Prévu pour le mercredi 19 juillet 2017, le deuxième procès de Moïse Katumbi n’avait même pas encore commencé qu’un fait grave s’est produit. Une tentative d’homicide sur la personne de Jacques Mbuyi Lukaso ; un des magistrats devant siéger à la reprise de ce procès. Criblé de balles à son domicile la nuit de mardi à mercredi par des inconnus armés non autrement identifiés, l’homme de la loi serait entre la vie et la mort.
Images attaque contre le juge Mbuyi
Même si aucun lien formel entre cette attaque et le procès, il y a tout même lieu de s’en inquiéter avance une source proche du dossier. La présence de Joseph Kabila tout comme celle de son ministre de la Justice Thambwe Mwamba sur place à Lubumbashi étant vu comme une manière de faire pression sur les juges siégeant dans cette affaire explique une autre source proche de la magistrature.
C’est dans une ambiance délétère que s’est ouvert hier ce procès de l’opposant politique toujours en exil forcé et candidat déclaré à la présidentielle. Katumbi est jugé en son absence, en appel, par le Tribunal de grande instance de Lubumbashi. Aux incohérences soulevées par la défense qui estime ce procès politique pour la simple raison d’empêcher Katumbi de concourir à la présidentielle de fin d’année 2017 s’ajoutent les inquiétudes avec cette tentative d’assassinat d’un des juges.
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Si des milieux proches du pouvoir estiment ce procès une affaire privée entre deux justiciables, les soutiens de l’ancien gouverneur du Katanga dénoncent eux ce climat de peur qui s’est installé dans l’arsenal judiciaire du pays en général et celui en particulier en charge du procès Katumbi. Sindika Dokolo, un de ces proches twittait aujourd’hui même qu’: « On en vient à faire assassiner un juge dans un procès politique. Voulons-nous vraiment d’un tel Etat, d’une telle justice, d’un tel pays ? » comme pour condamner à son tour la responsabilité du régime de Kinshasa dans cette affaire.
Ainsi la défense de l’opposant a-t-elle soulevé plusieurs exceptions de procédure notamment la saisine du TGI de Lubumbashi au motif que la notification n’avait pas été envoyée en Belgique ou vit Moïse Katumbi pour l’instant, la récusation de la quasi-totalité des magistrats du TGI dont on doutait de leur impartialité ; procédures sommes toutes rejetés, mais aussi critiquées par les avocats du plaignant Stoupis.
Coup de théâtre du 20 juillet 2017
Coup de théâtre au TGI de Lubumbashi au deuxième jour du procès : ordonnant dans un premier temps la surséance à l’examen du dossier suite à l’exception d’inconstitutionnalité invoquée par la défense et se dessaisissant du dossier en deuxième temps pour une délocalisation à Kinshasa devant la Cour Constitutionnelle comme le réclamait les avocats de l’ancien gouverneur. Ce qui a fait dire à son porte-parole Olivier Kamitatu : « Chapeau bas aux juges qui ont résisté aux pressions et dit non à la pègre qui a attenté à la vie de leur collègue ! Des Congolais debout ! ».
Cette nouvelle donne permet ainsi à Katumbi de se pourvoir en cassation conformément à l’article 162 de la Constitution. Pour l’avocat de l’ancien gouverneur, le Bâtonnier Jean-Joseph Mukendi Wa Mulumba, « La décision du TGI est non seulement une victoire mais aussi un prestige pour le pays » tout en estimant que « la Cour s’attachera sur les exceptions soulevées » pour enfin dire la justice. Une question pourtant taraude les commentateurs : ce dépaysement du procès Katumbi-Stoupis à Kinshasa est-il un manœuvre du régime pour sortir la tête haute d’une affaire qui a longuement décrédibilisée la justice du pays d’être à la solde du pouvoir ?
Pour rappel, le 22 juin 2016, le tribunal de paix de paix de Kamalondo à Lubumbashi avait donné raison à Emmanuel Stoupis en condamnant Moïse Katumbi de faux et usage de faux dans l’acquisition d’un immeuble qui aurait dû revenir en héritage. Sentence à la quelle Katumbi avait fait appel tout en clamant son innocence. Le temps lui donnera une première victoire lorsque e quelques semaines plus tard, Chantal Ramazani Wazuri, la présidente du Tribunal de paix, se rétracte et exige le retrait de sa signature du jugement de condamnation : « J’ai signé sous la menace. Tout ça pour lui interdire de se présenter à l’élection présidentielle », explique-t-elle avant de s’enfuir en France où elle a obtenu l’asile politique.
De leur côté et dans le cadre de la recherche de la décrispation politique lors de la Négociation directe entre opposition et majorité, Les évêques de la CENCO avaient trouvé la condamnation de Katumbi comme une « mascarade ». En dehors du procès en cours, Moïse Katumbi est sous la menace d’un autre deuxième procès ; celui-là pour atteinte à la sûreté de l’État sur des présumées soupçons de « recrutement de mercenaires ». Nombre de ses anciens gardes du corps croupissent encore en prison à Makala à Kinshasa depuis plus d’un an sans qu’aucune condamnation ne sois prononcé contre eux.
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