Est-ce la fin d’un monopole absolu dans le secteur agroalimentaire dont il a joui jusqu’à présent, c’est le moins que l’on puisse se demander avec l’annonce surprise de la fermeture d’une partie de ses activités en province du Kongo Central par l’Entreprise Générale d’Alimentation et de Logistique, « Egal SARL ».
« La Direction Générale d’EGAL Sarl informe ses partenaires et sa clientèle de sa décision de fermeture à dater de ce 31 décembre 2020 de ses activités agricoles de la Valée de Kanga au Kongo Central. Cette mesure touche donc la filière de production d’huile de palme, de riz et de viande de bœuf » peut-on lire dans un communiqué daté de ce 29 décembre 2020 et signé son Directeur-Gérant Franck Tshibangu.
La Société ÉGAL Sarl, proche de la famille de l’ancien président de la RDC Joseph Kabila par son épouse Olive Lembe Di Sita justifie sa décision : « Cette fermeture fait suite aux nombreux blocages et difficultés que connaissent d’autres activités d’EGAL (Pêche et importation) pourtant principales pourvoyeuses du financement du projet agricole dont le retour sur l’investissement n’est en réalité envisageable qu’à partir de la 5ème année d’exploitation ».
Des déboires annoncées…
La société industrielle EGAL Sarl a été soupçonnée il y a quelques mois de ne pas payer ses impôts et taxes depuis plusieurs années en plus de bénéficier d’exonérations non légales. Contrôlée par la famille Kabila, son Président du Conseil d’Administration (PCA) n’est autre qu’Albert Yuma Mulinde, l’inamovible ex-président déchu de la Fédération des Entreprises du Congo (FEC).
De ce qui ressemble à un début du démantèlement de l’empire économique de l’ex-chef de l’Etat, des sources proches de l’administration expliquent les difficultés d’EGAL par la suppression de toutes les exonérations d’impôts et taxes dont cette société avaient bénéficié jusqu’à présent indûment sur ses activités d’importations.
L’affaire Yuma
Reconduit à la tête de la Présidence du Conseil d’Administration de la Gécamines dans une entente Kabila et Tshisekedi sur fond des contradictions entre partenaires de l’ex-coalition au pouvoir, Albert Yuma avait été pressenti au poste de premier ministre au lendemain de l’accord entre le FCC de Joseph Kabila et le CACH de Félix Tshisekedi. C’est le veto du chef de l’Etat qui avait fait qu’il ne soit pas devenu premier ministre.
En effet, sur plainte de Dieudonné Kasembo Nyembo, le Conseil d’État avait estimé que le scrutin ayant conduit à la réélection de Yuma pour un nouveau mandat de trois ans avait été entaché d’irrégularités, et donc demandé l’organisation d’une nouvelle élection à bulletin secret. Lors de ce vote, Yuma réélu par plébiscite fut le seul candidat en lice ; ses deux concurrents Michel Sefu et Dieudonné Kasembo Nyembo ayant été recalés par la Commission des sages avant le vote en conseil d’administration.
Contexte politique tendu et recomposition en vue
Quoi qu’on en dise, la chute d’Albert Yuma constitue une autre page qui se tourne et une nouvelle étape de gagner par Tshisekedi sur le clan Kabila et la toute hégémonie de son parti le PPRD ainsi que sa plateforme électorale du FCC aujourd’hui en déliquescence.
Ce changement de tête au sommet de l’organisation patronale intervient en plein bouleversement politique à Kinshasa avec la fin annoncée, le 6 décembre 2020, de la fin de la coalition que formait Joseph Kabila et Félix Tshisekedi avec la naissance bientôt de l’Union Sacrée de la Nation voulu par le nouveau président de la République après deux ans de pouvoir conflictuel avec son prédécesseur.
Le nouveau PCA élu, Dieudonné Kasembo Nyembo, l’a été aussi au terme d’un processus épique que polémique car étant aussi le seul candidat en lice ; et seulement avec 14 votants sur 130 membres présents lors de ce scrutin qui s’est déroulée dans la salle de réception de l’organisation. Les locaux de la FEC étant officiellement fermés pour cause « d’incompatibilité de la tenue d’une séance électorale avec les normes légales et statutaires pertinentes » un document de la présidence sortante relevait également « le risque sanitaire qui requiert obligatoirement la désinfection immédiate de ses locaux et la prise de mesures préventives appropriées ».
Jusqu’à la dernière minute, les équipes d’Albert Yuma ont tout tenté pour bloquer l’organisation du nouveau scrutin. Ce changement de tête au sommet de l’organisation patronale intervient en plein bouleversement politique à Kinshasa. La fin de l’ère Yuma Mulimbi en poste depuis 2005, l’un des piliers de l’entourage de Joseph Kabila s’inscrit dans ce contexte tendu et la recomposition politique en vue à Kinshasa.
Thaddée Luaba Wa Ba Mabungi
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