RDC : Scandale à Haut Débit, le nom de domaine .cd lock down avant la rescousse du chinois Huawei

Voici plus d’une semaine maintenant que la plupart des sites enregistrés sous le nom du domaine .cd sont restés inaccessibles ; et parmi eux celui de la presidence.cd, sans explication officielle.  La société Congolaise des Postes et des Télécommunications ne fournit aucune explication convaincante à ses clients sur l’inaccessibilité du service .cd. On apprend que c’est l’équipementier chinois de Huawei qui a été appelé à la rescousse pour la réinitialisation du compte administrateur du serveur central, ce qui a permis un rétablissement de la situation l’après-midi du samedi 14 novembre 2020 avant une nouvelle coupure. Et depuis, c’est un nouveau black-out.  

Ce désagrément incompréhensible révèle le niveau de corruption dans ce domaine stratégique. S’il n’avait pourtant touché qu’une partie des sites liés à ce nom de domaine, certains sites n’utilisant qu’une interface mirroring .cd comme un masque, il y a lieu de s’inquiéter de ce nouveau scandale. Alors qu’on aurait redouté une panne technique comme celle qui secoue le n°1 de la téléphonie mobile en RDC actuellement Vodacom pour ne pas le citer à cause de son service internet, c’est le gestionnaire le gestionnaire de ce nom de domaine qui serait porté disparu.

En effet, l’homme qui gère –sur son laiton privé dit-on– le service pour le compte de la SCPT a simplement disparu en déconnectant le serveur et en emportant les données de tous les sites dépendants. Il serait recherché par les services de sécurité sur fond d’une affaire de détournement dont l’instruction judiciaire serait en cours.

Scandales à répétition…

Les scandales à répétition qui se passent du ministère des Postes et Télécommunications à l’administration qui gère ce secteur important du pays à savoir l’ex-OCPT et son successeur actuel la SCPT ne sont plus à compter depuis les années Kabila à ce jour, l’affaire dite de la « Fibre Optique » n’ayant jamais été tirée au clair.  

L’on se rappelle comment a été menée la construction du point d’atterrage de la fibre optique à Muanda dans l’opacité la plus totale avec la disparition tantôt de 3 millions ou 12 millions de dollars américains sortis des caisses de l’État et dispatchés entre des bonzes de l’ancien u régime Kabila. L’affaire avait fait grand bruit à l’époque conduisant même à la mise au frais du DG de l’OCPT faussement donné pour emprisonné à Makala alors qu’il était juste gardé, le temps de laisser se calmer la tempête, dans la fraîcheur d’une villa de la commune de la Gombe.

L’ex-ministre de tutelle se défendant bec et ongles de n’avoir jamais être impliqué dans le détournement des fonds liés à cette affaire de la fibre optique. Pourtant, selon des sources bien informées, cela fait des années qu’une « véritable mafia » s’est installée au vu et au su de tous à l’Hôtel des Postes, pompant les recettes de l’État à tout va, impunément. Sa puissance vu ses soutiens a fait qu’elle a réussi à étouffer dans l’œuf la Société congolaise de fibre (SOCOF).

C’est cette dernière, société de patrimoine qui se destinait à gérer et commercialiser l’infrastructure de la fibre optique de l’État sous type de gestion privée, sur les fonds de démarrage fournis par la 5ème phase du projet Central African Backbone (CAB-5). Le réseau de fibre optique de la SOCOF devait connecter la RDC au monde via le WACS et émailler sur 4 villes (Kinshasa, Lubumbashi, Goma, Kisangani) avec un prolongement aux pays voisins, la Zambie, la Tanzanie, le Rwanda, le Burundi et l’Ouganda.

Pour financer ledit projet, ce fut l’Association Internationale de Développement, considérée comme le guichet pro-pauvres du Groupe de la Banque mondiale ; qui avait disponibilisé 92 millions de dollars américains. Le CAB-5 ayant entre autres comme missions de doter la RDC d’une infrastructure à fibre optique viable en réglant la question de la ligne Muanda-Kinshasa (correction et construction d’un backup en redondance), de mettre en place un programme de gestion des déchets numériques et d’appuyer les réformes du secteur des télécommunications et de l’ex-OCPT.

Une réorganisation s’impose

Le dernier scandale a révélé le niveau de la corruption qui gangrène tous les secteurs de la vie nationale jusqu’à plomber le fonctionnement même de l’Etat. L’on apprend par exemple que c’est un « partenaire privé » venu d’Afrique du Sud installé au sein de la SCPT qui agissait officiellement en soutien technique de l’entreprise pour la gestion du domaine .cd et géré par un individu, grâce l’appui de l’ICANN qui est ce grand ordonnateur des noms de domaine. Pour « Internet Corporation for Assigned Names and Numbers », comprenez « Société pour l’attribution des noms de domaine et des numéros sur Internet » ; l’ICANN a été créée en 1998 sous l’impulsion d’Al Gore, alors vice-président des États-Unis.

Selon des sources internes sous anonymat, ce « partenariat » privé n’était pas seulement régulier parce n’ayant respecté aucun prescrit en la matière. Plus grave, l’entreprise privée détournait les paiements dus à la SCPT sur les services du registrar .cd pour les payer sur un compte individuel non connu de l’État-propriétaire.

La pratique aurait ainsi prospéré pendant quelques années jusqu’à récemment lorsque des changements sont intervenus à la tête de la société apprend-on, des pressions ayant été faites sur les gestionnaires pour comprendre la destination des recettes du domaine national. Elles ont abouti à des interpellations de quelques acteurs avant la disparition des données de plusieurs services et entreprises y compris la présidence de la République et la fuite de l’individu aujourd’hui recherché.

De l’ex-ONPTZ à la SCPT en passant par l’OCPT, c’est un éléphant blanc aux pieds d’argile qui ne tient debout qu’artificiellement selon des sources mêmes du ministère du Portefeuille où l’on détient des études d’état des lieux établissant une faillite de fait caractérisée par une cessation de paiement doublée de cessation d’activités, particulièrement dans la partie télécom sans compter les impayés de salaires dans cette entreprise jadis parmi les fleurons du portefeuille zaïro-congolais, mais réduite aujourd’hui au symbole même du contre-modèle du genre.

Toujours selon des sources, « un consultant recruté par le gouvernement avait carrément proposé la restructuration par la scission de la société en deux entités distinctes pour faire émerger sur les cendres de la société actuelle une entreprise publique des postes requinquée et modernisée axée sur le service postal universel, et une nouvelle entreprise des télécommunications assainie pour prendre le relais de la direction des télécommunications actuellement exsangue ».

Mais le préalable à la concrétisation de ces options qui est une loi à voter par le parlement n’a jamais vu le jour, les réseaux d’intérêt maffieux dont les ramifications s’étendent jusqu’à la présidence de la République ayant bloqué le processus qui, s’il aboutit pourrait leur enlever le bifteck de la bouche. Surtout que ces mêmes réseaux qui ont la mainmise sur le secteur et qui opèrent depuis des années avaient réussi à distiller dans l’opinion l’idée selon laquelle le CAB-5 menacerait la souveraineté nationale si la gestion de l’infrastructure devait échapper à l’opérateur étatique, mettant ainsi sur la touche la SOCOF.

Pour l’analyste Jeff Bunduki Kabeya, « Il est impérieux que les services stratégiques de l’Etat prennent en compte cette question de la gestion des télécommunications dans leur globalité. C’est une question de sécurité nationale. Il est inadmissible que le sommet de l’Etat soit coupé du monde parce qu’un individu gère les noms de domaine comme son bien privé. Ce fait peut nous faire comprendre pourquoi le président Trump comme certains pays occidentaux, au delà du nom du fabricant chinois de téléphone, veut absolument contrôler ce secteur vital pour un pays. Celui ou ceux qui ont participé à cette coupure intempestive devraient être arrêtés pour haute trahison et répondre de leur forfait. Comment priver un pays de communication au moment où le monde entier met en place des politiques de télétravail et d’enseignement à distance? Qui va payer le manque à gagner des entreprises ?».

La lutte contre les antivaleurs prônée par le président de la République Félix Tshisekedi passera-t-elle par-là en décapitant la tête du serpent de la corruption dans le secteur national de la télécommunication et autour de la SCPT ? Là demeure la question !

Roger DIKU et Thaddée Luaba Wa Ba Mabungi

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Rédaction

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