Vidéo « Solo ya détournements », la guerre de l’information entre manipulations et désinformation

Une vidéo a fait un « véritable buzz » cette semaine dans les arcanes politiques kinoises montrant un échange inattendu entre la Première Ministre Madame Judith Suminwa Tuluka et le Ministre d’Etat, Ministre de la Justice et Garde des sceaux Constant Mutamba Tungunga.

Cette joute verbale montée sciemment entre la Cheffe du gouvernement et son ministre rappelle tout de même cette autre réelle qui s’est passé dans le Bureau Ovale de La Maison Blanche à Washington la semaine dernière. Le président américain Donald Trump Jr secondé de son vice-président JD Vance s’empoignaient avec le chef de l’Etat ukrainien Volodymyr Zelensky à propos de l’aide américaine à l’Ukraine depuis son invasion par la Russie de Poutine.

Entre la Première Ministre et son Ministre d’Etat en charge de la Justice et Garde des Sceaux, il était question de l’odeur de détournements des deniers publics (Solo ya détournements) de l’argent de l’Etat, un de ces cancers endémiques qui gangrènent toutes les couches de la société congolaise sans épargner la politique et contre lequel Constant Mutamba s’est érigé en « chevalier blanc ».

Après plusieurs visionnages, je me permets d’intervenir concernant cette vidéo qui a circulé sur les réseaux sociaux et partagée avec une légende délibérément trompeuse.

Après une analyse approfondie du contenu et une vérification croisée auprès des personnes présentes lors de l’évènement, il s’avère qu’il s’agirait probablement d’un montage sophistiqué mais fallacieux. Une manipulation qui s’inscrit dans une stratégie de désinformation délibérée, visant à déstabiliser les institutions de la République et la cohésion nationale vitale dont la pays a grandement besoin en ce moment particulier de son existence.

D’après le communiqué officiel des services rattachés au Ministre Constant Mutamba, les discours prononcés par la Cheffe du gouvernement et les membres du gouvernement présents avaient une orientation constructive et pédagogique, spécifiquement adaptée à un public jeune. La décontextualisation de ces propos révèle une intention malveillante caractéristique des tactiques employées par le M23 et ses soutiens (le poison rwandais, l’empire du mensonge).

Il nous revient à propos, qu’une « injonction de poursuite contre les auteurs et diffuseurs de ce contenu médiatique frauduleux sera adressée au Procureur Général près la Cour de Cassation », une mesure nécessaire face à ces attaques informationnelles.

Dans le contexte actuel, la Rwanda Defence Force, l’armée rwandaise ; son « proxy » rebelle terroriste armé dit M23 et leurs alliés ont développé une stratégie de déstabilisation qui dépasse le cadre militaire conventionnel. Leurs opérations de guerre informationnelle (ou médiatique) visant plusieurs objectifs stratégiques clairement identifiables :

1. Affaiblir la confiance des Congolais envers leurs institutions en créant artificiellement des polémiques et des scandales. Cette tactique visant à éroder le contrat social et à fragmenter l’unité nationale.

2. Créer des divisions internes et des fractures communautaires en amplifiant les tensions ethniques (rappelons-nous du dossier « menaces sur les swahiliphones » inventé à Kinshasa et relayé sans preuves par l’Eglise catholique) et politiques préexistantes. Le M23 exploite ces divisions pour présenter son action comme une réponse à des injustices plutôt que comme une agression extérieure.

3. Générer un sentiment de défaitisme et d’impuissance au sein de la population congolaise. En diffusant des récits alarmistes et en amplifiant des échecs isolés, l’ennemi cherche à saper le moral national et à créer une prophétie auto-réalisatrice d’échec.

4. Tester les réactions populaires et institutionnelles pour identifier les vulnérabilités et ajuster leurs stratégies. Chaque fausse information devient ainsi un outil de renseignement sur les processus décisionnels des autorités.

Nul n’est sans ignorer que les opérations d’influence des rebelles armés du M23 s’appuient sur un réseau de relais médiatiques, de comptes anonymes (trolls) sur les réseaux sociaux et parfois même d’influenceurs locaux manipulés et/ou cooptés. Ces acteurs diffusent des narratifs soigneusement élaborés qui servent les intérêts géopolitiques et économiques de ceux qui convoitent les ressources naturelles de la RDC.

A lire aussi : L’Armée numérique rwandaise dans la désinformation et les « Fake news » https://www.afriwave.com/2023/10/12/larmee-numerique-rwandaise-dans-la-desinformation-et-les-fake-news/

L’incident de la fausse note attribuée à la DGRNK concernant la taxation des produits en provenance de Goma et Bukavu illustre parfaitement cette stratégie. En créant artificiellement des tensions économiques entre régions, l’ennemi cherchait à alimenter un sentiment d’abandon dans les zones sous son administration, démontrant ainsi sa mainmise sur ces territoires.

Dans ce contexte de guerre hybride, où le champ de bataille s’étend jusqu’à nos smartphones, la vigilance informationnelle devient un acte patriotique. Le M23 et ses soutiens comprennent que l’émotion court-circuite notre rationalité. Ils exploitent notre tendance naturelle à réagir impulsivement face à des contenus choquants ou indignants.

Pour contrer cette menace :

– Considérons chaque information virale comme potentiellement suspecte, particulièrement lorsqu’elle provoque une forte indignation,

– Vérifions systématiquement les sources et le contexte avant tout partage,

– Privilégions les canaux d’information officiels et les médias ayant démontré leur rigueur,

– Prenons conscience que partager une désinformation, même par indignation, sert les objectifs de l’ennemi.

Chaque citoyen congolais, en devenant un consommateur critique de l’information, participe à la défense de notre souveraineté nationale et de notre intégrité territoriale. Face à l’adversité, notre discernement collectif reste notre meilleure arme.

FNK