Par : Paulina Zidi
Après les États-Unis, la France a demandé au Rwanda de se retirer du territoire congolais. Le 20 février, un communiqué du ministère français des Affaires étrangères a en effet appelé le « Rwanda à cesser tout soutien au M23 » actif dans l’est de la RDC. Un durcissement de ton vis-à-vis du régime de Paul Kagame. Que peut-on attendre pour la suite ?
Quasiment coup sur coup, les États-Unis puis la France ont condamné le soutien du Rwanda au groupe armé M23 qui sévit dans le Nord-Kivu. Pour la première fois, les deux pays ont demandé au Rwanda de « retirer ses troupes du sol congolais ». Une reconnaissance de fait de la présence militaire rwandaise en RDC. Une présence étayée depuis plusieurs mois par plusieurs rapports du groupe des experts des Nations unies.
Du côté de la diplomatie français, on explique ce changement de ton par la dernière montée de tension dans la zone et par l’intensité nouvelle des combats dans les environs de Sake, dans le Masisi, à une trentaine de kilomètres de Goma. Des combats qui ont provoqué de nouveaux mouvements de population aggravant la crise humanitaire déjà aiguë dans la région.
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Du côté de la diplomatie français, on ajoute aussi que certes Paris condamne le soutien du Rwanda au M23, mais qu’elle demande aussi aux forces armées congolaises d’arrêter leur collaboration avec les FDLR, les miliciens hutus rwandais des Forces démocratiques de libération du Rwanda.
Pas de sanction au programme
Concernant les sanctions, il y en a déjà qui ont été prises et qui visent des membres du M23, sanctions prises par l’Union européenne, les États-Unis ou encore récemment les Nations unies. Il y en a aussi qui visent des membres des FDLR et d’autres groupes armés, ADF notamment, qui sont présents à l’est de la RDC. En revanche, ce que les autorités congolaises demandent depuis plus d’un an, ce sont des sanctions économiques contre le Rwanda et contre les responsables rwandais cités dans les rapports des experts des Nations unies. Une étape que la communauté internationale ne semble pas prête à franchir.
La question a été posée directement au quai d’Orsay qui explique que ce n’est pas une question taboue, mais que ce n’est pas au programme. La France mise plutôt sur une solution diplomatique à ce conflit. « Les sanctions sont utilisées quand il y a une escalade et que l’on veut envoyer un message fort », explique le porte-parole adjoint du ministère français des Affaires étrangères, Christophe Lemoine. Et il ajoute que la France, de toute façon, ne prend pas seule des sanctions ; cela se fait soit dans un cadre européen, soit dans le cadre des Nations unies. À ce stade, la question n’a pas été abordée.
Pas de condamnation des pays africains
Est-ce que d’autres pays vont emboîter le pas aux États-Unis et à la France ? Il va falloir scruter de près la réaction de l’Union européenne. Il faut, en effet, rappeler que le Parlement européen a déjà plusieurs fois condamné le rôle du Rwanda dans l’est de la RDC.
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Et il faut aussi observer la partition que vont jouer les pays africains. Pour l’instant, peu de pays du continent ont tapé du poing sur la table concernant le Rwanda et son action dans l’est de la RDC. Ces derniers temps, le Burundi et son président ont plusieurs fois interpellé Paul Kagame, le chef de l’État rwandais, l’accusant de déstabiliser la région des Grands Lacs. Mais, du côté de l’Union africaine, si on s’inquiète régulièrement des conflits dans l’est de la RDC et de la situation humanitaire, on n’a jamais pointé les responsabilités.
Article à lire sur : RDC : des sanctions sont-elles possibles après les condamnations de Paris envers le Rwanda ? https://www.rfi.fr/fr/afrique/20240222-rdc-des-sanctions-sont-elles-possibles-après-les-condamnations-de-paris-envers-le-rwanda