impressionnée » expliquait Shim Jiyeong.
Pour Anatolin Suldin, membre de la délégation ukrainienne : « le processus est très organisé, nous apprécions le système de vote et de comptabilisation. Nous avons vu beaucoup de choses intéressantes. Mais ce n’est pas applicable en Ukraine pour l’instant ».
Roger DIKU et TSHIKUYI Tubabela, Envoyés spéciaux à Bruxelles