Quatre ans déjà depuis qu’Honoré Ngbanda Nzambo Ko Atumba dit « Honoré Atu », Président-fondateur de l’Alliance des Patriotes pour la Refondation du Congo (Apareco) est décédé le 21 mars 2021 au Maroc où il vivait en exil depuis des années. C’est le 30 avril 2021 qu’il fut officiellement conduit à sa dernière demeure en stricte intimité familiale dans les cimetières de Champigny-Sur-Marne, une commune en banlieue parisienne où il avait résidé un temps.
Depuis cette date et comme en ce mois de mars 2025, les « militants » de son mouvement ont commémoré les 4 ans de la disparition du feu leur Président National (PN) le samedi 22 mars 2025 à Paris en France où une gerbe de fleurs a été déposée sur sa tombe. Toutes les autres juridictions de l’APARECO dès par le monde ont passé une journée de méditation, soit en se rassemblant autour d’une prière, soit en organisant une messe ou un culte d’action de grâce en sa mémoire.
Concernant les futures commémorations, l’Apareco avait déjà décidé que désormais l’ensemble de ses membres descendront sur place à Paris pour un hommage à leur premier Président National tous les 5 ans. Les années intermédiaires se limiteront aux méditations et messes dans différentes juridictions à travers les cinq continents. Cependant tous les ans, seule l’Apareco France a mandat de déposer une gerbe de fleurs sur sa tombe.
En Belgique, une messe de suffrage en sa mémoire a été dite à Bruxelles, en la paroisse Notre-Dame Immaculée en présence des nombreux invités. Des témoignages y ont été rendus en présence et avec les interventions de l’actuel Président National, Monsieur Alphonse Ebama et du Secrétaire Général, Monsieur Dany Mabuki. Dans son allocution de circonstance à Bruxelles, le PN Alphonse Ebama a souligné « le combat de la résistance de son prédécesseur selon lequel qui n’avait qu’un objectif, se battre contre l’occupation de notre pays par le Rwanda et rechercher la paix au Congo ».
Ci-dessous, le discours complet du Secrétaire Général Dany Mabuki à cette occasion :
Une page qui s’est tourné, mais pour quel avenir ?
Si la disparition d’Honoré Ngbanda a été un choc pour les membres de son mouvement devenus orphelins d’un père fondateur, il y a eu lieu de se poser des questions sur son héritage et sur l’avenir du combat dans la diaspora extérieure du pays. Avec son décès au Maroc loin de son pays comme son mentor l’ancien président Mobutu Sese Seko Kuku Ngbendu Wa Zabanga dont il fut un des proches fidèles collaborateurs, c’est toute une page de l’histoire politique mouvementée du Congo-Zaïre qui se fermait.
Le décès de Ngbanda a aussi marqué la fin d’une autre histoire, celle de cette opposition politique radicale à l’extérieur du pays face aux régimes qui se sont succédés à Kinshasa depuis 1997 jusqu’à ce jour dont il incarnait la « résistance » au travers de son Alliance des Patriotes pour la Refondation du Congo (Apareco). Si pour les militants de son mouvement, il fut un vrai patriote résistant ; pour ses détracteurs, il aura laissé un souvenir mitigé dans l’opinion vue son passé d’impitoyable responsable des renseignements sous le règne de Mobutu.
L’on se rappellera qu’alors qu’il n’était même pas encore inhumé, des graves dissensions sont apparues au sein du Comité national avec la contestation des cadres contre la présidente ad intérim pourtant par eux choisie en la personne de Madame Candide Okeke. Cette désignation intervenait trois jours seulement après le décès d’Honoré Ngbanda au Maroc. « Pour vite palier à l’incertitude et dans la nécessité de « combler le vide au sommet de notre Mouvement de résistance, et aux termes de l’article 9 paragraphe 2 des statuts de l’Apareco devant la situation de crise créée suite à la disparition inopinée de son Leader et Président National, Monsieur Honoré Ngbanda Nzambo Ko Atumba » pouvait-on y lire dans un communiqué à l’issu d’un Comité National réuni le lundi 22 mars 2021 afin de traiter des questions urgentes.
Une situation qui n’augurait pas un avenir serein pour le mouvement politique dont Honoré Ngbanda aura consacré toutes les dernières années de sa vie. Et comme conséquence, cette fronde a fortement affaibli le mouvement, aboutissant aujourd’hui à deux ailes distinctes de la résistance extérieure qui se sont mêmes retrouvés devant les Cours et Tribunaux français pour savoir qui devrait assumer la légitimité de l’héritage de la figure tutélaire du mouvement fondé et incarné par Honoré Ngbanda. D’un côté l’APARECO (originelle) avec la majorité des membres du Comité National de l’époque d’Honoré Ngbanda aujourd’hui sous la présidence de Monsieur Alphonse Ebama, et de l’autre ; la Résistance Congolaise (RC) dit 100% Ngbandiste dirigée par Madame Okeke.
Lire aussi : RDC / APARECO : Contestation et fronde contre la présidente ai Candide Okeke https://www.afriwave.com/2021/04/10/rdc-apareco-contestation-et-debut-de-fronde-contre-la-presidente-ad-interim-candide-okeke/
Un homme d’exception ?
De l’homme de confiance de l’ancien Chef de l’Etat Zaïrois Mobutu dont le parcours terrestre s’est arrêté, l’on retiendrait qu’Honoré Ngbanda fut de tous les combats pour le maintien au pouvoir du dictateur : ex-chef des renseignements, ancien ambassadeur en Israël (1983-1985) et ministre de la Défense (1990-1992) ; Honoré Ngbanda fut également à d’innombrables reprises Conseiller spécial en matière de sécurité du même Mobutu dont certaines rumeurs non vérifiées disaient qu’ils étaient oncle et neveu.
Responsable de l’Agence Nationale de Documentation (AND) entre 1985 et 1990, aujourd’hui l’Agence Nationale des Renseignements (ANR) de triste mémoire, ce poste sécuritaire lui avait valu même le surnom de « Terminator » du fait de la froideur dans la répression de ses services face aux velléités de contestation du régime dans le pays. Ce natif de Lisala le 5 mai 1946 à Lisala dans l’ancienne province unifiée de l’Equateur comme son mentor Mobutu, le Chrétien Honoré Atu comme nous l’appelions à la Rédaction du Quotidien UMOJA de Kinshasa dans les années 1990 ; il demeurera l’un des personnes qui est resté fidèle au dictateur jusqu’à la fin brutale de son régime après 32 ans d’un long règne de terreur.
Ayant vécu en exil au lendemain de la chute de Mobutu en 1997 par sa fuite du pays sous les boutoirs des rwandais chaussés des bottes de caoutchouc de Laurent-Désiré Kabila, Ngbanda était visible par le Togo de feu Gnassingbé Eyadema et le Gabon d’Omar Bongo Ondimba ; deux pays dont il aurait même détenu un passeport diplomatique en un moment avant de se retrouver en France avec un passage à Abidjan, du temps de l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo. De ses multiples présences dans les capitales africaines, il disait mener des « activités de conseil auprès de chefs d’État du continent ».
A l’avènement de Félix Tshisekedi et la décrispation politique créée avec les retours au pays des opposants, on avait également cru en son retour ; une hypothèse qu’il avait carrément démentie en accusant le nouveau régime : « le contact téléphonique sollicité par François Beya avait plutôt pour but de le piéger, dans l’unique but de torpiller le combat de la Résistance en diffusant des fausses nouvelles annonçant son retour au pays, alors les conspirateurs ont manqué leur cible ! Car nous sommes en mesure de diffuser l’enregistrement intégral de cet entretien téléphonique de 3 minutes 49 secondes ». Un enregistrement dont on n’aura rien su jusqu’à son décès !
Lire aussi : RDC : Décrispation politique : Honoré Ngbanda dément son retour annoncé au pays et accuse… https://www.afriwave.com/2019/05/25/rdc-decrispation-politique-honore-ngbanda-dement-son-retour-annonce-au-pays-et-accuse/
Personnage énigmatique. Pour ses supporteurs proches, il a laissé l’image d’un « chrétien » et d’un « combattant » engagé pour la libération de son pays qu’il disait occupé par l’Ouganda et le Rwanda. Entouré d’un petit cercle de fidèles organisés et déterminés, il aura continué de propager ses théories du complot contre la RDC via les réseaux sociaux. De Laurent-Désiré Kabila à Félix Tshisekedi en passant par Joseph Kabila qu’il a présenté comme un « rwandais », Ngbanda ne s’était jamais accommodé avec personne jusqu’à son dernier souffle ; radicalisant son discours contre les régimes successifs de Kinshasa au point de friser carrément la paranoïa en les qualifiants de mèche avec les occupants.
Il restera finalement l’un des rares hommes politiques congolais ayant écrit plusieurs ouvrages touchant aussi bien à la situation sécuritaire de son pays, de l’Afrique Centrale que sur d’autres aspects du continent entre autres :
1. La problématique de la souveraineté dans les conférences nationales d’Afrique (Kinshasa 1993)
2. Afrique : démocratie piégée. Editions Équilibres Aujourd’hui, Condé-sur-Noireau (1994)
3. La transition au Zaïre : le long tunnel. Éd. Noraf, Kinshasa (1995)
4. Ainsi sonne le glas ! Les derniers jours du maréchal Mobutu. Éditions Gideppe, Paris, 1998
5. Crimes organisés en Afrique Centrale,66 avec la préface a été signée par Charles Onana
6. Stratégie du chaos et du mensonge-Poker menteur en Afrique des Grands Lacs. (Coécrit avec Patrick Mbeko), Edition de l’Érablière, Montréal (2014), etc.
L’on se rappellera que dans une fidélité jusqu’à la mort comme par un pacte de sang, Honoré Atu avait choisi de tirer sa révérence au Maroc où est décédé et enterré jusqu’à ce jour son mentor, le Maréchal Mobutu. Avec sa disparition, l’on se demande bien si son mouvement d’Apareco lui survivra ; tellement il en était l’incarnation au quotidien en même temps l’autorité morale indiscutable.
Fonctionnant dans un système de vase clos aux méthodes secrètes dignes des services de renseignements jadis dirigés par son fondateur, l’APARECO tente de se refaire ; et seul l’avenir nous le dira quant à son combat pour la libération du Congo-Kinshasa.
Dossier réalisé par Roger DIKU et TSHIKUYI TUBABELA (Bruxelles), Coordination de Thaddée Luaba Wa Ba Mabungi (Kinshasa, RDC) pour afriwave.com
