La reprise programmée le 08 septembre courant des négociations à Luanda entre la RDC et le Rwanda s’annonce dans un climat de scepticisme ambiant pour un aboutissement heureux. Surtout lorsque l’on sait de quelle manière a été révoqué illico presto Serge Tshibangu Kabeya, Haut Representant pour le suivi de la Feuille de route de Luanda et du Processus de Nairobi depuis des années. Le négociateur en chef congolais ayant été remplacé sur le champs par Sumbu Sita Mambu en qualité du nouveau Haut Representant pour le suivi de la Feuille de route et des Organisations Économiques Régionales.
Tous croient au processus de Luanda sans y croire vraiment. Mais ils y vont à la manière de l’aveugle et le paralytique. Kigali a clairement donné sa position, mieux renouvelé sa position sur le compromis qui devrait aboutir à la paix. Des compromis de Kigali qui prennent le vrai visage des compromissions si Kinshasa les accepte.
En clair, « Tel qu’il est actuellement conçu, le processus de Luanda va prolonger le conflit entre Kigali et Kinshasa au lieu de le résoudre. Et le risque des affrontements n’est pas écarté », déclare un diplomate occidental.
Pour Kigali, le compromis pour une paix qu’il n’a jamais goûtée depuis 30 ans et qui constitue le casus belli repose sur trois facteurs essentiels et non négociables, à savoir la question des réfugiés présumés Tutsis congolais se trouvant au Rwanda, la question des populations Hamites et enfin la problématique des FDLR.
A ce stade comme il y a trente ans, la RDC et le Rwanda se comportent en pyromanes. Personne de deux n’a la solution aux problèmes. L’avantage du Rwanda repose sur le fait qu’il a ses hommes armés sur le sol congolais et ses Hutu FDLR qu’il souhaite à tout prix les voir disparaître tout en les utilisant dans de sales besognes.
Question : Comment Kigali qui fabrique des rébellions au Congo peut-il accepter de retirer ses troupes (et donc de mettre fin à des rébellions rwandaises au Kivu) sans aucune garantie ?
Parlant de garantie dont Kigali n’a pas besoin, tout tourne autour du manque de volonté manifeste de la part du Rwanda d’aboutir à une solution de paix durable dans la région. Il serait naïf de croire qu’un régime qui a pris le pouvoir par la violence puisse vouloir la paix surtout dans le cas du Rwanda où la lutte pour le pouvoir et la survie politique reposent sur la violence et la soumission d’une ethnie à l’autre et vice-versa.
Comment peut-on faire confiance à un régime qui a résolument refusé de trouver des solutions internes à la base de la violence dans la région ?
La politique du talk and fight chère à Kigali
La solution pacifique n’a jamais été la préoccupation de Paul Kagame qui expérimente depuis cinq décennie l’option militaire. Le pouvoir de Kigali, à la suite de son parrain de Kampala, utilise toujours cette politique pour gagner du temps et la guerre.
En 1986, les maquisards de Kaguta Yoweri Museveni ont profité de talk and fight pour s’emparer du pouvoir à Kampala alors qu’il y avait des négociations à Nairobi.
En 1993, le FPR profitera aussi de l’accalmie qui régnait durant les négociations d’Arusha en Tanzanie et de son avantage sur le terrain pour s’armer et préparer une offensive finale jusqu’à la prise du pouvoir à Kigali avec les assassinats des présidents Juvénal Habyarimana et Ntaryamira du Burundi.
Cette politique du « talk and fight » édictée par Mao consiste à consolider le front militaire tout en faisant semblant de négocier politiquement dans des hôtels de luxe.
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Pour tester la bonne foi de Kigali à s’inscrire dans une logique de paix dans la région, il faut nécessairement lui imposer l’instauration de l’État de droit au Rwanda, la réconciliation nationale entre Rwandais ainsi que la démocratie. Le pouvoir Kagame a hermétiquement fermé l’espace politique rwandais à une catégorie de son peuple désigné par « génocidaires » FDLR.
Sans prendre en compte cette donne, les négociations de Luanda se feront dans l’ignorance totale de la logique qui doit conduire toute négociation, à savoir les deux parties doivent être à peu près dans les mêmes conditions.
Le manque de clarté sur l’identité des FDLR, combiné à l’incertitude quant au retrait des RDF des localités occupées sur le sol congolais, met la RDC dans une position vulnérable.
Et il y a à craindre que la RDC subisse la pression occidentale notamment des États-Unis l’obligeant à accepter les résultats de la négociation faussée dès le départ et le compromis genre compromission qui en sortirait. Il faut se préparer à la reprise de la guerre dans les jours à venir.
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Mathias Ikem