C’est dans sa recommandation N°2 adoptée par 97 voix pour et 0 voix contre que l’Assemblée Générale de la Fédération Protestante de France (FPF) apporte son soutien à l’Eglise protestante sœur du Congo. C’était au cours de sa session tenue à Paris les 27 et 28 janvier dernier :
« Informé de la situation sécuritaire et des tensions politiques en RDC et de la répression que subissent dans ce pays les chrétiens qui réclament les élections crédibles et la cessation des violences politiques, l’Assemblée Générale de la Fédération Protestante de France (FPF), réunie à Paris les 27 et 28 janvier 2018, demande :
- A son président, de transmettre au pasteur André Bokundoa, nouveau président de l’Eglise du Christ au Congo (ECC), un message fraternel et de prière face aux menaces dont font l’objet les dirigeants de l’Eglise ;
- A son président, d’alerter les autorités françaises sur les risques concernant la sécurité personnelle des autorités ecclésiastiques et communautés chrétiennes congolaises, tant protestantes que catholiques, actuellement ciblées par le régime en place.
À Son Conseil, d’étudier la meilleure façon de suivre la situation (contacts réguliers, mise en place d’une plateforme rassemblent les différents organismes protestants travaillant avec l’ECC ou autres) ».
Cette intervention des protestants français arrive après la répression de la deuxième marche des laïcs chrétiens catholiques lors de la marche pacifique du dimanche 21 janvier 2018 qui a encore fait des morts dans la capitale congolaise.
La prise de position de l’Eglise protestante de France intervient après celle des catholiques français à leurs homologues congolais au travers du Cardinal Laurent Monsengwo alors qu’une réelle tension existe entre le régime en place à Kinshasa et les responsables ecclésiastiques.
Lire aussi : RDC : L’Eglise catholique de France soutient le Cardinal Laurent Monsengwo https://www.afriwave.com/?p=7074
Le sermon du pasteur Ekofo : « J’ai l’impression que l’État n’existe pas vraiment » …
Tout le monde se souviendra encore longtemps de la manière dont ce pasteur protestant avait sermonné les dignitaires du régime et leur pouvoir le 17 janvier 2018 lors du culte en mémoire de l’ancien président assassiné Laurent-Désiré Kabila.
Après le cardinal Laurent Monsengwo, archevêque catholique de Kinshasa, qui dénonçait début janvier la « barbarie » de la répression par les forces de sécurité du régime de la marche du 31 décembre 2017, et en appelait à ce que « les médiocres dégagent pour que règnent la paix, la justice en RD Congo », c’est autour du pasteur François-David Ekofo qui s’est directement adressé au pouvoir. Dans un langage clair, il a rappelé aux dignitaires du régime cette parole léguée par Laurent-Désiré Kabila à savoir « de ne jamais trahir le Congo : « Nous commémorons l’anniversaire de la mort de Mzé Kabila, et nous retenons ce que nous pensons qui sera le résumé de sa pensée, qui va traverser des générations et des générations de Congolais. Et il nous a légué cette parole : de ne jamais trahir le Congo ».
Au travers des images, il évoquait notamment cette nécessité de savoir passer le relais : « J’aime bien l’athlétisme. Et j’aime spécialement […] la course de relais, ou une première personne transmet le bâton à une deuxième personne, à une troisième, à une quatrième. La première personne à courir, on doit toujours prendre quelqu’un qui est le meilleur. Parce que de ses efforts dépendront le reste à courir ».
Devant une assemblée et un parterre politique médusés et qui s’y attendaient le moins dont les opposants dissidents devenus accompagnateurs, le Premier ministre Bruno Tshibala et son compère le président du Conseil national de suivi de l’accord (CNSA)Joseph Olenghankoy ; Ekofo n’y était pas allé par quatre chemins : « Dans l’histoire du pays, c’est pareil. Nous prenons un témoin que nous transmettons à la génération qui vient. D’où ma question. Quel pays allons-nous léguer à nos enfants, à nos petits-enfants ? ».
Visiblement atteints, les autres caciques comme le ministre de la Justice, Alexis Thambwe Mwamba, le Secrétaire Général du Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD, parti présidentiel), Henri Mova Sakanyi, l’épouse de Joseph Kabila et plusieurs membres de la famille du président n’ont pas appréciés cette franchise du pasteur protestant. Et ce fut le début de son calvaire.
Pour Ekofo donc, il faut « léguer à nos enfants un pays où l’État existe réellement. Je dis bien réellement. Parce que j’ai l’impression que l’État n’existe pas vraiment ». Evoquant les richesses du pays que le monde entier envie, il s’est demandé si cela était un péché quelconque : « Nous avons du pétrole abondant […]. Nous avons le coltan, que tout le monde cherche dans le monde entier. Nous avons l’or, le diamant, etc. C’est un péché pour le Congo d’être encore pauvre. Nous devrions être parmi les riches nations du monde ! ». Et ce, avant de conclure que : « Le Congo ne sera pas toujours faible comme il est maintenant. Il se réveillera un jour ».
Bottant en touche ce discours interpellant du pasteur protestant, le SG du PPRD, Henri Mova estimait que : « C’est complexe ! On ne peut pas se contenter de faire une affirmation comme ça. Que le pasteur nous interpelle, tant mieux. C’est un patriote. Que d’autres catégories sociales nous interpellent, tant mieux… Mais […] il n’y a pas d’un côté, [ceux] qui font le pays, et de l’autre [ceux] qui font des sermons. L’interpellation du pasteur ne concerne pas que la classe dirigeante. Cela concerne tout le monde, y compris la convoitise extérieure. La conscience de servir le Congo est là mais plein de gens nous empêchent de faire éclore toute la potentialité qu’il y a dans le Congo ».
Images YouTube CONGONEWSPLUSTV
Pasteur Ekofo, une « Affaire d’Etat » ?
Depuis ce jour du mardi 16 janvier 2017, c’était le calvaire pour le pasteur François-David Ekofo ; des rumeurs aussi folles les unes que les autres ont fait état d’une théorie du complot contre sa personne. Devenue presqu’une affaire d’Etat, les uns annonçaient son arrestation par le régime, les autres son exil en Amérique ; le tout sur fond des démentis non étayés.
Des sources crédibles, AFRIWAVE.COM peut l’affirmer que le pasteur David-François Ekofo a été victime des menaces et autres intimidations de la part du régime à l’issu de son sermon qui n’avait pas du tout plu au sommet de l’Etat. Se sentant inquiété, avec son épouse ; ils ont fini par être exfiltrés de Kinshasa et du pays pour leur sécurité. Les autorités de l’ECC, ses enfants qui vivent tous entre l’Europe et les Etats-Unis comme ses proches ne veulent pas en parler pour ne pas prêter le flanc aux « méchants » comme l’affirme nos sources.
En lisant bien entre les lignes le message de soutien de l’Eglise protestante de France à celle du Congo, on comprend bien ce qui se passe en réalité ici dans le pays, notamment pour ce qui concerne la vie du pasteur Ekofo : « Informé de la situation sécuritaire et des tensions politiques en RDC et de la répression que subissent dans ce pays les chrétiens qui réclament les élections crédibles et la cessation des violences politiques… de transmettre au pasteur André Bokundoa, nouveau président de l’Eglise du Christ au Congo (ECC), un message fraternel et de prière face aux menaces dont font l’objet les dirigeants de l’Eglise…d’alerter les autorités françaises sur les risques concernant la sécurité personnelle des autorités ecclésiastiques et communautés chrétiennes congolaises, tant protestantes que catholiques, actuellement ciblées par le régime en place ».
Nous y reviendrons !
Roger DIKU et Luaba Wa Ba Mabungi / AFRIWAVE.COM