ANGOLA : Opération « Resgate » lancée, la ville de Luanda sous service minimum

La capitale angolaise s’est réveillée ce mardi 06 novembre 2018 dans une panique inhabituelle. Aux premières heures de la matinée, des patrouilles policières de grande envergure ont été aperçues dans plusieurs coins de la ville. La nouvelle s’est répandue comme une traînée de poudre. Les étrangers ont vite résolu de rester chacun chez eux. Les petites boutiques tenues par les Ouest-africains et les congolais n’ont pas ouverts. Même certains établissements appartenant aux angolais sont restés fermés pour se mettre à l’abri des tracasseries policières.

La grande avenue Pedro Van Dunem qui relie les quartiers Golf 1 et Golf 2 jusqu’à Palanca est vide le long des trottoirs, les vendeurs à la sauvette ont disparu. A la Grand-Place Sanatorio de Palanca, aucun signe de vie non plus. Déjà ce quartier réputé pour sa forte concentration congolaise a été visitée la semaine dernière par la police, témoigne un habitant.

Pour se prévenir de toute brutalité liée à la « congophobie » de certains agents de la police, Antonio déclare qu’il restera chez lui jusqu’à la fin de la semaine : « Mes enfants n’iront pas à l’école à cause de ce que j’ai vu le week-end dernier ». Cet homme d’une cinquantaine d’années affirme qu’il a vu de policiers arrêter des individus sur la voie publique tout simplement parce qu’ils portent sur le bras droit les stigmates des vaccins considérés ici comme un signe d’identification du congolais (ex-zaïrois).

Un autre, Marcos dit qu’il est resté chez lui à cause de son accent linguistique francophone. Selon lui, malgré leurs documents en ordre, beaucoup de congolais et angolais ont souvent été expulsés vers la RDC par les services d’Immigration angolaise à cause de leur accent linguistique maternel.

A Cazenga, l’avenue des commandos qui mène à Cuca est aujourd’hui noire de monde avec des marcheurs à pied de part et d’autre sur les trottoirs. Les vendeurs sont absents  bien sûr. Les boutiques donnent l’air d’avoir cessé de fonctionner il y a 10 ans. Les minibus qui font le transport sont rares. Les responsables ont décidé de mettre leurs véhicules au garage par crainte des tracasseries policières éventuelles. Aujourd’hui nombreux sont ceux qui sont forcés à faire le pied faute de moyen de transport sur certaines avenues.

La Grand Place Cuca reçoit tous ces piétons qui inondent les trottoirs en lieu et place des vendeurs à la sauvette. Jusqu’à 10 heures, Luiza attend ici un moyen de transport qui n’arrive pas. Pendant que la jeune femme se plaint du retard qu’elle enregistre pour gagner son lieu de travail, une jeep de patrouille militaire s’arrête devant elle et laisse descendre 4 militaires tous silencieux et armés ; devant les regards médusés d’une population qui se demande si le pays est en état de guerre.

Dans l’autre sens de la grande avenue Ngola Kiluanje, une autre jeep de patrouille de la fameuse police d’intervention rapide roule à vive allure au son des sirènes, avec à son bord une dizaine  d’hommes en uniformes bien connus pour leur gâchette facile. C’est déjà les environs de midi, la canicule se fait sentir. Les vendeuses de bouteilles d’eau sont introuvables. On peut entendre ici un passant à la recherche d’un liquide quelconque pour se rafraîchir maudire tous les saints de Bible ou encore un autre déclarer avoir marché 2 km sans succès, à la recherche d’une échoppe pour recharger le crédit de son téléphone.

A Mabor, le rond-point Imbondeiro est vide ; contrairement à ses habitudes de quartier bruyant. Les haut-parleurs habitués à diffuser la musique congolaise à tue-tête  se sont tus. Les vendeuses de chikwangues et makayabu n’apparaissent plus. Aucune syllabe de lingala n’est entendue de la bouche des quelques curieux qui peuvent au moins observer de loin le déploiement des hommes en bleus qui ont investi la place. Une patrouille des sapeurs-pompiers passe bon enfant, certes à la recherche des incendies et autres calamités.

A  Hoje ya Henda, la rue Areio connue pour ces expositions vestimentaires affiche sa concentration habituelle. Aucune chaussure de basket n’est pourtant publiquement présentée. Ici la présence policière est aussi visible. Mais on peut y voir aussi une centaine de groupes de 15 à 20 personnes debout devant les magasins comme à l’attente d’un événement social qui ne dit pas encore son vrai nom.

La grande église du combat spirituel de Hoje ya Henda connue pour ses cultes non-stop est vide ce matin, tout comme les mosquées de ce quartier commercial à forte concentration musulmane.  Les hautes instances des services de police parlent ce matin d’une opération pour « racheter l’angolanité dans ses valeurs ».

Pedro Da Conceição

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Rédaction

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