Par Moïse Musangana
En désespoir de cause pour régenter la désignation du président de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) après la énième chance accordée aux confessions religieuses par le président de l’Assemblée nationale, les prélats catholiques et protestants perdent toute maîtrise et descendent, incroyablement, en dessous de la ceinture. Avec raison.
L’agitation dont ils ont fait montre ces derniers temps en ameutant des ambassadeurs et d’autres diplomates accrédités à Kinshasa, voire leur vilain chantage d’organiser des marches si jamais il y a passage en force pour Denis Kadima, semblent avoir accouché d’un souriceau.
Ainsi donc, sans scrupule, sans retenue, sans réserve, et cela au mépris de l’humilité qui doit les caractériser, ils livrent, avec véhémence, aux chiens l’image des institutions de la République, particulièrement du président de la République et de l’Assemblée nationale. Et aussi de leurs confrères religieux, le Groupe des 6 (G6), qu’ils regardent avec condescendance et pour lesquels ils n’ont pas la moindre considération. A leurs yeux, ce sont des moins que rien, des minables, des pions, des ignorants, des irresponsables…
En tout cas, c’est ce que traduit la prestation arrogante, teintée de calomnies, d’imputations dommageables, de dénigrement, voire d’insultes, de l’abbé Nshole sur Télé 50, lundi 04 octobre 2021. Dédaigneux, méprisant et impertinent, mais psychologiquement sonné, ce clergé catholique a déversé sa bile sur le président de la République en soutenant que la candidature de Denis Kadima a été accompagnée de la corruption et, qu’il y a peu, des acteurs politiques de l’Union sacrée de la Nation sont venus négociés avec eux (catholiques et protestants) pour solliciter leur abstention, Denis Kadima étant le candidat du chef. Et de renchérir qu’ils n’ont pas de problème avec le chef, mais voudraient cependant d’un processus électoral crédible.
Pour l’abbé Nshole, les autres chefs religieux ne connaissent pas non seulement la loi, mais aussi la charte qui les régissent. Ce sont des gens qui ont rempli leur mission et ils doivent s’accrocher jusqu’au bout pour montrer qu’ils ont fait leur part ! Quant aux députés, il a dit qu’ils doivent se montrer sérieux parce qu’il ne voit pas comment ils peuvent entériner la position du Groupe des 6 alors qu’il n’y a pas eu consensus sur le candidat président de la CENI.
Du Président de la République
Sans pudeur, l’abbé Nshole, au nom des catholiques et protestants, continue à soutenir les allégations de corruption sans apporter la moindre preuve. Dans une récente interview sur la VOA, le président Felix Tshisekedi a fait savoir que, recevant les responsables catholiques et protestants, des investigations menées dans son entourage n’ont mis personne en cause comme auteur d’intimidations, de menaces, voire d’actes de corruption envers les chefs religieux. Il a noté qu’il y a absence de preuves de corruption. Pour tout argument, l’abbé Nshole oppose les déclarations qu’auraient faites certains chefs religieux et qui, depuis lors, se sont ravisés.
Point de dessins à faire, c’est l’image de marque du président de la République qu’on veut atteindre, lui qui n’intervient pas en amont dans la procédure de désignation du président de la CENI. Par ailleurs, les prélats catholiques et protestants semblent être amnésiques en présentant aussi Denis Kadima comme proche du président de la République et surfent sur cette corde pour lui barrer la route.
Par deux fois, l’abbé Malu Malu, proche du président Joseph Kabila, contre le vœu de la hiérarchie catholique, avait été désigné président de la CENI avec l’appui des protestants et du G6. La CENCO avait-elle organisé des marches, vilipendé le président Kabila et ameuter la communauté internationale ?
Daniel Ngoy Mulunda, un protestant, cofondateur du PPRD, proche politiquement et « tribalement » de Joseph Kabila, a été désigné président de la CENI, avec le soutien du G6, sans susciter le courroux de la CENCO. Pourquoi s’était-elle tue ? De même, les protestants, avec la complicité du G6, ont roulé les catholiques lors de la désignation de Corneille Nangaa comme président de la CENI. Le PV a été signé au siège de la CIME sans les catholiques. Quelle était leur réaction ? Motus bouche cousue. Voilà pourquoi d’aucuns soutiennent que les prélats catholiques et protestants vouent une haine viscérale envers Félix Tshisekedi qu’ils camouflent sur la personne de Denis Kadima dont le profil sort du lot.
Des six autres confessions religieuses
Ce n’est pas la 1ère fois que les 6 confessions religieuses participent à la désignation du président de la CENI. Elles n’ont jamais fait l’objet d’un tel manque de considération de la part des prélats catholiques, jusqu’à les traiter de mesquins. Pourtant, ce sont elles qui ont toujours fait pencher la balance d’un côté. Les protestants ne les ont pas méprisées pour l’avènement de leur candidat Nangaa. Ce sont des pestiférées aujourd’hui parce que non rangées derrière telle ou telle autre église traditionnelle supposée être sociologiquement représentative.
En effet, les catholiques et protestants vivent une illusion. Ils s’enferment dans leurs tours d’ivoire, refusant d’accepter qu’ils aient perdu le leadership sur le plan religieux au Congo avec incidence négative sociologiquement. Ils ont perdu et continuent à perdre beaucoup de fidèles qui sont aspirés par les églises dites de réveil. Les églises catholique et protestante sont anciennes, mais il est faux de croire qu’elles sont représentatives présentement.
Du manque de sérieux des députés
Les prélats catholiques et protestants semblent descendre de la planète Mars. Ce n’est pas non plus la 1ère fois que l’Assemblée nationale, à travers les députés, entérine le choix du président de la CENI. Ce n’est pas la 1ère fois aussi qu’il n’y a jamais eu unanimité, à ne pas confondre avec le consensus, dans le choix du président de la CENI.
Les catholiques n’ont jamais avalisé le choix de Malu Malu, par deux fois, de Ngoy Mulunda et de Corneille Nangaa, mais ce n’est pas pour autant que les précités ont été recalés. Il est donc question de savoir si les députés ont été sérieux autrefois en renvoyant les catholiques paître et ils risquent de ne pas l’être avec la candidature de Denis Kadima.
Tout est question de stratégie. Même chez les religieux. Ce ne sont pas les députés qui choisissent, ils entérinent plutôt un choix des religieux ? Que vont-ils faire : se plier aux caprices des prélats catholiques et protestants qui, pour des raisons inavouées, bloquent la machine en voulant se doter d’un véto contrairement aux textes, parce que se proclamant plus représentatifs, ou entériner le choix de la majorité qui a montré sa bonne foi, malgré la médisance et la condescendance de leurs confrères ? Se plier aux caprices des prélats catholiques et protestants, c’est accepter que ces églises vont désormais régenter les décisions de la République.
De toutes les façons, l’abbé Nshole n’est pas un exemple en termes de probité et de morale. N’est-ce pas qu’il a balbutié à la télé pour donner la liste des partenaires qui avaient remis de l’argent à son église en rapport avec les élections de 2018 ? A quoi servait cet argent et il a été utilisé à quoi ?
Les catholiques et les protestants dans l’opposition
En scrutant les faits et gestes des prélats catholiques et protestants, point de dessins à faire pour comprendre que face à la descente aux enfers du FCC, la dégringolade de Martin Fayulu, l’inéligibilité de Jean-Pierre Bemba et des fumisteries de Moïse Katumbi, le boulevard est apparemment ouvert pour Félix Tshisekedi en 2023.
L’opposition est très faible pour l’arrêter. A moins qu’il survienne entre-temps, notamment, des scandales à même de l’éclabousser, l’amplification de l’insécurité à l’Est sur fond de l’état de siège et l’incapacité à mettre le pays sur l’orbite du développement.
Ce n’est un secret pour personne : la CENCO, avec le Cardinal Fridolin Ambongo en tête, accepte difficilement Félix Tshisekedi comme président de la République. Elle n’est pas prête à se faire hara-kiri, c’est-à-dire le voir à la tête du pays après 2023. L’abbé Nshole avait levé un coin de voile en présageant l’alternance alors que le président de la République en fonction peut postuler, aux termes de loi, le 2ème mandat.
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