Je suis parti d’une réflexion qui pose véritablement la question sur l’incapacité des FARDC et de son commandement à mettre hors d’état de nuire toutes les forces négatives qui endeuillent les nôtres dans l’Est du pays. Hormis le fait, qu’il y a ou qu’il y aurait des tireurs des ficelles ou des infiltrés en son sein, je ne pense pas que ces derniers soient plus que les nationaux, même s’ils occupent des fonctions élevées au sein de notre armée.
Mon analyse s’est faite sur un seul point qui échappe à nos autorités tant politiques que militaires. Il s’agit prioritairement de la MOTIVATION de nos militaires qui sont aux différents fronts de l’Est du pays.
La vérité est que définir la motivation au travail, car aller au front, relève du défi tant les avis, les opinions, les analyses, les pratiques divergent sur un sujet combien important pour nos services de sécurité. Chacun de nous peut donner son avis sur les échecs de nos forces à en finir avec les massacres qui continuent chez nous.
L’analyse que je propose tentera de présenter les principaux éléments théoriques qui doivent alimenter le débat actuel sur le massacre dans l’Est du pays et évoqueraient les controverses de ce qui s’y passe voici plus d’une décade sur les tentatives de garantir la paix et la tranquillité malgré la présence d’une force militaire onusienne chez nous.
Pourquoi un tel intérêt ? Cette interrogation paraît légitime dans la mesure où il nous semble que les dirigeants de la RDC apparaissent comme des gens qui ont épuisé toutes les solutions qu’ils avaient face à la recrudescence de ces animalités de l’Est de la République que l’on voudrait y mettre définitivement fin.
Que se passe-t-il dans l’Est du pays ? Pourquoi une armée « professionnelle » peine à en finir avec ces massacres à répétition ? Envoyez des soldats dans des conditions lamentables peut constituer cette faiblesse de nos forces à faire convenablement et efficacement le travail que l’on attend d’eux ? Sont-ils vraiment motivés pour faire un tel travail ?
La motivation correspondrait alors à la justification des actes et à l’exposé des motifs d’un ensemble des décisions. Il faut décider sur leur chaîne de commandement, il faut décider sur leur collation, il faut décider sur leur état de santé, il faut décider sur leur armement, il faut décider sur leur rémunération, il faut décider sur leur suivi médical, il faut décider sur leur famille, il faut décider sur leur retour probable et certain après les fronts, morts ou vifs et mutilés ou intacts ainsi qu’aux conséquences multiples…
Le concept de motivation doit entrer dans le langage des dirigeants congolais afin qu’ils comprennent le fonctionnement de notre armée. Ils doivent se poser la question qui fera émerger ce concept souvent négligé chez nous : qu’est-ce qui pousse ou qu’est-ce qui suscite la décision de l’individu de se comporter de telle ou telle façon selon le contexte, d’agir dans telle ou telle direction selon sa décision ou sous la pression exercée sur lui ?
Cet intérêt pour la motivation de nos militaires repose sur le principe que la réussite de leurs actions sur terrain dépend des performances collectives, elles même tributaires des performances individuelles.
Je me suis penché sur cette question afin d’améliorer le boulot de nos militaires aux fronts. C’est un travail scientifique, une méthode rationnelle, peut-être aussi une recette magique qui va répondre à cette question sur l’inefficacité des nôtres à neutraliser toutes les forces négatives qui sèment la mort matin, midi et soir sans une seule fois être inquiétés par nos militaires. Est mauvaise troupe ou mauvais chef ?
Le concept de motivation représente le construit hypothétique utilisé afin de décrire les forces internes et/ou externes produisant le déclenchement, la décision, la direction, l’intensité et la persistance du comportement humain à effectuer le travail lui confié.
Pourquoi nos militaires ne le font-ils pas ? Sont-ils suffisamment motivés ?
Nous allons décortiquer cette situation, mais avant, nous allons poser un préalable : si la motivation se veut un construit hypothétique, c’est-à-dire un type de comportement que tout individu est supposé pouvoir développer, elle devient un processus qui est déclenché à l’origine par l’action d’une force motivationnelle intérieure laquelle dépend de caractéristiques personnelles comme les besoins, les pulsions, l’instinct, les traits de personnalité à accomplir une tâche quelle que soit sa nature.
Ce construit peut être aussi déclenché par une force motivationnelle externe qui dépend de la situation, du conditionnement de travail, de la nature de l’emploi, du mode de management des hiérarchiques, etc.
Ces facteurs de motivation internes ou dispositionnels, et externes ou situationnels, sont changeants et propres à chaque individu. Il est ici question du niveau de motivation qui peut « être soit faible soit fort, variant à la fois entre les individus à des moments déterminés, et chez une même personne à différents moments, et selon les circonstances » : Pour nos militaires au front, c’est un permis de tuer. Allez tuer sans être tués vous-mêmes !
L’on s’accorderait sur les caractéristiques de la motivation et distinguerait quatre éléments constitutifs de ce construit et tous dépendant du conditionnement du travail, il s’agit en premier lieu, du déclenchement du comportement : c’est le passage de l’absence d’activité à l’exécution de tâches nécessitant une dépense d’énergie physique, intellectuelle ou mentale. La motivation fournit donc de l’énergie nécessaire pour effectuer le travail.
Puis, vient la direction du comportement, donc la motivation va diriger le comportement dans le sens qu’il convient, c’est-à-dire vers les objectifs à atteindre : neutraliser et dans les pires des cas : Tuez ! La motivation devient ainsi la force incitatrice qui oriente l’énergie nécessaire à la réalisation des buts à atteindre : Neutralisez les forces du mal !
Mais aussi, l’intensité du comportement, c’est-à-dire que la motivation va inciter à dépenser l’énergie à la mesure des objectifs à atteindre : Sécurisez la population ! Elle se manifestera par le niveau des efforts physiques, intellectuels et mentaux qui seront déployés dans le cadre de cette tâche.
Et finalement, la persistance du comportement, c’est-à dire que la motivation va inciter à dépenser de l’énergie nécessaire à la réalisation régulière d’objectifs, à l’exécution fréquente de tâches pour atteindre un ou plusieurs buts : la paix et donc la tranquillité.
Par conséquent, la motivation devient l’ensemble des efforts déployés dans le travail dirigés avec intensité et de manière persistante vers des objectifs attendus. Ces efforts ne sont que la somme d’énergie physique, intellectuelle et/ou mentale engagée dans une activité précise. C’est donc un processus qui active, oriente, dynamise et maintient le comportement des individus vers la réalisation d’objectifs attendus.
Est-ce que les militaires congolais envoyés aux différents fronts sont suffisamment motivés ?
Quiconque répondra à la question pourquoi ces massacres éhontés se poursuivent tranquillement dans un espace bien déterminé et dans un silence qui devrait en principe interpeller certaines consciences ?
Silence ! On tue chez vous… Silence ! On meurt chez nous… voilà le sort de toute une population abandonnée à son triste sort.
Sommes-nous conséquents ?
Roland MENA
Le Procureur