Les enjeux politiques à venir pour fin 2017 et début 2018 jusqu’au-delà sont tellement grands que de la majorité au pouvoir comme au sein de son opposition, chacun affute ses armes. Une concertation nationale, deux dialogues et plus de trois ans après ; le pays se trouve toujours au même endroit. Trois gouvernements plus tard (Matata, Badibanga et Tshibala), aucune avancée visible.
Par contre, c’est une grave crise politique devenue institutionnelle avec le maintien de Joseph Kabila à la tête du pays dès la fin de son deuxième et dernier mandat constitutionnel le 19 décembre 2016. La situation allant s’empirer de jour en jour au risque de provoquer une déflagration du pays sur fond d’un marasme économique sans pareil.
Voulant comprendre le pourquoi de cette situation sans son pareil sous la deuxième République, www.afriwave.com a démarché pour finalement rencontré deux personnages clés du système actuel pour un regard croisé du moment. D’un côté un ancien mobutiste converti au kabilisme et de l’autre un jeune loup de la politique, tous deux membres du PPRD ; le parti présidentiel et tous deux membres de la Majorité Présidentielle (MP).
Si le premier souligne la chance que lui et ses collègues ont eu de « se faire recycler dans le kabilisme » et possède une large connaissance affirmée de la politique du pays ; le second et jeune loup politique parait désorienté, tellement ses arguments sont faibles et trahissant ses lacunes dans l’histoire politique du pays, n’ayant que la louange du nom du « raïs » dans sa bouche. A nos lecteurs de se faire leur idée sur ce regard croisé du Congo d’aujourd’hui et qui fut le Zaïre d’hier.
Pour des raisons de leur convenance personnelle, les deux rendez-vous ont eu lieu au même endroit mais à des jours distincts. Et c’est, au centre-ville de Kinshasa et dans un lieu symbolique fort prisé de la MP ; « La place des Evolués » où les rencontres ont été fixées. Nos deux interlocuteurs ont demandé l’anonymat de leurs propos et que leurs identités ne soient à jamais divulguées.
Dans la tête d’un mobutiste converti au kabilisme
« C’est une chance surprenante pour nous que d’avoir été récupérer par le système qui nous avez pourtant éjecté du pouvoir un matin du 17 mai 1997 ou encore bien avant cela avec le début de la guerre d’invasion du Rwanda depuis l’Est du pays » nous assène-t-il d’entrée de jeu. « Notre adhésion au système actuel n’est pas celui du cœur, mais celle d’une raison pour une survie en tant qu’individu vu ce que nous avions été durant le règne du MPR parti-Etat. Et Kabila nous a donné cette chance inouïe de recyclage en profitant de nous tout comme nous profitons de lui » poursuit notre interlocuteur.
Et l’opposition dans tout ça ? « Depuis 1990 et la tenue de la Conférence Nationale Souveraine (CNS) jusqu’à ce jour 27 ans après, l’opposition n’a jamais compris ses erreurs qui lui a fait échapper le pouvoir à maintes reprises. Après la mort de Tshisekedi, que reste-t-il encore de cette opposition-là ? Iléo Nsongo Amba, Lihau Ebua, Vincent Mbuankiem, Ngoma Ngambu pour ne citer que ceux-là sont tous morts sans goûter à ce pouvoir pour lequel ils se sont battus toute leur vie. Et je ne voudrais pas longuement revenir à certains d’entre-eux qui ont rejoint Mobutu, Kabila père ou encore Kabila fils : Jean Nguz, Bernardin Munguludiaka, Faustin Birindwa, Fréderic Kibassa Maliba, le vieil Antoine Gizenga…Samy Badibanga et Bruno Tshibala ; la liste est longue et c’est sans compter bon nombre des barons et autres conseillers de l’ancien régime à l’instar de feu Samba Kaputo, André Atundu Liongo etc. Léon Kengo et Mokolo Wa Mpombo se taisent tranquillement comme des carpes au sénat et vous ne les entendrez jamais pour n’en citer qu’eux ».
Quelle image garderez-vous alors d’Etienne Tshisekedi ? « Ce fut un grand homme pour qui j’ai un respect malgré nos divergences qui en réalité n’étaient qu’une question de survie pour nous à cause de son intransigeance depuis Mobutu, Laurent-Désiré Kabila et Joseph Kabila. Ce qui se passe depuis 9 mois après son décès est inacceptable du point de vue éthique tout comme humain. Il y a eu trop d’erreurs de gestion dans le dossier rapatriement de son corps pour des obsèques dignes de son rang au pays tant du côté de sa famille, son parti politique l’UDPS que du régime qui voulait tout avoir pour son honneur tout en appréhendant ce qui pourra en advenir avec des millions des gens dans la rue pour son enterrement. Voilà tout ».
Et quel avenir dans tout cela pour le pays ? « N’étant pas devin, je me fie à chaque jour qui passe. Une chose est certaine, le régime actuel est parvenu à la fin de son cycle d’existence comme il en fut pour nous avec Mobutu début des années 1990. Toutes les manœuvres de l’ancien guide contre les résolutions la CNS comme celles de Kabila aujourd’hui contre les résolutions de la Concertation nationale et les deux dialogues sont une preuve qu’on n’a plus rien de nouveau à proposer alors que le niveau de vie du peuple va à l’eau. Entre 2006 et 2011, lorsque la disposition constitutionnelle d’une présidentielle à deux tours avait été modifiée pour passer à une présidentielle à un seul tour, personne n’avait bronché. Lorsque le pouvoir a échoué à modifier la constitution en janvier 2015 pour permettre à Kabila de demeurer au pouvoir fin 2016, là on a tous compris que le peuple était déterminé et plus que mature pour ne plus accepter n’importe quoi ».
Dans la pensée d’un jeune cadre du PPRD
« Pour nous les choses sont claires et qu’on se le dise, nous voulons du camarade Joseph Kabila encore pour longtemps à la tête de ce pays. Tout le monde souhaite son départ mais pour qu’il aille où et qu’il fasse quoi après ? Il est encore jeune et dans la force de l’âge contrairement aux autres ».
Mais pour quel nouveau type de projet de société alors que tout semble avoir été un échec pour lui depuis 2001 malgré deux mandats électifs (2006-2011 et b2011-2016) ? « C’est cela votre part d’erreur les journalistes. Vous oubliez si vite toutes les réalisations du camarade président pour ne regarder que ce qui ne marche pas. La réunification de ce pays alors qu’il était déchiré par la guerre des rébellions depuis 1998 jusqu’en 2003 à Sun City après le dialogue inter congolais est un fait significatif non ? ».
Bien avant la rébellion de l’AFDL qui a amené les Kabila au pouvoir, le Zaïre n’avait jamais connu les guerres de rébellion tout de même ? « Bien sûr que oui mais les époques sont différentes. Tous les vœux politiques qui se prennent la tête dans l’opposition ne sont que des jaloux contre la jeunesse que nous représentons et qui constituent l’avenir de ce pays. Voilà pourquoi nous ne leur laisseront aucun espace pour revenir aux affaires si les jeunes qui les entourent ne veulent pas composer avec nous.
Et les massacres de l’Est et du centre du pays avec les fosses communes du Kasaï, l’enrichissement du clan Kabila pendant que le peuple demeure pauvre ? « Tout cela relève de la chimère et des accusations fortuites sans aucune preuve même s’il faut déplorer tous ces morts. Au PPRD, nous estimons que laisser le pouvoir à l’opposition actuelle créera une chasse à l’homme intrépide contre nous demain pour des règlements de compte. Une raison de plus qu’on y soit et qu’on y reste ».