C’est sur la pointe des pieds que le Professeur Tharcisse Henry Kasongo Mwema Yamba Y’Amba De Mutoni Mwikalebwe Wa Kabingandu, 70 ans ; a tiré sa révérence aux Cliniques Ngaliema de Kinshasa. Cette triste nouvelle fait suite à une petite crise de grippe qu’il aurait piqué la nuit du vendredi 11 au samedi 12 novembre 2022 avant que les médecins ne constate son décès après son arrivée à l’hôpital.
Un message en pleurs de son épouse Da Hubertine Mwema Mbungu Tshibangu laissé dans mon répondeur WhatsApp m’a réveillé ce matin avec l’annonce inattendue de la mort de son cher époux depuis 40 ans qu’ils vivaient ensemble.
Sans savoir ce qui allait en advenir il y a un mois, le jour de son anniversaire ; nous nous échangeons encore ces messages : « [17 :47, 10/10/2022] ROGERS : Un très joyeux anniversaire Mzé. Que notre Dieu continue de faire son œuvre de bénédiction dans votre vie pour le témoignage de sa grandeur. Soyez abondamment béni en ce jour qui vous a vu naître. [19 :35, 10/10/2022] Mzé Tharcisse Henry : Aksanti sana, Rodger’s. Salut Rodger’s. J’ai vu ton message hier. Mais, j’étais dans le brouhaha que tu peux imaginer. Merci pour les vœux et la prière. On est ensemble ».
L’emblématique Tharcisse Kasongo Mwema Yamba-Yamba que j’avais l’habitude d’appeler Mzé ou Tonton et qui m’appelait Rodger’s n’est plus et je n’en crois pas un seul instant ! Journaliste, producteur, Professeur et Porte-parole du Président de la République Félix Tshisekedi depuis mars 2019, il venait à peine d’être nommé Président du Conseil d’Administration (PCA) de l’Agence Congolaise de Presse (ACP). Avec sa disparition brutale, c’est une voix qui s’est éteinte à jamais dans le monde de la communication et de l’enseignement universitaire.
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Ma rencontre avec les Mwema Kasongo et Mbungu, ma seconde famille…
Notre rencontre remonte à la fin de mon Graduat à l’ISTI en 1988 alors que j’allais entamer ma Licence en Relations Publiques où Mzé Tharcisse était déjà Assistant des cours. Il faut dire que j’étais déjà admirateur de ce journaliste de la présidence de la République sous Mobutu qui parlait un français chatouillant. De Kinshasa en RDC en passant par Argenteuil dans la banlieue parisienne en France et La Louvière en Belgique, la famille Kasongo Mwema était devenue ma seconde famille.
En juillet 1992, alors qu’ils habitaient déjà en France ; c’est maman Hubertine Mbungu qui m’amènera en Europe où je débarque chez son jeune frère tonton John Itunime dit vieux Mokonzi d’heureuse mémoire décédé brutalement quelques mois après mon arrivée dans sa maison de la Commune de La Louvière en Belgique.
Je ferais connaissance de feu Koko (Grand-mère) Ndaya Marie-Roger d’aussi d’heureuse mémoire, la maman de Da Hubertine ; une petite grand-mère affable qui m’appelait toujours « ndoyi » ou homonyme de chez qui l’on ne pouvait repartir sans avoir mangé ni obtenu 100 FB de l’époque comme argent de poche pour payer son transport comme si l’on était toujours à Kinshasa. Koko Ndaya a quitté ce monde à Paris où elle se trouvait en vacances chez ses enfants avant que son corps ne soit ramené chez nous au pays où elle repose pour l’éternité dans les Cimetières de la Gombe à Kinshasa.
De Paris à La Louvière comme à Kinshasa, je suis devenu depuis lors un enfant de la maison Mwema Mbungu, un membre à part entier de la famille de ce couple extraordinaire dans sa simplicité comme dans son engament chrétien.
Les Mwema m’ouvrent pour la première fois leur maison de Bandal Moulaert sur l’avenue Dekani pour consulter la bibliothèque privée de l’assistant rempli des nouveaux livres sortis des imprimeries et ramenés de ses multiples voyages l’étranger dans le cadre de son travail à la présidence. L’on se limitait dans le garage devant la maison où une table de travail trônait à côté de la voiture Renault 21 pimpante neuve du couple.
Quelques mois avant 1989, j’avais découvert une autre dimension de ce couple profondément croyant catholique, un engagement chrétien qui dure jusqu’à ce jour dans le cadre d’un groupe d’intercession de la Communauté des Hommes d’Affaires du Plein Evangile, très connue sous l’acronyme du Full Gospel.
Ce groupe de prière appelé Chapitre ne réunissait que les chrétiens récencés dans le domaine de la presse ou proches de ce milieu et s’appelait Chapitre Kin-Presse. Devenu membre à part entière dudit groupe, j’ai le droit d’entrer au salon des Mwema qui désormais ne me considère plus comme un simple étudiant de l’Assistant mais comme un frère chrétien à part entière.
En 1990, nous nous retrouvons brièvement avec Mzé Kasongo Mwema à la Conférence Nationale Souveraine (CNS) avant qu’il ne s’envole de nouveau pour la France à Bordeaux à l’Université Montaigne pour sa Thèse de Doctorat.
Devenu depuis 1998 journaliste et présentateur à Radio France International (RFI) à Paris en France où il vivait ; Kasongo Mwema avait rejoint le Katanga où il enseigne la communication à l’Université de Lubumbashi. A l’avènement du fils Tshisekedi Félix comme Président de la République en janvier 2019, Kasongo Mwema est nommé Porte-parole du Chef de l’Etat en mars 2019 ; une tâche à laquelle il s’y est employé avec tout son professionnalisme légendaire pondéré qu’on lui reconnait.
Une anecdote pourtant, alors jeune Rédacteur en Chef Adjoint au Groupe de Presse UMOJA de Léon Abel Robert Moukanda Lunyama d’heureuse mémoire et dans le cadre d’un reportage, il m’avait été donné de rencontrer en sa compagnie et en tête-à- tête Etienne Tshisekedi, un personnage considéré énigmatique, unique en son genre devenu un « mythe vivant » pour ses concitoyens.
Le mardi 17 septembre 1991 soit sept jours avant les pillages de l’armée de Mobutu (23 et 24 septembre), pour le compte du journal UMOJA je suis admis à l’entretien exclusif qu’il accordait après un long silence à la presse étrangère. Il s’agissait en l’occurrence, du correspondant de l’Agence Internationale de Télévision (AITV), filiale de Radio France d’Outre-mer -RFO-, le confrère Tharcisse-Henri Kasongo Mwema Yamba Y’Amba.
Avec son franc parlé légendaire, le leader de l’UDPS donnait son point de vue sur le début des travaux de la CNS, sur ses relations avec Mobutu et sur le prochain gouvernement d’Union nationale dont toute la ville parlait déjà. J’aurai l’opportunité de vérifier que non seulement l’homme restait pugnace, mais qu’il n’avait pas que des affabilités à l’endroit de Mobutu : « Un démocrate non contrôlé peut glisser vers la dictature, mais un dictateur ne deviendra jamais démocrate. Mobutu ne changera jamais, il continuera à semer la confusion dans l’esprit du peuple ; son départ reste une nécessité pour sauver la démocratie…Sa seule réussite dans ce pays demeure la corruption et la terreur pour empêcher la vérité de s’exprimer avec spontanéité » déclarait-il à Kasongo Mwema. Mon ancien Assistant à l’ISTI racontera cette anecdote en mai 2019 sur le plateau de la RTNC lors des obsèques de feu Etienne Tshisekedi Wa Mulumba d’heureuse mémoire, le père de l’actuel Président de la République.
Tshisekedi n’avait jamais caché ses sentiments vis-à-vis de Mobutu qu’il considérait comme le véritable fossoyeur du pays. Mais il avait aussi une opinion claire de ce qu’est et devrait être un démocrate. C’est en des termes crus qu’il dépeignait son vieil adversaire qualifié de « monstre à visage humain, sans ami, ni dans sa propre famille ni auprès de ses propres enfants ».
Même ton de discours radical de la part de son épouse Marthe Kasalu, celle que dans l’opposition et la population entières ; tout le monde à Kinshasa comme dans le reste du pays appelle « affectueusement » maman Marthe, épouse légitime jusqu’à la fin de sa vie du leader de l’UDPS depuis plus de 60 ans. À la vue physiquement de Kasongo Mwema, ne s’était-elle pas exclamée : « Kasongo Mwema ango nde ye oyo = C’est lui Kasongo Mwema ?
Longonya Okungu Dembe Doote, ancien étudiant de l’ISTI devenu Professeur dans la même institution aujourd’hui IFASIC écrit ce samedi 12 novembre 2022 : « Ouf ! Quelle mauvaise nouvelle pour moi et pour tous ses anciens étudiants de la 10ème Promotion dont je fus. Notre dernier échange date de sa récente nomination à la tête de l’ACP. Je l’ai félicité en latin comme il aimait bien me taquiner sur ma passion de belles lettres et mon devoir de sobriété de l’écriture journalistique…Et il me répondit en latin : « Gratias… ». En y ajoutant des élégants mots de ses souvenirs de ma modeste personne pendant mes années d’étudiant à l’ISTI. C’était ça le Vieux Tharcisse : un Vir bonus. Un homme bien. Même ses remarques, il les habillait de son élégance. Je me souviens de sa leçon sur l’amitié entre l’eau et l’orateur. Qu’il m’admonesta gentiment en me tendant un verre d’eau pour diminuer mon tract lors de ma première télévision comme jeune poète, auteur du poème « Kin-la-poubelle », invité surprise à son édition de ce certain dimanche de 1982… Puis, plus tard à Paris, il m’invita manger un sandwich à son domicile après m’avoir dissuadé d’aller « casser la baraque » avec désinvolture au nom des FONUS (Forces Novatrices de L’Union Sacrée de l’opposition), dont j’étais le porte-parole au Benelux, contre un politicien de renom malade, et qui méritait notre respect à tous… Tharcisse Mwema, c’était surtout un grand cœur. Qui n’a pas hésité à emmener toute sa famille de Paris à Nantes, juste pour aller consoler l’ami et frère Bokal Botowamungu dont le fils venait d’être assassiné violemment par un autre adolescent à peine 20 ans…Le monde de la presse RD Congolais perd un baobab, un aîné et un maître dans l’art du micro…Adieu, le Vieux ! ».
Un autre témoignage est celui de Jean-Pierre Eale dans un groupe WhatsApp ce jour : « Dans notre édition d’E Journal Kinshasa du 18 mai 2020, j’avais fait un clin d’œil à cet ami et confrère. Voici la teneur de mes propos : C’est à la fin du rallye Safari du Zaïre de 1983 que je fais la connaissance d’un nouveau journaliste sportif venu de Lubumbashi, un an auparavant et qui s’illustrait dans la présentation des programmes de sports. Il le fait tellement bien qu’il devient tout de suite le chouchou des sportifs car il est de la trempe de Lucien Tshimpumpu, Paul Basunga et Célestin Kabala.
Très vite aussitôt, il quitte la direction des sports pour celle des informations. Prenant l’ascenseur (et le galon vient avec), en reconnaissance de ses brillantes prestations, il gagne la confiance de la hiérarchie et devient sous-directeur. De fil en aiguille, il est affecté à la présidence de la République et devient chef de l’équipe de reportage. A ce propos, je me rappelle une indiscrétion à la suite de sa nomination au service de presse de la présidence. On a rappelé au maréchal Mobutu qu’il était muluba. Ce qui, en ce temps-là renvoyait à l’appartenance éthique de l’opposant farouche à son régime, Etienne Tshisekedi. Et Mobutu en rigolant répondit : « Il sera vite exorcisé… ». Tharcisse Kasongo Mwema ne s’est pas départi de son flegme et sa sérénité a fait le reste. Là encore, il s’impose par sa faconde (élocution facile) rendant attractifs ses reportages.
Après le discours de l’ouverture du 24 avril 1990, il signe une pétition avec ses confrères pour exiger la liberté d’information. Ça lui a coûté son poste. En 1992, le voilà qui quitte le pays et s’en va en France. Quelque temps après, ses états de service lui ouvrent les portes de RFI où il présente l’Édition Afrique à la grande satisfaction de tout le monde et devient la fierté des congolais. Sa présentation captive et invariablement les Africains l’adoptent.
En 2008, il quitte Paris pour enseigner et faire des recherches à l’Université de Lubumbashi. Quatre ans plus tard, c’est-à-dire en 2012, le gouverneur de la Banque centrale de la RDC, Jean-Claude Masangu, décide de lancer une télévision dans la capitale du cuivre et fait appel à son expertise pour mettre sur pied RTK (Radio Télé Kyondo). Je le retrouve en 2013 travaillant en étroite collaboration avec Charles Dimandja Wembi, son adjoint, avec qui il a fait les beaux jours de la Voix du Zaïre.
En ma qualité de Conseil en communication de Gécamines à l’époque, j’avais collaboré avec RTK pour la diffusion des campagnes d’entretien de l’image de cette entreprise minière.
Depuis, je l’ai perdu de vue jusqu’au 29 avril 2019 lorsque j’apprendrais par la RTNC sa nomination en qualité de porte-parole du chef de l’Etat après 48 ans de métier.
Agé de 68 ans, Tharcisse Kasongo est marié à Mbungu Tshibangu, une ancienne journaliste et collègue de l’ex-OZRT. Comme d’habitude, de retour presque à la télévision, il y a un an, on le revoie faisant les compte-rendu des décisions de la présidence de la République (ordonnances présidentielles et autres), je me suis dit intérieurement : « voilà que tu as récupéré ta place de présentateur-vedette laissée vacante. Ça nous a manqué longtemps. Repose en paix ! ».
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Roger DIKU
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