Par Damien Roulette
Le 11 novembre, lors des cérémonies du centenaire de l’Armistice de la Première Guerre mondiale, vous avez pu voir des drapeaux belges, britanniques, canadiens, l’étendard d’anciennes colonies du Royaume-Uni mais par contre pas de drapeau congolais. Pourtant, les soldats de ce qui était à l’époque le Congo belge ont joué un rôle prépondérant dans ce conflit. Ce qui fait donc dire à certains que les Congolais sont les grands oubliés de ces commémorations voire même que « la Belgique a un problème sérieux avec son passé colonial ».
Georgine Dibua, coordinatrice de l’ASBL Bakushinta, a mis sur pied une exposition pour mettre en lumière le parcours des soldats congolais lors des deux Guerres mondiales. Elle y évoque le cas des 32 soldats congolais qui se sont engagés volontairement au sein des troupes belges mais aussi celui des milliers de soldats qui composaient la Force publique, les forces présentes en Afrique.
Pas d’invitation pour Kinshasa et pas de réponse satisfaisante pour les descendants
« Autant, il y a eu de morts belges à la bataille de l’Yser, entre 15.000 et 35.000, autant en Afrique, on a près de 29.000 morts comptabilisés comme des Belges tombés au combat », explique Georgine Dibua.
La Force publique a remporté d’importantes batailles en Tanzanie (celle de Tabora qui est un tournant de cette Première Guerre mondiale), au Cameroun et en Zambie. A l’époque, les soldats sont salués de manière très…coloniales comme vous pouvez le voir dans notre vidéo.
Pour ce centenaire, aucune invitation politique officielle n’a été envoyée à Kinshasa ou à de hauts gradés congolais. Ce qui peut partiellement s’expliquer par des relations politiques tendues entre la Belgique et la République démocratique du Congo.
Un manque de considération perceptible il y a 100 ans
« Nous n’avons reçu que des réponses vagues de la part des autorités », soupire Georgine Dubia. « On nous répond: oui, mais…on commémore tous les Belges! » Une réponse surprenante puisque jamais les soldats congolais ne jouiront du statut d’un soldat belge. A titre d’exemple, sur le front africain, chaque officier belge profitait du service de 20 porteurs (il n’y avait pas de véhicules) et était porté par quatre hommes lorsqu’il était fatigué. Le soldat congolais, lui, n’avait pas vraiment le droit d’être fatigué au risque de recevoir des coups de chicotte.
Parmi, les photos visibles dans cette exposition, certaines évoquent déjà un manque de reconnaissance à l’époque vis-à-vis des soldats congolais. Notamment, celle intitulée « Tombe du soldat indigène tombé au champ d’honneur » : « Ici, on sait très bien qui est mort. Ce n’est pas un cadavre que l’on a ramassé, son identité était connue mais il restera le soldat indigène », détaille amèrement Georgine Dibua.
Un combat qui a influencé le roi Philippe
Au début des commémorations de la Première Guerre mondiale, plusieurs associations de militants avaient fait entendre leurs revendications vis-à-vis des autorités et de la famille royale. Ce qui avait notamment poussé le roi Philippe à faire évoluer le discours qu’il a tenu à Nieuport le 28 octobre 2014.
En 2016, le gouvernement belge avait déposé une gerbe devant l’unique monument belge dressé à la mémoire des soldats congolais (au square Riga, dans la commune de Schaerbeek). C’était pour le centenaire de la prise de Tabora (Tanzanie) qui marquait alors le début de la fin de l’empire allemand.
Article à lire sur : Les Congolais grands oubliés des commémorations de l’Armistice de 14-18? https://www.rtbf.be/info/belgique/detail_les-congolais-grands-oublies-des-commemorations-de-l-armistice-de-14-18?id=10072856