« Un homme esseulé qui tente de s’accrocher pour un petit temps encore, le camarade Jean-Marc Kabund-a-Kabund appartient désormais au passé de notre parti. Des militants de base à nos élus comme nos partenaires au sein de l’Union Sacrée de la Nation ; il a été désavoué que personne ne lui fait plus confiance ». Ces propos amers sont ceux d’un cadre de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social UDPS/Tshisekedi depuis que le mélodrame du président ad intérim du parti continue de défrayer la chronique.
Deux semaines depuis sa virtuelle démission de son poste de 1er Vice-président de l’Assemblée nationale et sa promesse d’ouverture d’une « nouvelle page de l’histoire, qui sera écrite avec la sueur de notre front, qui coulera chaque jour qu’on affrontera les brimades, humiliations et tortures… », l’homme s’est tu dans toutes les langues.
Invisible à l’Assemblée nationale comme au siège du parti, Kabund n’a été vu qu’une seule fois dehors inspectant les travaux de construction du petit stade Waya-Waya de Limete dont il a pris en charge les frais.
« Nous l’avons sauvé une première fois après sa destitution par les proches de Kabila et il est redevenu 1er vice-président de l’Assemblée nationale alors que la camarade Patricia Nseya aurait dû occuper ce poste. À l’issu de l’altercation entre sa garde policière et un militaire de la Garde Républicaine (GR), ainsi que l’expédition punitive de la GR à son domicile ; on attendait de lui un acte fort en déposant officiellement sa lettre de démission devant le bureau de l’Assemblée nationale qui se fait toujours attendre. En lieu et place de cela, c’est la diversion de sa part, pensant ainsi faire oublier ses incartades inacceptables et le discrédit par lui jeté sur le parti ; peine perdue car il repartira d’où il était venu, c’est-à-dire dans la rue » fulmine encore de colère ce cadre.
Ces propos dures à entendre vis-à-vis de quelqu’un dont on ne disait que du bien encore sous peu traduit l’exaspération par Kabund créée depuis qu’il a accédé à la tête du parti sans la tenue du congrès extraordinaire comme prévu dans les statuts.
Mais aussi la colère de la base qui accuse clairement aujourd’hui de « corruption et népotisme » Kabund et son Secrétaire Général propulsé par lui Augustin Kabuya. Les reproches contre ces deux personnes étant la « privatisation du parti à leur profit pour l’affaiblir ».
Selon les indiscrétions, cette situation concerne « le recrutement et l’envoie des personnes dans les cabinets ministériels comme à la présidence de la République » pour lesquels il fallait débourser de l’argent au profit de deux responsable incriminés afin de voir son nom retenu dans la liste.
La colère est d’autant encore plus grande parmi les militants de la diaspora revenus dans la suite de la victoire à la présidentielle de Félix Tshisekedi en décembre 2018. « Chaque jour qui passait, Kabund fragilisait le parti en développant un discours de diabolisation systématique de la diaspora qu’il ne supportait pas, créant ainsi une fracture entre les militants de l’intérieur et ceux de l’extérieur du parti » explique un autre cadre.
Pour l’analyste politique Joseph Bunduki Kabeya, « Le dilemme du maître-nageur (surnom de Kabund NDLR), il se demande s’il doit couler et passer aux oubliettes de l’histoire ou s’il doit contre vents et marées s’accrocher pour continuer à exister comme homme politique ? S’il coule, c’est-à-dire s’il s’en va par la petite porte, c’est un terrible désaveu pour ce combattant qui a fait ses preuves dans son parti. S’il s’accroche, où trouver des soutiens ? À l’heure actuelle, tous ceux qu’il dirigeait lui ont tourné le dos. Que faire ? Il ne semble plus savoir à quel saint se vouer. Il est à la fois surpris et sonné par l’onde de choc lié à sa vraie-fausse démission de son poste de 1er vice-président du Parlement. Il ne s’attendait pas à un tel désaveu public. Comment recoller les morceaux quand le verre de la confiance est cassé ? ».
Il poursuit « Kabund n’a vraiment pas anticipé les dégâts que causeraient sa décision impulsive d’annoncer sa démission sur un réseau social. Il ne s’est pas demandé quels seraient les bénéfices de son acte pour lui-même, pour son parti et pour l’institution qu’il co-dirigeait. Il a vu sur le moment le contrecoup de son action contre le soldat de la Garde Républicaine. Aujourd’hui, il est accusé de divers maux dont la mauvaise gestion de son parti. Une partie de ce ressentiment rejaillit sur le SG Kabuya, à tort ou à raison ».
Joseph Bunduki Kabeya conclut que « Le comportement qui est reproché à Kabund peut s’expliquer par son incapacité à passer de la lutte révolutionnaire à la gestion de l’Etat. Ce n’est pas facile d’endosser ce costume. La nature fait garder des réflexes de combat. C’est ce manque de réalisme qui a obscurci le jugement de Kabund. Il n’avait pas pris la mesure de la hauteur de son ascension sociale. Chassez le naturel, dit un adage, et il reviendra au galop. Sa mésaventure doit servir de leçons à tous les « combattants », « militants », « camarades » et autres qui sont appelés à exercer un jour des fonctions publiques. Il faut se préparer à devenir un homme d’Etat et abandonner son costume partisan dans la garde-robe de l’Histoire. Ce n’est pas gagné d’avance ».
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Thaddée Luaba Wa Ba Mabungi