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Faire face à la puissance médiatique qui manipule les faits en RDC (Tribune)

Par benjaminlitsani 5 janvier 2025

Dans cet éditorial incisif, Litsani Choukran démonte les mécanismes d’une désinformation orchestrée autour de l’offensive du M23, dévoilant le rôle insidieux de certains médias internationaux dans la manipulation de l’opinion publique. À travers l’exemple d’une dépêche de l’AFP affirmant que les rebelles auraient pris une « ville-clé » dans l’Est du Congo, l’auteur révèle comment des erreurs ou des exagérations journalistiques peuvent devenir des armes de guerre psychologique, menaçant la cohésion nationale et la souveraineté de la RDC. Plus qu’une simple critique médiatique, ce texte est un appel à la vigilance et à la riposte face aux tentatives de déstabilisation du Congo.

Le dimanche 5 janvier 2025, une dépêche de l’Agence France-Presse (AFP) tombe. Une brève, lapidaire, qui traverse les rédactions du monde entier : « La rébellion du M23 s’empare de la ville-clé de Masisi, dans l’Est de la RDC. » Une affirmation qui, à première vue, peut sembler anodine. Une information de plus dans le flux constant des nouvelles qui relatent les conflits sur le continent africain. Pourtant, dans un pays en guerre, ce genre de déclaration n’est jamais anodin. Les mots choisis, les images évoquées, les perceptions façonnées… tout cela a un impact direct sur la psyché d’une nation meurtrie et sur la manière dont le monde perçoit sa réalité.

Pour précision, Masisi Centre, dont il est ici question, n’est pas une « ville-clé », comme le prétend cette dépêche. Il s’agit d’une localité, un chef-lieu du territoire de Masisi. En 2018, cette commune rurale comptait précisément 18 708 électeurs enrôlés, et en 2019, elle disposait de sept conseillers municipaux. Nous sommes bien loin de l’image d’une grande métropole stratégique que l’on pourrait imaginer en lisant cette dépêche. Mais pourquoi cette erreur, ou plutôt cette falsification, est-elle si grave ? Parce qu’elle vient d’une agence de presse de l’envergure de l’AFP.

La puissance de l’AFP : un écho mondial difficile à contrer

Fondée en 1835, l’Agence France-Presse est l’une des plus anciennes et des plus influentes agences de presse au monde. Elle dispose de bureaux dans 151 pays, y compris à Kinshasa, et emploie plus de 2 400 journalistes. Chaque jour, des millions d’articles, de dépêches et de reportages diffusés à travers les médias internationaux s’appuient sur ses informations. L’AFP est une véritable colonne vertébrale de l’information mondiale.

Lorsque l’AFP diffuse une information, celle-ci est automatiquement reprise par les grandes chaînes de télévision, les journaux papier, les radios, et les plateformes numériques de nombreux pays. Peu de rédactions prennent le temps de vérifier ces dépêches, car la réputation de fiabilité de l’AFP est censée être inébranlable. Ainsi, une erreur, une exagération, ou une simplification dans une dépêche de l’AFP peut rapidement devenir une vérité mondiale difficile à contester.

C’est exactement ce qui s’est produit avec cette dépêche sur Masisi. En qualifiant une petite localité rurale de « ville-clé », l’AFP contribue à créer un récit alarmiste, faisant croire à une avancée spectaculaire de la rébellion du M23. Cette désinformation n’est pas sans conséquences. Elle sape la confiance du peuple congolais dans la capacité de ses dirigeants à défendre le territoire national. Elle alimente la peur, la désillusion et la division au sein de notre société. Et elle façonne, à l’international, l’image d’un État congolais en déroute, incapable de contenir une rébellion. Cette dépêche est systématiquement reprise par des médias comme France 24, RFI, Jeune Afrique, sans vérification aucune, ni même une remise en cause.

Une participation active à la cause de l’agression

L’offensive du M23 n’est rien d’autre qu’une sombre mélodie de chantage orchestrée par le Rwanda, un écho d’ambitions troubles qui résonne dans les vallées de nos souffrances. Chaque territoire arraché à notre terre est un pion sur leur échiquier de pression. Chaque village tombé sous leur joug est une note dissonante jouée pour nous forcer à signer des accords qui ne servent que leurs intérêts, au mépris de notre souveraineté.

Mais ce qui frappe davantage, c’est cette danse perverse de certaines voix médiatiques, financées à coups de millions d’euros, se livrant à la falsification et à la manipulation des faits. Ces médias, qui auraient dû être les gardiens de la vérité, se muent en instruments de déstabilisation, amplifiant à outrance les conquêtes du M23 pour plonger notre peuple dans le doute et la peur. Cette activité insidieuse n’est pas une simple erreur éditoriale — c’est une arme. Une arme dirigée contre notre Nation, contre notre cohésion, contre notre dignité.

Les mécanismes de la manipulation : un plan savamment orchestré

La manipulation que nous subissons ne relève pas du hasard. C’est une stratégie pensée, articulée, et exécutée par divers acteurs opérant dans les médias internationaux et locaux, avec pour finalité de légitimer l’agression contre la République Démocratique du Congo. Cette entreprise de désinformation s’articule autour de plusieurs mécanismes qui, une fois combinés, rendent l’agression non seulement visible sur le terrain militaire, mais surtout acceptable dans l’opinion publique internationale.

1. La falsification des faits par des médias internationaux influencés par leurs chancelleries
Les grandes rédactions internationales qui rapportent les événements dans notre pays ne sont pas toujours neutres. Leurs lignes éditoriales sont souvent influencées par les politiques étrangères de leurs États, eux-mêmes engagés dans des relations stratégiques avec le Rwanda. Certains de ces États occidentaux, ayant des intérêts économiques dans la région, ferment les yeux sur les atrocités commises par le M23 et soutiennent indirectement l’agresseur à travers des partenariats économiques ou des financements militaires déguisés.

Ces médias reçoivent des consignes implicites de leurs chancelleries : minimiser la responsabilité du Rwanda, occulter le pillage de nos ressources, et présenter le conflit sous l’angle d’une instabilité interne propre à la RDC. Les territoires pris par le M23 sont ainsi grossièrement exagérés dans les reportages, faisant croire que notre pays est à l’agonie, incapable de se défendre. Cela sape notre moral national et renforce la pression internationale sur nos autorités.

2. L’emploi de correspondants biaisés ou liés à l’agresseur

Nombre de médias internationaux emploient des correspondants sur le terrain qui ne sont pas des observateurs neutres, mais des relais d’une propagande savamment orchestrée. Certains de ces journalistes sont en réalité proches de réseaux liés à l’agresseur. Ils ne rapportent pas la réalité des faits, mais des récits façonnés pour servir les intérêts de ceux qui les emploient.

Ces correspondants, qui devraient être des témoins impartiaux, deviennent des acteurs de la manipulation en diffusant des récits qui banalisent la souffrance de notre peuple tout en légitimant les actions du M23. Ils faussent les chiffres, amplifient les « victoires » de l’ennemi, et relativisent les pertes humaines que nous subissons. Chaque mot, chaque image devient une arme pour alimenter la désinformation.

3. L’implication d’acteurs médiatiques locaux à des fins politiciennes

Le poison de la désinformation ne vient pas uniquement de l’extérieur. Certains acteurs des médias locaux, animés par des ambitions politiques ou des règlements de comptes personnels, participent également à cette campagne de manipulation. Par antinomie au pouvoir en place, ces journalistes ou commentateurs mélangent la lutte contre le régime de Félix Tshisekedi avec la question vitale de la survie de notre nation face à l’agression rwandaise.

Ces voix locales, au lieu de défendre l’intégrité territoriale et la souveraineté du Congo, contribuent à fragiliser le front intérieur en alimentant les divisions. Ils propagent des récits qui affaiblissent le moral de nos forces armées et sèment le doute sur la légitimité de notre effort de guerre. Ils confondent la critique politique légitime avec la subversion au profit de l’ennemi.

4. L’utilisation de la peur et du doute comme armes psychologiques

Les récits exagérés et biaisés diffusés par ces médias ne visent pas uniquement à influencer les décideurs internationaux. Ils sont avant tout une arme psychologique destinée à démoraliser la population congolaise et à briser notre cohésion nationale. Chaque reportage qui magnifie les avancées du M23 ou sous-entend l’impuissance de notre gouvernement participe à cet objectif. Il s’agit d’instiller l’idée que la résistance est vaine, que la victoire est impossible. La peur s’installe alors dans les cœurs, le doute envahit les esprits, et la division s’insinue au sein de la Nation. C’est là le but ultime de cette manipulation : affaiblir le Congo de l’intérieur pour le rendre incapable de se défendre contre les agressions extérieures.

Face à la manipulation, l’heure est à la riposte nationale

Nous ne minimisons aucune perte, aucun centimètre de cette terre sacrée, car chaque village conquis par l’ennemi est un cri d’alarme. Chaque maison abandonnée, chaque vie brisée est une blessure ouverte dans le cœur du Congo. Mais nous savons que la guerre ne se gagne pas seulement sur le front. Elle se gagne aussi dans les esprits. Et aujourd’hui, notre cohésion nationale est la première cible de cette guerre médiatique. La désinformation est un poison qui s’infiltre dans nos veines pour paralyser notre résistance.

Face à cette menace existentielle, le silence est une trahison. La passivité est une abdication. Nous devons riposter, non seulement avec les armes, mais aussi avec la vérité. Il est impératif d’agir, d’élever nos voix contre ces campagnes insidieuses qui menacent l’existence même de notre État. Le Congo ne peut, ne doit et ne laissera plus faire.

Le monde doit savoir que derrière les statistiques se cachent des vies. Derrière chaque titre mensonger se cache une volonté de nous briser. Mais le Congo est une nation d’héritiers de luttes, forgée dans le feu des épreuves. Et dans nos cœurs brûle encore la flamme indomptable de notre dignité. Il est temps de se tenir debout. Il est temps de dire : Assez.

Article à lire sur : Faire face à la puissance médiatique qui manipule les faits en RDC (Tribune) https://beto.cd/grand-angle/lefonde/2025/01/05/faire-face-a-la-puissance-mediatique-qui-manipule-les-faits-en-rdc-tribune/

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