La Basilique Saint-Pierre de Rome dans la Cité du Vatican a été le théâtre d’une célébration particulière par le pape François en cette soirée du jeudi 23 novembre 2017. En effet, le souverain pontife a dit une messe spéciale suivie d’une veillée de prière pour la paix au Soudan du Sud et en RD-Congo, les deux pays qu’il aurait pu visiter en cette fin novembre 2017.
« Cette célébration ouverte à tous, selon le Vatican n’avait pas besoin de billet d’invitation spéciale ». Le projet de voyage du pape dans ces deux pays envisagés avait été reporté fin mai 2017. « Nous pensons que nous pouvons faire ce voyage, même si la situation y est mauvaise », expliquait le pape François à propos du Soudan du Sud déchiré par une guerre civile tout en saluant « le travail pour la paix des différentes confessions chrétiennes du pays ». Le pape François avait en effet annoncé en février dernier son souhait de se rendre, avec le primat anglican Justin Welby, dans ce pays d’Afrique déchiré par la guerre civile.
Quant à un déplacement en RD-Congo, il a été plusieurs fois envisagé, éventuellement dans la suite immédiate du voyage au Soudan du Sud. Mais les difficultés politiques du pays, et le report incessant des élections présidentielles, ont fini par empêcher la concrétisation de ce projet. Le Saint-Siège ne cachant d’ailleurs pas son agacement face à l’attitude du président Kabila.
Dans son mot de circonstance, le pape François n’a pas manqué de fustiger « cette hypocrisie de nier les massacres de femmes et d’enfants ! Là, la guerre montre son visage le plus horrible ! (…). Ce soir, par la prière, nous voulons jeter des semences de paix dans la terre du Soudan du Sud et de la République démocratique du Congo, et en toute terre blessée par la guerre ». Et de demander dans sa prière à Dieu « d’abattre les murs de l’inimitié entre les hommes, de secourir les femmes congolaises et sud-soudanaises, premières victimes de la guerre, de sauver les enfants qui souffrent des conflits auxquels ils sont étrangers, mais qui volent leur enfance et leur vie ».
Aux dirigeants de ces pays et aux belligérants dans les conflits de privilégier les solutions pacifiques : « Nous chrétiens, nous croyons et nous savons que la paix est possible parce que le Christ est ressuscité ». Deux statues de la Vierge Marie bénies par le Pape seront convoyées au Soudan du sud et en RDC comme symbole de cette « proximité de la mère de Dieu avec toutes les victimes innocentes » de ces conflits.
Des chants en swahili, en français et en anglais ont accompagné la veillée de prière. Des portraits anonymes d’enfants du Soudan du Sud et de la RDC brandis par les fidèles ont été déposés sur des chevalets devant le souverain pontife et devant l’assemblée dans la Basilique Saint-Pierre pleine à craquer.
CRÉDIT IMAGES VATICAN VIA YouTube
Echo de Kinshasa
Cette prière pour la paix au Soudan du Sud et en RD Congo a également coïncidé avec la tenue à Kinshasa des travaux de l’Assemblée plénière extraordinaire des Evêques de la Conférence Episcopale Nationale du Congo (CENCO) commencés le 22 se sont achevés aujourd’hui le 24 novembre 2017 au Centre d’Accueil Caritas à Kinshasa.
Ainsi le président de la CENCO, Mgr Marcel Utembi ; en avait-il invité toutes « les paroisses et communautés qui composent l’Eglise Famille de Dieu en RD Congo de se retrouver à 17h 30’ dans leurs lieux de prière habituels pour être en communion avec le Pape ». Tous les évêques ont pu participer à la messe pour la paix concélébrée en la Cathédrale Notre Dame du Congo.
L’occasion pour le représentant du pape en RDC, son compatriote argentin Mgr Luis Mariano Montemayor de faire une autopsie de la crise congolaise lors de son homélie en la Cathédrale du Sacré Cœur de Kinshasa. Comme dans ses habitudes, l’ambassadeur du Pape a eu utilisé un ton ferme exprimant dans son sermon une sorte d’agacement mêlé aux valeurs spirituelles de la dignité humaine : revenons au respect de la vie humaine et la dignité des enfants de Dieu.
Pour lui donc, « Nous tous sommes témoins des innombrables souffrances physiques, psychologiques et morales de nos frères et sœurs dans ce pays, béni pourtant par Dieu mais déchiré par les hommes. Comment en sommes-nous arrivés à ce point, dans un pays aussi riche de ressources et pleine de potentialités humaines ? Je n’arrive pas encore à comprendre. Oui, la RDC est aujourd’hui malade ! Son grand mal c’est qu’elle a perdu son unité, elle est tentée de se diviser ! Le sens de la recherche du bien commun s’est perdu ! Poussés par les intérêts propres, personnels, familiaux, tribaux, régionaux, politiques, les uns se sont dressés contre les autres ! Et, comme dans la vision du prophète Daniel sur le destin du grand Royaume de Babylon, dans la Bible, la RDC risque de se transformer en un géant aux pieds d’argile
Et de continuer par un message d’espoir : « Mais la RDC n’est pas condamnée à une dégradation inévitable ! Bien au contraire ! Elle peut tirer des leçons de ses erreurs ! Elle a une grande vocation ! C’est la vocation à devenir une oasis de paix pour tous ses habitants, un pays hospitalier pour tous les voisins qui fuient la violence et, même, un grand fournisseur des ressources pour le développement, non seulement de son propre peuple, mais du monde entier ! Voilà sa vocation naturelle ».
Mgr Mariano n’a pas manqué de rappeler à tous que « La violence, sous toutes ses formes, n’est pas la réponse à laquelle le Peuple Congolais aspire. Non, notre peuple a besoin de paix ! Notre peuple veut la paix ! Il souhaite vivre dans la tranquillité et le calme. Surtout, il veut être respecté dans sa dignité d’enfant de Dieu. Mais il ne doit pas oublier que pour l’obtenir, la pratique de la patience, du dialogue et du pardon envers tous, sont les instruments privilégiés des disciples du Christ ».
L’aide du Vatican
La prière spéciale pour la RDC était aussi l’occasion pour le Vatican de faire une annonce pour une aide spéciale en faveur de l’Espace Kasaï où le nonce apostolique et le président de la Cenco avaient découvert les tristes réalités après les violences liées aux événements de Kamuina Nsapu en septembre 2017. Très affectés par les souffrances de la population, ils avaient concélébré une messe dite de réconfort en l’église Sainte Thérèse de Nganza
Dans l’esprit de la prière et au cours d’un entretien à notre confrère de Radio Vatican, Michel Roy ; Secrétaire Général de Caritas Internationalis, a annoncé « le déblocage prochain par la Cité de Vatican des ressources pour la région du Kasaï : « Comme chrétiens, on n’est pas que dans la prière, mais aussi dans l’action. Et le Saint-Père nous montre la voie (…) On travaille aussi dans la diplomatie et dans l’humanitaire. Le Saint-Siège va donc débloquer des ressources pour les Kasaï. Les 4 évêques du Kasaï étaient venus à Rome pour nous demander de ne pas oublier les Kasaï (…) pour nourrir, soigner, reconstruire les écoles, pour aider les enfants qui étaient enrôlés par les milices. Le Saint-Siège va donner une quantité importante d’argent comme il l’a fait avec le Soudan du Sud ».
Roger DIKU