On l’avait peut-être trop attendue l’adresse de Joseph Kabila devant la 72ème Assemblée Générale de l’Onu de ce samedi 23 septembre 2017, un discours qui finalement s’est terminé sur un gout d’inachevé. Au final, ce fut un discours vide devant une salle clairsemée et à moitié vide ; et surtout aucune annonce importante face à la grave crise politique devenue institutionnelle que traverse le pays depuis plus d’un an.
Le principe veut que certes on ne parle pas de la politique intérieure dans une assemblée extérieure du pays, mais aucune garantie ni date n’ont été soufflées en rapport avec les futures élections pour lesquelles tous attendaient un mot. Pas non plus de date précise sur la prochaine publication du calendrier électoral. À l’ONU, Kabila qui n’a rien promis du tout se contentant d’affirmer simplement et verbalement que « le cap vers les élections crédibles, transparentes et apaisées est définitivement fixé et que la marche dans cette direction est irréversible. Le tout sans ingérence extérieure ni diktat quelconque ».
Pourtant devant la même assemblée le 25 septembre 2014 et défendant son bilan, Joseph Kabila avait assuré de la tenue des élections de 2016 conformément au calendrier prévu. : « Sur le plan politique, la consolidation de la démocratie et le renforcement de la cohésion nationale demeurent nos objectifs prioritaires. A ce propos, je réaffirme la tenue prochaine des élections conformément au calendrier arrêté par l’institution nationale compétente. Toutes les dispositions sont prises pour que notre pays en sorte plus apaisé, plus uni et plus fort » affirmait-il.
La Monusco et sa présence dans le pays
Les jours de la force de la mission de l’ONU au Congo (Monusco) sont-ils désormais comptés ? C’est le moins que l’on puisse se demander au regard du discours de Kabila en parlant de la « souveraineté » de son pays. Kabila estime que le « redimensionnement de la force de l’ONU » aujourd’hui estimée à près de 20.000 hommes s’impose après 20 de présence en RDC d’où elle n’a pas vocation d’y rester à perpétuité. Pour cela demande-t-il « une révision stratégique du nombre des troupes de la Monusco jusqu’à son retrait total ».
De la violence généralisée qui sévit dans le pays tout entier et singulièrement dans l’espace Kasaï et ses conséquences néfastes, Joseph Kabila l’attribue à une « milice mystico-tribale » assimilée à des terroristes ayant pour objectif « d’anéantir la paix, de contrarier la dynamique des solutions consensuelles obtenues au niveau national et de miner les efforts de développement ». C’est à la même milice qu’il attribue « la barbarie dont les deux experts de l’ONU assassinés ont été victimes en mars 2017 ». Et aucun mot sur la violence des forces de sécurité gouvernementale, armée et police impliquées dans cette tragédie.
RTNC : Bourde ou signe de temps ?
Une bourde ou carrément un signe de temps, c’est la question que se pose les observateurs après que la radiotélévision nationale, la célèbre RTNC n’ait pas retransmettre en directe le discours de Joseph Kabila. Si certaines sources évoquent des problèmes techniques et Dieu sait quels moyens sont alloués au bon fonctionnement de cet outil de propagande du régime ; d’autres parlent « d’une erreur sur l’heure exacte du discours », un décalage horaire de près de 8 heures séparant Kinshasa de New-York.
Toute chose restant égale par ailleurs, la RTNC n’en est pas à sa première ? Son ancêtre, l’OZRT de triste mémoire avait à son époque diffuser en direct le discours du maréchal Mobutu dans la même salle de l’ONU sous les hués de la diaspora zaïroise. S’en étant rendu compte avec retard, la retransmission directe fut coupée et les confrères responsables de cette « faute technique » lourdement sanctionnés. Il ne s’était plus passé beaucoup d’années que le régime Mobutu s’effrita avec la tenue de la Conférence Nationale Souveraine (CNS) début des années 1990 avant sa chute face à l’occupation rwandaise en 1997.
Une protestation énergique des opposants
Pendant que joseph Kabila prononçait son discours dans une salle à moitié vide, les diasporas congolaises de l’Amérique du Nord, de l’Europe, voir venue du pays ; manifestaient bruyamment à l’extérieur.
Pour les opposants présents sur place à New-York dont Olivier Kamitatu sur son compte Twitter, c’est « douloureux et pathétique » de voir « un tout petit carré de collaborateurs en rangs serrés » pour soutenir encore « Joseph Kabila qui rate son tout dernier discours à New- York ! ». L’ancien SG de l’UDPS, Jacquemain Shabani sur le même réseau social estimant pour sa part que « #RDC #UNGA2017 Quand on n’a que son comité de rédaction comme auditoire c’est tout un message en Relations Internationales ». La comparaison en juxtaposant deux photos de Mobutu en 1974 et Kabila en 2017 dans la même salle en disant long.
VIDÉO DU DISCOURS DE KABILA
