C’est une sortie médiatique dont il se serait épargné pour ne pas paraître ridicule mais il l’a tout de même fait. Lui, c’est Paul Kagame, l’autocrate président rwandais qui s’est une fois de plus illustré lors de sa conférence de presse dite « Déjeuner diplomatique » cette semaine qui s’achève.
Devant un parterre médusé des diplomates et journalistes et dans une escalade verbale qui se déroule sans fin entre le Rwanda et la RDC sur fond des accusations congolaises de pillage de l’Est du pays, le rwandais s’en est pris sans coup férir à la légitimité de son homologue congolais Félix Tshisekedi qui lui résiste : « La personne dont je parle et qui cause des problèmes entre le Rwanda et la RDC n’a jamais été par deux fois élue. Cet homme Tshisekedi n’a jamais été élu et vous le savez… » déclarait il urbi et orbi.
Dans son injustifiable, on sent bien cette « excitation désordonnée », cette « nervosité » ; bref cette « agitation » d’un homme désorienté face au Président Félix Tshisekedi qui grâce à un changement de narratif, l’a fait désigner aujourd’hui comme le vrai agresseur de la RDC ; les évidences en sa défaveur s’accumulant chaque jour contre son « aventure » en RDC qui tend vers sa fin inéluctable malgré le temps qu’elle dure depuis 30 ans déjà.
Les propos du président rwandais qui n’ont pas laissé indifférent le web congolais n’ont fait que remarqué enfin la sortie du bois du vrai instigateur du désordre contre Kinshasa : Kagame apparaissant en personne ainsi au grand jour comme étant le vrai porte-parole de cette faible opposition de la 25ème heure dont on savait d’où venait son discours dicté de l’étranger. Kagame s’arrogeant de plus le rôle de son nouveau protégé Corneille Nangaa Yobeluo, ancien président de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) de la RDC devenu rebelle.
A lire aussi : RWANDA : La peur a changé de camp, Kagame joue avec la mémoire de son peuple [ANALYSE] https://www.afriwave.com/2024/12/16/rwanda-la-peur-a-change-de-camp-kagame-joue-avec-la-memoire-de-son-peuple-analyse/
Si hier encore sous le régime Joseph Kabila le Rwanda imposait son dictat à Kinshasa pour des négociations avec les groupes armés initiés par Kagame à l’instar du Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RCD-Goma) ce groupe rebelle actif dès 1998 par lui porté dans l’Est du pays qui fut l’un des acteurs majeurs de la deuxième guerre du Congo, mais aussi le Congrès National pour la Défense du Peuple (CNDP) créé en juillet 2006 par Laurent Nkundabatware Mihigo avec pour objectifs la défense de la communauté tutsie ; il n’en est plus question aujourd’hui face à l’intransigeant Tshisekedi. « Pas de brassage ni mixage » avec l’intégration des insurgés fabriqués dans l’armée, la police ou les services de l’Etat, « pas de dialogue » non plus avec des terroristes dit Félix Tshisekedi.
De « l’autocrate » Kagame, parlons-en…
Réélu avec plus de 99 % des voix au sortir du dernier scrutin présidentiel rwandais du 15 juillet 2024, Paul Kagame se croit un « démocrate » mais qui en réalité est un vraie autocrate despote. Il a réalisé un score encore supérieur à ses 98,79 % de la présidentielle 2017, après avoir déjà obtenu 95,05% des suffrages en 2003 et 93,08 % en 2010.
Âgé de 67 ans, né le 23 octobre 1957, ce natif de Tambwe à Ruhango près de Gitarama, dans le territoire du Ruanda-Urundi sous tutelle belge (aujourd’hui le Rwanda) ; Paul Kagame tient fort le Rwanda depuis qu’il a renversé par les armes avec la rébellion tutsi du Front Patriotique Rwandais (FPR), le pourvoir hutu d’alors avec à la clé l’assassinat le 06 avril 1994 de deux chefs de l’Etat, Juvénal Habyarimana du Rwanda et Cyprien Ntaryamira du Burundi.
D’abord vice-président et ministre de la Défense mais dirigeant de fait du pays, il en devient le président en 2000 lorsqu’il est élu par le Parlement après avoir poussé à la démission le Pasteur Bizimungu. Par la suite, il est désigné à trois reprises au suffrage universel. Crédité du spectaculaire redressement économique du Rwanda après le génocide avec la rapine des ressources minières de l’Est du Congo, il est aussi critiqué pour le manque d’ouverture démocratique dans le pays. Il prolonge de cinq ans son règne entamé il y a 30 ans. Aucune élection libre et transparente depuis qu’il règne d’une main de fer sur le petit pays dont il a modifié la constitution pour se maintenir ad vitam aeternam au pouvoir depuis 30 ans déjà.
Quid d’une opposition inexistante
Avec une vraie opposition absente, il faut rappeler quelques cas de ceux qui ont osé défier le « maître » de Kigali. Evoquons ici la candidature de Victoire Ingabire rejetée avec une fallacieuse condamnation, en 2013, à quinze ans de prison pour « minimisation du génocide » et déchéance de ses droits civiques. Tout comme celle de Diane Shima Rwigara, fille d’Assinapol Rwigara, entrepreneur rwandais et ancien financier de Kagame et du FPR décédé en février 2015lors d’un accident de la route, selon la police ; mais dont la femme et les enfants contestent la version accidentelle et dénoncent un « assassinat ». Femme d’affaires et militante féministe rwandaise, elle s’était présentée en tant que candidate indépendante à l’élection présidentielle rwandaise de 2017 avant de se voir invalidée en raison de documents non conformes jugés falsifiés. Les deux « femmes de fer » arrêtées et incarcérées, ont été respectivement libérée pour Ingabire et blanchie par la justice pour Rwigara en 2018.
Aux yeux de beaucoup, Kagame n’en demeure pas moins comme l’homme de l’étouffement de toutes voix dissidentes en dehors de la tienne et de son clan. Avec la multiplication des critiques sur un régime répressif et des contraintes à l’exil des opposants comme des journalistes, un autre cas emblématique est celui de Paul Rusesabagina, patron hutu de l’Hôtel Mille Collines durant le génocide qui sauvera un millier de Tutsi -épisode qui a inspiré le film « Hotel Rwanda ». Cet opposant en exil a été arrêté en 2020 à Kigali, à la descente d’un avion qu’il pensait à destination du Burundi. Le gouvernement rwandais a reconnu avoir financé l’opération de son enlèvement. Condamné à 25 ans de prison pour « terrorisme » présumé, il avait fini par bénéficier d’une grâce présidentielle du dictateur sur des fortes pressions diplomatiques des Etats-Unis.
A lire aussi : Paul Rusesabagina, l’opposant et héros de « Hôtel Rwanda », est aux États-Unis après sa libération https://www.afriwave.com/2023/03/30/paul-rusesabagina-lopposant-et-heros-de-hotel-rwanda-est-aux-etats-unis-apres-sa-liberation/
Alors que le dernier rapport de l’ONU confirme une fois de plus l’implication de son pays dans les violences armées qui s’éternisent dans l’Est de la RDC avec comme objectif premier le pillage des ressources minières de son géant voisin, le rwandais ne s’est pas fait prier deux fois pour encore une fois justifier son action de brigandage accompagné de violences ; notamment son comportement prédateur via la guerre par procuration de la Rwanda Defence Force (RDF), l’armée rwandaise avec ses complices terroristes dits M23.
Depuis 2012, après les premières accusations de son soutien au M23, ses alliés occidentaux ont commencé à durcir le ton et réduire leurs aides même si d’autres restent encore en place comme celle de l’Union européenne par son chantage comme pays contributeur en militaires et casques bleus qui jouent un rôle sécuritaire sur le continent en Centrafrique et au Mozambique par exemple.
Malgré un soutien sans faille encore pas pour très longtemps de la France, du Royaume Uni qui semble le lâcher avec l’arrivée au pouvoir des Travaillistes et des Etats Unis d’Amériques, Paul Kagame n’en demeure pas moins l’un des dirigeants les plus clivants du continent africain. Serait-il aujourd’hui devenu un « démocrate » donneur de leçons qui s’en prend au Chef de l’Etat Congolais Félix Tshisekedi qui lui tient tête ? La réponse est NON, car aucune élection libre et transparente n’a jamais été organisée depuis qu’il règne d’une main de fer sur son petit pays dont il a modifié la constitution pour se maintenir ad vitam aeternam au pouvoir depuis 30 ans déjà.
Qu’on se le dise !
Roger DIKU et Thaddée Luaba Wa Ba Mabungi pour afriwave.com
Par : RFI Avec notre correspondant à Kinshasa, Patient Ligodi Arrêté en mars 2005 par les…
Nous sommes dans la province de l’Equateur, à quelques encablures de son chef-lieu Mbandaka où…
Source : AFP Oliviero Toscani, le photographe italien célèbre pour son œuvre aussi culte que controversée…
Par Dominique Xavio Tshimanga Qu’a dit Alain Juillet que les congolais n’ont pas dit ou…
Par Afp Muhoozi Kainerugaba, chef de l'armée ougandaise et fils du président Yoweri Museveni, a…
Dans un article récent publié dans le newtimes.co.rw [https://www.newtimes.co.rw/article/23203/opinions/a-lesson-on-the-genocide-fax-a-wake-up-call-for-2025], l’auteur tente de redéfinir le conflit en…